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Au procès des soupçons de financement libyen, Nicolas Sarkozy expose sa version de sa rencontre avec Mouammar Kadhafi sous une tente à Tripoli en 2005

La vidéo est en pause. Le reportage de 2, diffusé sur l’écran du tribunal, se fige. Sur l’image, on voit Nicolas Sarkozy assis dans un fauteuil en cuir couleur crème, les mains sur les genoux et la tête légèrement inclinée. C’était le 6 octobre 2005, alors qu’il était ministre de l’Intérieur, en visite à Tripoli, en Libye, pour s’entretenir avec le dictateur libyen Mouammar Kadhafi. La rencontre est organisée sous une tente, avec une délégation, dont l’interprète officiel de la France qui apparaît à la droite de Nicolas Sarkozy. Près de vingt ans plus tard, l’ancien ministre, devenu depuis chef de l’Etat, scrute attentivement l’écran. Renvoyé devant la justice pour des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, il a été sommé de s’expliquer, lundi 20 janvier, sur son voyage en Libye, devant le tribunal correctionnel de Paris.

« Avez-vous, à un moment donné, sous la tente, évoqué une demande de financement ? » demande le président du tribunal, rompant le court silence qui a suivi la diffusion du reportage. “Madame, cela me fait mal de répondre à une telle question”, soupire Nicolas Sarkozy, qui annonce néanmoins vouloir développer son argumentation. Car cette première rencontre entre Mouammar Kadhafi et Nicolas Sarkozy est cruciale dans cette affaire : selon l’accusation, c’est lors de cette visite que le “un pacte de corruption” pour financer la campagne présidentielle. “Grotesque”, » emporte Nicolas Sarkozy, qui hausse les épaules et agite les mains.

“Je n’ai pas eu l’idée de ce voyage en Libye, c’est une invitation”affirme-t-il d’emblée. « Un ministre de l’Intérieur doit-il voyager ? Nous ne pouvons pas gérer les flux migratoires uniquement en restant à l’intérieur des frontières », Nicolas Sarkozy se défend, posant à la fois des questions et des réponses. « J’ai écrit à mon homologue ministre de l’Intérieur pour lui annoncer que j’acceptais de venir, d’en fixer la date et qu’il y aurait une visite préparatoire de M. Guéant, qui a fait l’objet d’une lettre officielle. C’est dans ces conditions que j’ai été amené à me rendre en Libye en 2005.explique le prévenu. Nicolas Sarkozy affirme être arrivé à 13 heures à Tripoli et en être reparti le soir même.

Entre-temps, il s’est rendu dans cette fameuse tente pour rencontrer Mouammar Kadhafi. “C’était difficile à entendre et on était à 2 mètres ou 2,50 mètres”décrit-il, photo à l’appui, expliquant qu’il n’a jamais été aux côtés des “guide” Libyen, ni en tête-à-tête. «Il y avait un dîner pour rompre le jeûne [pour le ramadan]nous sommes partis avant les bonbons et nous étions dans l’avion à 21 heures », il explique. « On me connaît, j’ai encore un cerveau ! Ce n’est pas mon idée d’y aller [en Libye]. Je n’y suis jamais allé, j’ai une interprète officielle et je vais lui demander de me payer 30, 40, 50 millions ?! C’est complètement fou !s’exclame l’ancien président de la République.

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Alors que Ziad Takieddine, également déféré au tribunal correctionnel de Paris, est soupçonné d’avoir mis Claude Guéant en contact avec de hauts dignitaires libyens pour promouvoir “le pacte de corruption”, Nicolas Sarkozy affirme que le 6 octobre 2005, l’homme d’affaires n’était pas présent. « Il y avait des journalistes. Personne, personne, n’a vu, croisé ou vu M. Takieddine. Il n’a jamais été présent à un endroit où j’étais. “Il a dit qu’il faisait très attention à ne jamais apparaître sur les photos…” rétorque alors le président. « Oui, c’est nouveau. Il a vraiment fait attention ! Il n’était pas là »insiste le prévenu. Il charge le Franco-Libanais, actuellement en fuite, comme il l’avait fait une semaine plus tôt. “Je ne l’ai jamais aimé car à partir du moment où on était ami avec ce manipulateur, le risque de manipulation était grand”, dit l’ancien chef de l’Etat.

De son côté, Claude Guéant a répété jeudi que Ziad Takieddine l’avait piégé en lui faisant rencontrer l’ancien patron des renseignements militaires libyens Abdallah Senoussi, condamné à perpétuité par contumace par la justice française en 1999, pour son rôle dans l’attentat contre Le DC-10 d’UTA. Or, le dîner a eu lieu à Tripoli le 1er octobre 2005, cinq jours avant la visite de Nicolas Sarkozy. Ce dernier a déclaré lundi : “Quand M. Guéant dit ‘j’étais coincé’, je le crois.” “A aucun moment je n’ai de contact, ni avec M. Senoussi, ni avec M. Takieddine”, insiste-t-il. Or, selon l’accusation, cette rencontre faisait partie d’une contrepartie pour « pacte de corruption », car Abdallah Senoussi voulait ainsi négocier son amnistie en échange de fonds libyens. “Il n’y a jamais eu de rencontre entre M. Senoussi et moi, je ne lui ai jamais promis d’amnistie puisque j’ai interdit l’amnistie !”s’indigne Nicolas Sarkozy, qui a de fait renoncé à la grâce présidentielle une fois élu à la tête de la France, respectant ainsi une promesse de campagne.

«Je n’avais pas un centime libyen dans ma campagne. S’il y avait eu un centime, nous l’aurions trouvé ! répète Nicolas Sarkozy, qui l’a affirmé dès l’ouverture de l’audience. « C’est le procès pour savoir s’il y a eu un financement de Kadhafi dans la campagne de Sarkozy ! Et il n’y avait pas de financement”insiste-t-il, en réponse aux questions d’un des trois magistrats du parquet national financier. « Le pacte de corruption sous la tente est impossible »il maintient, “C’est la vérité.” Une affirmation qui fut reprise peu après par un avocat des parties civiles : “C’est VOTRE vérité.”

 
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