Le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, appelle Ottawa à resserrer le Code criminel pour éviter que les discours haineux soient légitimés « sous couvert de foi ». Par son inaction, le gouvernement Trudeau « perpétue des vides juridiques qui contribuent au retrait », déplore-t-il.
Ses griefs sont détaillés dans une lettre envoyée jeudi par le ministre à son homologue fédéral, Arif Virani, et à tous les procureurs généraux des autres provinces.
Simon Jolin-Barrette déplore qu’une faille du Code criminel soit actuellement exploitée « pour légitimer des propos discriminatoires ou incendiaires sous couvert de foi », une pratique qui « ne doit plus être tolérée ».
« Cette exception offrait notamment un bouclier juridique aux extrémistes radicaux pour inciter à la haine et à l’intolérance envers des groupes ethniques ou religieux ou diffuser des messages racistes, misogynes ou homophobes », poursuit-il.
Actuellement, attiser la haine contre un « groupe identifiable » et fomenter « l’antisémitisme en tolérant, en niant ou en minimisant l’Holocauste » constitue une infraction pénale.
Cependant, dans les deux cas, il existe une exemption fondée sur la religion.
Nul ne peut être reconnu coupable s’il « a, de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit », prévoit le Code criminel.
Le cas d’Adil Charkaoui
Des « incidents » où des propos incitant à la violence étaient protégés par cette exception ont été documentés, indique Simon Jolin-Barrette, dans sa missive, mais il n’en détaille aucun. Il cite toutefois des données de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) démontrant que les crimes haineux signalés par la police au pays ont pratiquement triplé depuis 2015.
L’affaire n’est cependant pas sans rappeler la décision du Directeur général des poursuites criminelles et pénales (DPCP) de ne pas poursuivre l’imam Adil Charkaoui pour des propos qu’il a tenus lors d’un rassemblement pro-palestinien à Montréal, en octobre 2023.
« Allah, prends soin de ces agresseurs sionistes. Allah, prends soin des ennemis du peuple de Gaza. Allah, identifie-les tous un par un puis extermine-les et n’exclus aucun d’entre eux ! », a-t-il lancé, en arabe, aux milliers de manifestants rassemblés dans le centre-ville.
Sur les réseaux sociaux, Adil Charkaoui s’est alors défendu d’avoir appelé à la haine et à la violence contre les juifs, plaidant qu’il s’agissait en fait d’un appel à Dieu. Il a également déclaré qu’il citait le Coran lors de son discours.
C’est également le cas qui a été cité par le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, lorsqu’il a demandé le retrait de l’exemption religieuse du Code criminel en novembre 2023.
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