Bruno Retailleau dénonce une relation « asymétrique » où l’Algérie « offense la »

Bruno Retailleau dénonce une relation « asymétrique » où l’Algérie « offense la »
Bruno Retailleau dénonce une relation « asymétrique » où l’Algérie « offense la France »

Selon M. Retailleau, la crise entre Alger et Paris a pris une nouvelle dimension avec la reconnaissance par la de la souveraineté marocaine sur le Sahara en juillet 2024, mais il estime que ce rebondissement n’est qu’un épisode parmi d’autres. .

Dans une longue interview exclusive accordée à l’hebdomadaire français L’Expressle ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a condamné l’attitude “de plus en plus agressif” de l’Algérie vers la France. Il a dénoncé une relation déséquilibrée et appelé à une réponse ferme à ce qu’il considère comme un manque de respect récurrent de la part d’Alger. Le ministre, qui n’hésite pas à qualifier cette situation de « crise des perles »a également abordé des sujets sensibles tels que les expulsions bloquées, le cas de l’écrivain Boualem Sansal et la politique migratoire entre les deux pays.

Une main tendue ignorée par Alger

Pour Bruno Retailleau, la détérioration des relations entre les deux pays s’explique par un déséquilibre persistant dans les échanges diplomatiques malgré les efforts déployés par la France pour apaiser les tensions. «Depuis des années, le président de la République tend la main à l’Algérie pour réconcilier les mémoires. Force est de constater que les efforts de la France n’ont pas été très appréciés en retour.»il a regretté. Il a poursuivi en évoquant les épisodes récents qui ont marqué cette crise bilatérale : «Lorsque le président Macron a parlé de ‘loyer commémoratif’, l’ambassadeur d’Algérie en France a été rappelé. Il est interdit à nos avions militaires opérant au Sahel de survoler l’espace aérien algérien. Puis, début 2023, l’opposante Amira Bouraoui se réfugie en France. L’ambassadeur fut de nouveau rappelé. À mesure que nous tendons la main, l’Algérie (ou du moins ceux qui veulent saper nos relations bilatérales) devient de plus en plus agressive.»

Selon lui, cette crise a pris une nouvelle dimension avec la reconnaissance par la France de la souveraineté marocaine sur le Sahara, mais il estime que cette évolution n’est qu’un épisode parmi d’autres : « Nous vivons une crise provoquée par cette reconnaissance, mais la crise a commencé bien avant. C’est une crise récurrente, une crise des perles.»

Un discours mémoriel pour rééquilibrer

M. Retailleau a pointé le rôle du discours mémoriel dans la détérioration des relations, estimant que la France s’est affaiblie en adoptant une posture trop culpabilisante vis-à-vis de son passé colonial. « À force de se discréditer, la France a elle-même donné les raisons de ne pas être respectée »dit-il. Le ministre a cité Albert Camus pour illustrer son propos : « Il est dangereux de demander à une nation d’admettre qu’elle est la seule coupable et de la vouer à une pénitence perpétuelle. » Selon lui, cette histoire de « repentance perpétuelle » atteint la fierté française : « Nous avons proposé une histoire culpabilisante, le repentir, qui a fini par toucher cette fierté française. Nous devons le reconstruire. Les Français l’exigent et la France le mérite.

Il a également remis en question les initiatives anti-françaises en Algérie, notamment la réintroduction en 2023 de vers anti-français dans l’hymne national algérien et l’effacement progressif de la langue française dans le système éducatif algérien. « J’observe que depuis 2023, le fameux vers anti-français est à nouveau d’actualité dans l’hymne national algérien. J’observe que depuis 2023, nous menons la guerre à l’enseignement de la langue française dans les écoles primaires en faveur de l’anglais”il a expliqué.

La crise des expulsions et les accords de 1994

Le ministre de l’Intérieur a également évoqué les blocages récurrents dans la mise en œuvre des expulsions vers l’Algérie, accusant Alger de ne pas respecter les accords bilatéraux signés en 1994. « Lorsque, comme dans ce cas, nous expulsons des personnes identifiées et munies de passeports, le pays d’origine est systématiquement informé via des listes de passagers. Aucun laissez-passer consulaire n’est nécessaire puisque la nationalité de l’individu est certaine. La seule et unique règle est que le pays d’origine doit accueillir son ressortissant. Un point, c’est tout”il a insisté.

