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Under influences | Marie-Andrée Labbé: from Chambres en ville to STAT

Les artistes sont aussi la somme des œuvres qui les ont façonnés. Marie-Andrée Labbé, scénariste du grand succès télé STATUT à Radio-Canada (1,5 million de téléspectateurs quotidiennement), parle de ceux qui l’ont marquée à notre chroniqueur Marc Cassivi, dans le cadre de notre rubrique Sous influences.


Publié à 1h45

Mis à jour à 7h00

Marc Cassivi : Je pourrais commencer par vous parler de votre amour pour Céline Dion, mais je sais aussi que vous aimez la télé…

Marie-Andrée Labbé : C’est à l’adolescence que les choses ont vraiment déclic pour Céline Dion. Enfant, je regardais beaucoup la télévision. Ma mère était très admirative. Je ne peux pas dire qu’il y a Pass-Partout Dans STATUTmais quelque part, probablement ! (Rires) Pass-Partoutc’est probablement ma première influence, avec Le village de Nathaliedont j’étais un grand fan. Je me suis abonné au fanzine et je l’ai toujours ! Je ne vivais que pour ça. Je me suis déguisé en Mademoiselle Un bric-à-brac quotidien. J’ai été Marie-Thérèse Fortin très tôt !

Vous vous êtes plongé dans un univers…

J’étais dans mon monde parallèle, attiré par un groupe de personnages. C’est ce que j’ai toujours aimé à la télévision : les différentes dynamiques entre les gens. C’est sûr que ça a influencé le scénariste que je suis aujourd’hui. Ce qui vous a rendu fou de la télévision quand vous étiez enfant, c’est que vous ne pouvez pas vous en désintoxiquer.

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PHOTO ROBERT MAILLOUX, LA PRESSE ARCHIVES

Le village de Nathalieen 1987

Vous êtes plus jeune que moi, mais pour ma génération, comme pour la vôtre, qui n’est pas non plus née avec Internet, la télévision a joué un grand rôle dans l’enfance et l’adolescence.

Je sortais avec des amis vendredi soir, je rentrais à la maison pour regarder La fureur et je suis ressorti après ! Je ne suis pas sûr de leur avoir dit… Je me sentais vraiment moins seule grâce à la télé. C’était Véronique Cloutier ou Julie Snyder qui m’accompagnaient. Je ne pense avoir raté aucun épisode de Poing J. J’ai regardé ça le matin, avant d’aller à l’école. Sans cela, je ne sais pas comment j’aurais pu m’en sortir. Je te le jure ! Je me suis couché quand j’ai entendu l’enregistreur fonctionner – j’avais une petite télé dans ma chambre avec un lecteur vidéo – et cela m’a rassuré de savoir que le lendemain matin j’allais regarder Julie Snyder.

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PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE ARCHIVES

Céline Dion and Véronique Cloutier before the show La fureur au Centre Molson en 2002

C’est de l’émotion, la télé. Je suis hypersensible et je prends cela très au sérieux. J’aime les émissions qui s’étendent. Pour moi, un film d’une heure et demie, c’est trop court ! Anatomie d’une chuteJ’aurais pris 12 épisodes ! Thelma et LouiseJ’aurais pris cinq saisons, comme Six pieds sous terrequi est une série parfaite à mon avis.

Ce que vous décrivez, j’ai l’impression que c’est aussi ce qui plaît au public de STATUT. Cela doit vous rendre heureux de transmettre cela aux autres ?

Si la petite Marie voyait ça, elle heurterait quelque chose ! Je dois beaucoup aux émissions de variétés que j’ai regardées dans ma jeunesse. Les longueurs me rendent folle, comme Julie Snyder. Je veux divertir comme elle. La culture de variétés me nourrit. Cela donne un rythme à ce que j’écris.

Dans la fiction, qu’est-ce qui vous a inspiré à la fois ?

Chambres en ville ! Quand j’ai commencé à écrire STATUTJ’ai regardé des épisodes de Chambres en ville. J’avais peur d’être influencé par la fiction d’aujourd’hui. Cela m’a ramené au genre de rebondissements qu’il faut pour tenir un public en haleine. Je n’avais jamais écrit de quotidien et je sais que j’apprends mieux en voyant. Plutôt que de me faire expliquer, j’ai regardé Chambres en ville. Le décès de Caroline (Julie Deslauriers) m’a longtemps bouleversé. C’était tellement injuste ! j’ai aussi regardé Ils le feront, Les filles de Caleb, Scoop, Jamais deux sans toi. J’étais adolescent et c’était lourd ! Je regardais ça avec ma mère.

J’ai des souvenirs d’avoir regardé Chambres en ville avec mon ancienne colocataire Marie. Est-ce qu’il a bien vieilli ? Regardez-vous cela avec indulgence aujourd’hui ?

