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Dans les manifestations en Géorgie, débrouillardise, solidarité et gâteau au caramel

Dans les manifestations en Géorgie, débrouillardise, solidarité et gâteau au caramel

L’odeur âcre des gaz lacrymogènes dans les rues de Tbilissi se mêle à quelques douces senteurs. Levan Kamkamidze, un Géorgien souriant de 25 ans, distribue des morceaux de gâteau au caramel recouverts d’une épaisse crème au beurre à d’autres manifestants pro-européens.

“C’est ma mère qui m’a offert ce gâteau et m’a dit ‘vas-y, il y a des enfants, des gens qui ont peut-être faim, qui ont besoin d’énergie pour se battre'”, explique le jeune entrepreneur. Les stocks disparaissent en un clin d’œil.

« Nous soutenons notre avenir » en nourrissant les manifestants, a-t-il déclaré.

La dégustation a lieu à quelques centaines de mètres des affrontements entre policiers et manifestants qui protestent depuis le 28 novembre contre la suspension par le gouvernement du processus qui doit faire entrer la Géorgie dans l’Union européenne.

Ils accusent le parti au pouvoir, le Rêve géorgien, de vouloir ramener l’ancienne république soviétique du Caucase dans le giron de la Russie voisine.

L’idée d’un rapprochement avec la Russie, qui a gagné la guerre contre Tbilissi en 2008 et contrôle effectivement 20 % du territoire géorgien, agace particulièrement Levan Kamkamidze. Et s’il parle russe couramment, c’est parce qu’il faut « connaître la langue de l’ennemi », dit-il avec un clin d’œil.

En Géorgie, “nous avons notre culture, nous avons notre vin, nous avons tout ce que nous voulons”, insiste-t-il, “la seule chose qui nous manque, c’est la paix”, ajoute le jeune homme en regardant miroiter un nuage de fumée. au loin, un mélange de gaz lacrymogènes des policiers et de feux d’artifice tirés par les manifestants.

– Sandwichs ou pétards –

Alors que le gel des ambitions d’adhésion à l’UE a jeté de l’huile sur le feu, les tensions s’accroissent en Géorgie depuis des mois.

Des manifestations massives ont eu lieu au printemps contre une loi « influence étrangère » jugée répressive. Puis, fin octobre, le parti Rêve géorgien a remporté des élections jugées « volées » par l’opposition.

Les manifestants sont donc formés et organisés pour durer. Dans la foule, il n’est pas rare de voir des sandwiches ou de l’eau être distribués. Parfois même des pétards et des feux d’artifice qui seront ensuite lancés sur les forces de l’ordre.

Liza Sardalichvili, une étudiante de 18 ans, tend aux passants une bouteille de solution saline pour se rincer les yeux irrités par les gaz lacrymogènes.

«On sait comment réagir, comment s’entraider», explique-t-il en haussant les épaules.

La jeune fille aux cheveux noirs tressés affirme faire partie d’un groupe Facebook où s’organisent des dizaines de milliers de militants.

Avec un petit laser vert, Liza Sardalichvili tente également de brouiller la vision des policiers, pour les empêcher de « viser » lorsqu’ils tirent des balles en caoutchouc.

Quand la police utilise de puissants canons à eau pour disperser la foule, les plus intrépides bravent le jet pour protéger le reste des manifestants. Certains en profitent pour effectuer des mouvements de danse, ou des gestes moins polis envers les agents.

Des dizaines de personnes ont été blessées depuis le début du mouvement, notamment des manifestants, des journalistes et des policiers.

– De Munich à Tbilissi –

Ce sont les images du passage à tabac d’un homme par des policiers qui ont décidé Astamur Jikhachvili, un Géorgien de 33 ans expatrié en Allemagne, à venir à Tbilissi : « J’ai vu la vidéo et j’ai pris un billet d’avion, parce que je ne pouvais tout simplement pas » t”ne reste pas là-bas, à l’étranger.”

C’est un long voyage pour un séjour de seulement deux jours et demi, et son impulsion l’a même surpris. Mais par solidarité, il a voulu être là.

Avant son arrivée, il dit aussi avoir poussé ses proches à manifester. “Et je pensais que je n’avais pas le droit, moralement, de dire aux gens de sortir pendant que j’étais à la maison.”

Depuis son arrivée, il a lui aussi vu d’autres manifestants distribuer de la nourriture ou des boissons. “Ça motive, ça donne un esprit de solidarité”.

Alors lui aussi a voulu apporter sa contribution et a emporté avec lui cinq énormes bouteilles de solution saline, si lourdes qu’elles faisaient basculer son sac à dos.

Ravi de sa bonne action, il voulut les distribuer à la foule. Mais personne n’en avait besoin. « Tout le monde est trop organisé », dit-il en éclatant de rire.

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