M. Retailleau a désavoué le refus algérien d’accueillir ses propres ressortissants expulsés malgré les documents valides fournis par la France : “L’Algérie n’a respecté ni le droit international ni notre protocole bilatéral de 1994.” Il a également dénoncé le soutien au régime algérien sur le sol français : « Sur notre sol, les partisans du gouvernement algérien ont franchi la ligne rouge. Je ne lâcherai rien. Internet n’est pas une zone de non-droit. Chaque fois que nous avons eu connaissance de ces franchissements de la ligne rouge, nous avons contacté la plateforme Pharos et interrogé les personnes concernées.

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L’affaire Boualem Sansal : une priorité discrète

M. Retailleau a exprimé son indignation face à la détention arbitraire de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, qui se poursuit depuis novembre 2024. « Boualem Sansal est une personne âgée, malade, injustement arrêtée et scandaleusement détenue par le régime algérien. C’est inacceptable. C’est un de nos compatriotes, un ami, mais surtout un grand écrivain français. Tout en soulignant l’importance de la discrétion pour des raisons d’efficacité, il a salué l’initiative de François-Xavier Bellamy et du PPE au Parlement européen de voter une résolution condamnant ces pratiques et conditionnant la signature d’accords commerciaux avec l’Algérie au respect du droit international.

Reprendre le contrôle des migrations et renforcer l’assimilation

Le ministre a enfin abordé la question migratoire, plaidant pour une réduction des flux et un renforcement de l’assimilation. « Aujourd’hui, 70 % des Français souhaitent qu’on mette un terme à l’immigration incontrôlée »a-t-il déclaré, appelant à une politique plus restrictive : « La France est le pays d’Europe qui accorde le plus de visas : 2,4 millions en 2024, tandis que l’Allemagne en a accordé 1,5 million. L’histoire particulière et les liens que nous entretenons avec le Maghreb ne suffisent pas à justifier ces chiffres.» Selon lui, l’intégration est entravée par un discours national humiliant : « Pour réussir l’assimilation, nous devons cesser de présenter notre histoire de manière larmoyante et pénitentielle. La France ne s’aime pas assez pour se poser en modèle. Nous devons retrouver une vision équilibrée de la période coloniale.»

Pour M. Retailleau, il est urgent de repenser la relation franco-algérienne sur de nouvelles bases : « Le peuple algérien est un grand peuple. Les Français aussi. Mais aucune douleur de l’Histoire ne peut donner à quiconque le droit d’offenser la France. De nombreux Français se sentent blessés. Les choses ne peuvent pas rester ainsi. »

Laïcité et Islam : un équilibre à défendre

Le ministre souligne une tension croissante entre une partie de l’islam politique et les principes de la laïcité française. Il prétend que “notre laïcité est mise à l’épreuve” par la radicalisation à l’échelle mondiale, qu’il qualifie de “danger” susceptibles d’être importés sur le territoire national. M. Retailleau souligne la différence fondamentale entre les notions d’intégration et d’assimilation. Selon lui, l’assimilation, plus restrictive, implique une pleine adhésion aux valeurs républicaines comme l’égalité entre les hommes et les femmes, la liberté de conscience et la fraternité.

Il explique que l’assimilation n’est pas seulement un “promesse” mais aussi une exigence qui s’inscrit dans le cadre juridique français, citant explicitement le Code civil : “Le terme ‘assimilation’ apparaît encore dans notre Code civil.” Pour M. Retailleau, l’intégration se heurte à un refus de certains « nouveaux arrivants » pour s’adapter aux coutumes françaises. Il appelle au strict respect des valeurs républicaines, insistant sur la réciprocité entre hospitalité et adaptation des nouveaux arrivants : « Ce n’est pas aux Français d’adapter leurs mœurs. […] C’est à eux de s’adapter.

Dialogue avec l’Islam en France

Interrogé sur les reproches du recteur de la Grande Mosquée de Paris, M. Retailleau rejette toute responsabilité, expliquant que ce dernier n’a pas demandé de rendez-vous. Il se dit cependant ouvert au dialogue et annonce la prochaine réunion du Forum de l’Islam de France (Forif). M. Retailleau prône une stricte fidélité aux valeurs républicaines, qu’il estime menacées par certaines formes de radicalisation et par les refus d’intégration. En même temps, il est ouvert au dialogue avec les religions, sous réserve d’une volonté réciproque de collaboration et rejette la politisation religieuse de la Grande Mosquée de Paris par l’Algérie.

 
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