Je pardonne toujours. L’ironie quand je regarde la télé ? C’est non. Jamais de second ordre, ce n’est pas un plaisir coupable. Si je l’aime, je l’aime. Je n’ai pas à me justifier auprès de quiconque trouve cela stupide. Quand je n’ai pas dit que je rentrais à la maison pour écouter La fureurce n’est pas parce que j’étais gêné, c’est parce que je voulais que ça reste intime. Je ne voulais pas m’expliquer.

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IMAGE FOURNIE PAR TVA, ARCHIVES DE LA PRESSE

Mitsou, Francis Reddy et Marie-Josée Croze dans Chambres en ville

C’est sûr que la télé dans les années 1990 avait un rythme différent ! Des scènes de huit minutes avec deux personnages sur un canapé, on n’en peut plus. En même temps, cela reste le même exercice. Racontez une histoire, parlez d’eux-mêmes aux gens, mais montrez-leur aussi des choses qu’ils ne connaissent pas. Il y avait ça dans Chambres en ville. Cela développe l’empathie.

C’est aussi lorsque vous étiez adolescente que Céline est entrée dans votre vie…

J’ai adoré Céline lorsqu’elle animait l’ADISQ [en 1998]. C’est l’animateur qui m’a accroché avant le chanteur. Je la connaissais déjà, mais quand je l’entendais agir, quand je sentais sa vulnérabilité, quand elle me faisait rire, elle m’avait compris. Et elle m’a achevé en chantant S’il suffisait d’aimer. J’ai regardé ce gala, en partie, au moins 200 fois ! J’ai acheté les albums, j’ai lu la bio de Georges-Hébert Germain et je suis parti en vrille. Pour moi, c’était apprendre la discipline, ce qu’il faut pour se dépasser.

Vous devez être le plus grand admirateur de Céline Dion, l’animatrice…

Ce sont plus les gens qui ont été importants pour moi que les œuvres. J’ai rencontré Tina Fey à 30 Rocher et je voulais juste voir ce qu’elle faisait. J’ai découvert Anne-Marie Cadieux à la télé et je suis allée voir toutes les pièces qu’elle a jouées depuis mon arrivée à Montréal en provenance de L’Anse-Saint-Jean, à 17 ans. C’est une œuvre en soi, Anne-Marie Cadieux au théâtre ! Ma mère est décédée l’année dernière et je suis allée voir Anne-Marie Cadieux seule. C’est quelque chose de réconfortant pour moi, cette liberté qu’elle a, sa façon d’assumer les rôles.

Avez-vous déjà dit à Anne-Marie Cadieux à quel point elle comptait dans votre vie ?

Non, jamais. Mais Julie Snyder, oui. J’ai besoin d’admirer les gens. C’est un poste que j’aime; cela n’implique pas. La seule autre personne à qui j’ai dit que j’aime ce qu’elle fait est Sylvie Moreau. J’étais vraiment cool dans la sitcom Catherine. J’ai enregistré toutes les émissions sur cassettes VHS. Grâce à elle, j’ai découvert Post-mortem [de Louis Bélanger] au cinéma.






Je l’ai rencontrée lors d’une fête et je l’ai remerciée. Nous avons discuté et je suis devenu son locataire ! De 19 à 25 ans, j’habitais au dessus de la maison de Sylvie Moreau. Et grâce à elle, j’ai découvert Marcel Proust, qui a changé ma vie. Ça me fait rire que ce soit grâce à la sitcom Catherine que j’ai découvert A la recherche du temps perdu ! Pour moi, c’est complètement lié. Un groupe de personnages dont on découvre la dynamique et les émotions. J’y reviens souvent. Pour moi qui aime les œuvres qui n’en finissent pas, je suis gâtée !

Vous parliez de la mort de votre mère, qui était une grande fan de télé et qui vous a influencé. Le fait qu’elle vous ait vu vous épanouir en tant que scénariste vous console-t-il un peu de son départ ?

Oui. Elle a vu la première saison de ÉTAT. Au village, à la maison, on lui en parlait. Elle n’a pas quitté l’épicerie avant une heure ! Tant que je vais le faire STATUTce sera toujours pour elle. Je sais que je suis tombé dans ses goûts quand j’ai fait STATUT. C’est probablement un mélange de tout ce que nous avons regardé ensemble. Elle était exigeante, mais un bon public. Elle avait toujours des commentaires pertinents et elle me protégeait de tout. Elle n’aurait jamais fait un mauvais commentaire sur ce que je fais, mais elle m’a moins parlé de Sans rendez-vous de quoi STATUTdisons-le !

Quand j’écris des intrigues qui peuvent déplaire, quand l’histoire m’amène à écorcher ou à vexer les gens, je me dis que ma mère sera épargnée. Au moins, je ne lui ferai pas de mal. Avec STATUTil sera toujours là.

La troisième saison de STATUT est présenté du lundi au jeudi à 19h sur ICI Télé.

 
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