L’assassinat du professeur d’histoire-géographie a choqué la France. Le 16 octobre 2020, Samuel Paty est poignardé et décapité près de son collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) pour avoir enseigné la liberté d’expression. Quatre ans plus tard, s’ouvre ce lundi à Paris le procès de huit prévenus pour leur implication présumée dans la campagne d’intimidation et de haine précédant le crime ou pour l’aide qu’ils auraient apportée au terroriste Abdoullakh Anzorov, tué par la police. peu de temps après son acte.
Ce réfugié russe de 18 ans, d’origine tchétchène, « enraciné dans la violence […]s’était fortement radicalisée à l’été 2020″, soulignent dans leur ordonnance les juges d’instruction, rappelant « niveau de menace terroriste très élevé » durant cette période : le « procès des attentats de janvier 2015 » a débuté en septembre et une attaque a eu lieu devant les anciens locaux de Charlie-Hebdo qui avait réédité les caricatures de Mahomet.
Abdoullakh Anzorov a reproché à Samuel Paty de l’avoir montré en classe, lors d’un exercice de réflexion en Education morale et civique. « Fils mobile », précisent les juges, est-ce que « vengeance pour une offense qu’il considérait comme ayant été faite à son Prophète ». Le jeune radicalisé avait en effet repéré l’enseignant désigné sur les réseaux sociaux les jours précédents.
Une campagne de cyberharcèlement née d’un mensonge
Samuel Paty avait alors été la cible d’une campagne de cyberharcèlement suite au mensonge d’un étudiant de 13 ans. Pour cacher à ses parents qu’elle a été exclue pendant deux jours pour son indiscipline, l’écolière affirme avoir été expulsée pour avoir tenu tête au professeur qui, dit-elle, a demandé aux élèves musulmans de quitter la classe avant de projeter un dessin du prophète nu. . Elle n’a pas effectivement assisté au cours, mais sa version est relayée par des adultes sans scrupules, suscitant la polémique avec des vidéos dans lesquelles ils décrivent l’enseignante comme “voyou” et exiger son licenciement.
Une spirale qui a conduit à “meurtre” par Samuel Paty selon les mots du parquet national antiterroriste. La jeune fille et cinq autres ex-collégiens qui avaient guidé le jihadiste vers sa victime contre rémunération ont été condamnés fin 2023 par le tribunal pour enfants à des peines allant de 14 mois d’emprisonnement avec sursis à deux ans dont six mois. Huit majeurs, dont une femme, comparaîtront devant la cour d’assises spéciale de Paris.
Deux amis du terroriste jugés pour « complicité » risquent la prison à vie
Les juges d’instruction ont retenu le délit le plus lourd de « complicité d’assassinat terroriste », passible de la réclusion à perpétuité, pour deux amis d’Abdoullakh Anzorov : Azim Epsirkhanov, un Tchétchène de 23 ans et Naïm Boudaoud, un Français de 22 ans. années. La veille de l’attentat, ils avaient accompagné le jihadiste à Rouen pour acheter un couteau trouvé à proximité de la scène du crime. Boudaoud, qui l’a transporté le jour des faits à Conflans-Sainte-Honorine, était également avec lui pour l’achat, juste avant à Cergy (Val-d’Oise), de deux pistolets Airsoft.
Pour les juges antiterroristes, les deux accusés connaissaient la radicalisation d’Anzorov et “étaient conscients de ses intentions criminelles”. Ce qu’ils réfutent. Affirmant qu’il n’avait jamais évoqué la polémique autour de la présentation des caricatures et qu’il avait justifié l’achat du couteau “pour le donner à son grand-père”. Boudaoud a d’ailleurs toujours nié connaître les destinations vers lesquelles il conduisait son ami le 16 octobre.
Chnina et Sefrioui « l’ont sciemment désigné comme cible potentielle » du parquet
Le père de l’écolière qui a menti, Brahim Chnina, 52 ans, et le militant islamiste Abdelhakim Sefrioui, 65 ans, seront jugés pour « association de malfaiteurs terroriste ». Ils risquent jusqu’à 30 ans de prison. Les deux hommes, en détention provisoire depuis quatre ans, ont relayé, selon le parquet, la version de l’adolescent sur les réseaux sociaux, stigmatisant le professeur et déclenchant une vague de haine à son encontre. Ce faisant, elle croit qu’ils « l’a sciemment désigné comme cible potentielle d’une action terroriste ».
Au cours de l’enquête, Chnina a contesté toute incitation “tuer” dans ses messages et vidéos, assurant également qu’il n’avait aucune connaissance du projet meurtrier d’Anzorov, avec qui il avait eu des discussions. Il a réitéré que son objectif était “pour obtenir une sanction administrative contre l’enseignant”. A l’image de Sefrioui, dont la défense insiste sur le fait qu’il n’a eu aucun contact avec l’agresseur et qu’il n’existe aucune preuve que ce dernier ait vu la vidéo postée par leur client cinq jours avant l’attaque.
Une femme parmi les accusés, déjà citée dans d’autres procédures
Le tribunal va également juger trois personnes ayant appartenu à des groupes Snapchat tournant autour d’Abdoullakh Anzorov. Le Turc Yusuf Cinar, le Russe d’origine tchétchène Ismaïl Gamaev et le Réunionnais Louqmane Ingar, tous âgés de 22 ans selon l’accusation, ont échangé avec lui des messages à contenu jihadiste. La seule femme parmi les accusés, Priscilla Mangel, 36 ans, connue pour appartenir à la mouvance islamiste radicale, est accusée d’avoir “confortable” Anzorov dans son projet, même si elle n’en connaissait pas la nature exacte, selon les magistrats antiterroristes.
Le procès, prévu jusqu’au 19 décembre, sera aussi l’occasion d’évoquer Samuel Paty, un homme « seul, effrayé, aux abois », qui se promenait avec un marteau dans son sac parce qu’il se savait menacé. Sa famille “exige une réponse judiciaire à la hauteur de ce qui s’est passé”, précise son avocate, Me Virginie Le Roy.
Le planning prévisionnel de l’audience
Selon le calendrier provisoire, l’audience s’ouvrira cette semaine avec l’interrogatoire de la personnalité des huit accusés, ainsi que par une présentation générale de l’enquête, les auditions des experts et le début des auditions des parties civiles. (jusqu’au 13 novembre).
S’en suivra la présentation du parcours du terroriste Abdoullakh Anzorov et des charges retenues contre Azim Epsirkhanov et Naïm Boudaoud, avant leurs interrogatoires prévus les 20 et 21 novembre. La semaine suivante sera consacrée à l’examen du parcours et des procédures contre Brahim Chnina. et Abdelhakim Sefrioui, qui doivent être interrogés les 2 et 3 décembre.
Lors des audiences suivantes et jusqu’au 12 décembre, la cour d’assises spéciale doit se concentrer sur le parcours des quatre autres accusés, qui seront également interrogés sur les faits qui leur sont reprochés. La mise en examen du ministère public est prévue lundi 16 décembre. Les plaidoiries de la défense suivront. Le dernier mot sera donné aux prévenus jeudi 19 décembre, avant que le tribunal ne se retire pour délibérer.
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