Le recours à l’intelligence artificielle inquiète à Hollywood. Mais cela n’a pas empêché Tom Hanks de s’étonner de cette technologie « incroyable », qui a permis de le rajeunir « en temps réel » dans son dernier film.
Dans “Ici : Les plus belles années de nos vies”, l’acteur américain incarne Robin Wright, pour un voyage dans le temps dans l’intimité d’un couple, avec leurs joies, leurs peines et leurs doutes, étalés sur plusieurs décennies.
La technologie permet à Tom Hanks d’interpréter son personnage à travers les générations, de l’adolescent idéaliste à l’homme âgé et fragile.
Les réalisateurs se sont associés au studio Metaphysic pour développer un outil appelé Metaphysic Live, une IA capable de rajeunir ou de « vieillir » les acteurs sur commande.
“Ce qui est étonnant, c’est que tout se passait en temps réel”, explique Tom Hanks.
L’acteur de 68 ans a pu constater le résultat de sa prestation, avec un visage lissé ou marqué par le poids des années, quelques instants après chaque scène.
« Nous n’avons pas eu à attendre huit mois pour la post-production », se souvient-il. « Il y avait deux moniteurs sur le plateau. L’un montrait le flux réel capturé par l’objectif, et l’autre était juste une nanoseconde plus lente et montrait notre version « deep fake ».
Les « deep fakes », ces vidéos où une personnalité est recréée par l’IA et peut être utilisée pour faciliter des arnaques, inquiètent en pleine campagne présidentielle aux Etats-Unis.
L’usage de l’IA fait également polémique à Hollywood, où acteurs et scénaristes ont mené l’an dernier de longues grèves, se croyant menacés par cette avancée technologique.
“Disons-le d’emblée, beaucoup de gens sont en pantalon”, a admis M. Hanks lors du festival AFI Fest ce week-end à Hollywood.
Pour “Ici”, du réalisateur Robert Zemeckis, la société d’IA “a pris 8 millions d’images de nous sur le web”, pour recréer des visages correspondant à toutes les époques, a-t-il détaillé.
– « Photos de famille » –
« Ils ont cherché sur le Web des photos de nous à toutes les époques – tous les événements que nous avons filmés, toutes les photos de films, toutes les photos de famille qui auraient pu exister quelque part », explique-t-il.
Le recours à l’IA n’est pas la seule prouesse technique d’« Ici ». Le film est entièrement tourné avec une caméra statique, placée la plupart du temps dans un coin du salon d’une maison de banlieue américaine.
Ce plan fixe est agrémenté de sauts temporels réguliers : la narration fait ainsi des allers-retours vers différents moments de la vie du couple, et remonte même vers des générations précédentes ou des époques lointaines, remontant jusqu’aux dinosaures.
« Here » est basé sur un roman graphique de Richard McGuire, qui utilise le même concept.
“Il fallait être fidèle au style du livre”, explique le cinéaste Robert Zemeckis, vantant un processus qui engendre “une intimité vraiment puissante”.
Mais c’est l’utilisation de l’IA qui suscite le plus d’intérêt autour de ce long-métrage.
Cette technologie est également au cœur d’un film bien différent, présenté à l’AFI Fest : « Wallace & Gromit : Vengeance Most Fowl », le dernier volet des aventures des célèbres personnages britanniques en pâte à modeler, animé en « stop motion ».
Il montre Wallace construisant un « gnome intelligent » pour s’occuper des tâches ménagères. Une invention qui ne plaît pas à son fidèle chien Gromit, et qui finit par prendre une sinistre tournure.
L’IA devient un “obstacle entre Wallace et Gromit”, résume le co-réalisateur Merlin Crossingham. “C’est un film très léger, même si le sujet est très sérieux.”
Si « nous pouvons susciter une conversation plus intellectuelle à partir de notre aventure idiote avec Wallace et Gromit, alors ce n’est pas une mauvaise chose », sourit-il.
Le cinéaste refuse toutefois d’utiliser l’IA pour cette franchise. “Nous ne le faisons pas et nous ne le ferions pas”, a-t-il insisté, sous un tonnerre d’applaudissements à Hollywood.
« Vengeance Most Fowl » sera disponible sur Netflix le 3 janvier.