Ils s’appelaient Gilles, Michèle, Sylvain et Robert. C’étaient des pères, des mères, des fils, des frères. Quatre innocents fauchés par un camionneur imprudent en 2019. Leurs proches leur ont rendu hommage jeudi dans le cadre de leurs observations sur la peine de Jagmeet Grewal.
L’émotion était à son comble jeudi au palais de justice de Laval. Toute la matinée, des témoins sont venus à la barre pour livrer des témoignages extrêmement émouvants. Il est difficile de rester indifférent à leurs souffrances. Sur le banc des accusés, Jagmeet Grewal est resté impassible.
Le Montréalais de 58 ans a été reconnu coupable l’hiver dernier d’avoir causé la mort par sa négligence criminelle de Gilles Marsolais, Michèle Bernier, Sylvain Pouliot et Robert Tanguay-Laplante. Le 5 août 2019, Jagmeet Grewal a provoqué un carambolage monstre sur l’autoroute 440 à Laval. Plusieurs personnes ont également été grièvement blessées.
Au volant de son camion, Jagmeet Grewal n’a jamais freiné. Cependant, les conditions routières étaient idéales. Le chauffeur du camion aurait facilement dû apercevoir, au loin, le début d’un embouteillage. Il n’a cependant pas réagi pendant ces 10 secondes fatidiques. Son camion s’est alors transformé en un puissant projectile, provoquant un carnage sur l’autoroute.
Jagmeet Grewal n’aurait jamais dû prendre le volant. Il avait déjà été déclaré inapte à conduire un camion à vie et souffrait de limitations physiques et psychologiques importantes. De plus, il ne prenait pas correctement ses médicaments. Il représentait un danger ambulant ce jour-là.
Quatre personnes ont payé le prix ultime. Gilles Marsolais et Michèle Bernier en font partie. Triste ironie, ces deux jeunes retraités du Service de police de la ville de Montréal avaient consacré une bonne partie de leur carrière à enquêter sur des collisions.
«C’était un duo brillant. Vous ne pouviez pas les manquer. C’est totalement injuste», a témoigné Amélie Martin, la fille de Michèle Bernier.
À seulement 19 ans, elle perd sa mère. C’est du roc. Une femme qui « débordait d’amour, de douceur, d’honnêteté et de sensibilité. Depuis, le choc est incommensurable. Elle décrit les nuits blanches et la peur pétrifiante qui l’anime lorsqu’un de ses proches est en retard.
« C’est extrêmement difficile d’accepter l’idée qu’ils ne reviendront plus, alors que nous n’avons pas pu leur dire au revoir. Ils ont tout simplement disparu de nos vies », confie-t-elle, la voix brisée.
Toutes ces années, Amélie Martin espérait une chose : des excuses de la part de l’accusé. Ils ne sont jamais venus.
«J’espérais des excuses sincères… Nous n’avons jamais rien reçu. Nous nous retrouvons avec le poids de tout cela », a-t-elle déploré.
“Joyeux anniversaire, papa”
Vendredi, Gilles Marsolais aurait eu 60 ans. Sa fille, Mariane Marsolais, dresse le portrait d’un homme déterminé, ambitieux et aimant. Un homme très spirituel qui aimait les gens.
« Il est dévastateur de savoir que cet accident aurait pu être évité. Ils n’auront jamais vu leurs cinq petits-enfants ni vécu la vie de grands-parents. Mon père n’aura pas la chance de marcher dans mon allée à mon mariage. J’essaie toujours de garder la tête haute, mais cela reste très difficile», a témoigné Mariane Marsolais.
“Joyeux anniversaire, papa”, a-t-elle conclu.
Son frère, Nicolas Marsolais, s’est dit « dévasté » par le décès de son père. «C’est absurde», murmure-t-il. Son père, un colosse, s’est brisé ainsi. « Ils n’auront jamais la chance d’être grands-parents, ils avaient tellement hâte de le devenir. Ce privilège leur aura été brutalement retiré», a-t-il déclaré, ému.
“Joyeux anniversaire, papa”, ajouta-t-il à son tour.
À 26 ans, Robert Tanguay-Laplante avait toute la vie devant lui. Mécanicien d’équipement lourd, il rêvait de travailler sur des hélicoptères. Il venait d’acheter une voiture.
Mais son « avenir s’est arrêté ». Si brusquement.
« Robert était un jeune homme qui commençait tout juste sa vie, il n’avait que 26 ans. Il avait beaucoup d’idées. C’était un travailleur acharné qui avait un brillant avenir devant lui. Aujourd’hui, Robert n’est plus parmi nous. Mais notre Robert restera à jamais dans le cœur de cette famille et dans nos pensées pour le reste de notre vie», a témoigné son père en lisant une lettre signée par toute la famille Laplante.
Deux jours d’audience sont prévus devant le juge Yanick Laramée pour des observations sur la sentence. On peut s’attendre à ce que la Couronne demande une peine de détention « sévère ».
Libre tout au long du processus judiciaire, Jagmeet Grewal a récemment perdu sa liberté parce qu’il n’avait pas respecté ses conditions de libération.
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