Pourquoi la déclaration du président français met l’Afrique en colère

Pourquoi la déclaration du président français met l’Afrique en colère
Pourquoi la déclaration du président français met l’Afrique en colère

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Légende de l’image, Les derniers militaires français embarquent à bord d’un avion militaire français pour quitter définitivement le Niger, sur la base française qui a été remise à l’armée nigérienne, à Niamey, le 22 décembre 2023.
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La déclaration d’Emmanuel Macron prononcée à l’occasion de la Conférence annuelle des ambassadeurs de a suscité diverses réactions sur le continent.

Alors qu’il y avait autrefois neuf pays africains qui accueillaient des bases militaires françaises sur le continent, il n’y en aura plus que deux, le Gabon et Djibouti, dans un avenir proche.

En effet, après le départ des forces françaises de Centrafrique, du Mali, du Burkina Faso et du Niger, le Tchad et le Sénégal ont annoncé, en novembre dernier, leur volonté de les faire quitter leur pays.

Ils seront suivis, dans cet élan de souveraineté généralisé, par la Côte d’Ivoire, qui exprime également, le 31 décembre 2024, son souhait de briser les rangs des militaires français sur son territoire.

C’est dans cette atmosphère de « brouillard » politico-diplomatique que le président français Emmanuel Macron s’est prononcé pour redorer l’image de la puissance coloniale. Mais qu’a-t-il dit pour provoquer autant de réactions en Afrique ?

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“Je pense que nous avons oublié de dire merci”

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Légende de l’image, Les propos du président français ont suscité de nombreuses réactions en Afrique.

Une nouvelle fois, la communication du président français sur un sujet qui lie son pays à l’Afrique a une nouvelle fois suscité la polémique.

S’exprimant à l’occasion de la 30e Conférence des ambassadeurs de France qui s’est tenue à Paris lundi 6 et mardi 7 janvier 2024, Emmanuel Macron réfute l’idée selon laquelle l’armée française aurait été contrainte de se retirer de plusieurs pays africains.

« Nous sommes partis parce qu’il y a eu des coups d’État, parce que nous étions là, à la demande d’États souverains. À partir du moment où il y a eu des coups d’État, où l’on a dit que « notre priorité n’est plus la lutte contre le terrorisme », la France n’y avait plus sa place », a souligné le chef de l’État français.

« Et puis, nous avons décidé, c’est la deuxième partie, de réorganiser notre présence militaire. Nous avons donc proposé aux chefs d’État africains de réorganiser notre présence. Comme nous sommes très polis, nous leur avons laissé la primauté de l’annonce”, a précisé Emmanuel Macron.

« Mais ne vous y trompez pas. Parfois, nous avons dû les pousser. Mais ce n’est pas parce que nous sommes polis, corrects et que nous nous réorganisons qu’il faut nous retourner la situation en disant : ‘ils sont chassés d’Afrique’ », a-t-il insisté.

“Nous avons choisi de bouger, parce qu’il fallait bouger”, a expliqué Macron au début de son discours pour rappeler l’engagement de la France en Afrique dans la lutte contre le terrorisme depuis 2013.

«Je pense que nous avons oublié de dire ‘merci’. Ce n’est pas grave, cela viendra avec le temps. L’ingratitude, je suis bien placé pour le savoir, est une maladie non transmissible. homme. Mais je le dis pour tous les dirigeants africains qui n’ont pas eu le courage de soutenir leur opinion publique. Aucun d’entre eux ne serait aujourd’hui à la tête d’un pays souverain. si l’armée française ne s’était pas déployée dans cette région», a réitéré le président français.

Ces propos du président Macron ont suscité de vives réactions au Sénégal et au Tchad.

Vives réactions au Sénégal et au Tchad

Ousmane Sonko, le Premier ministre du Sénégal.

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Légende de l’image, Ousmane Sonko, le Premier ministre du Sénégal.

Au Sénégal, la réaction du Premier ministre Ousmane Sonko ne s’est pas fait attendre.

« Le président Emmanuel Macron a affirmé aujourd’hui que le départ annoncé des bases françaises aurait été négocié entre les pays africains qui l’ont décrété et la France. Il poursuit en estimant que c’est par simple commodité et politesse que la France a accordé la première annonce à ces pays africains. Je voudrais dire que, dans le cas du Sénégal, cette affirmation est totalement erronée», a écrit lundi le chef du gouvernement sénégalais sur sa page Facebook.

Selon lui, “aucune discussion ni négociation n’a eu lieu à ce jour et la décision prise par le Sénégal découle de sa seule volonté, en tant que pays libre, indépendant et souverain”.

» Il déclare enfin ‘qu’aucun pays africain ne serait aujourd’hui souverain si la France ne s’était pas déployée’. Notons que la France n’a ni la capacité ni la légitimité pour assurer la sécurité et la souveraineté de l’Afrique », a expliqué Ousmane Sonko.

« Bien au contraire, elle a souvent contribué à déstabiliser certains pays africains comme la Libye, avec des conséquences désastreuses constatées pour la stabilité et la sécurité du Sahel », poursuit-il.

“C’est enfin le lieu de rappeler au président Macron que si des soldats africains, parfois mobilisés par la force, maltraités puis finalement trahis, ne s’étaient pas déployés pendant la Seconde Guerre mondiale pour défendre la France, elle serait, peut-être, encore allemande aujourd’hui”, a expliqué Ousmane Sonko.

A N’djamena, le gouvernement tchadien a également réagi par un communiqué signé par son ministre des Affaires étrangères, Abderaman Koulamallah.

“Le gouvernement de la République du Tchad exprime sa profonde préoccupation suite aux propos tenus récemment par le Président de la République française, Emmanuel Macron, qui traduisent une attitude méprisante à l’égard de l’Afrique et des Africains”, a-t-il déclaré. a-t-il souligné tout en invitant les dirigeants français à « apprendre à respecter les peuples africains et (à) reconnaître la valeur de leurs sacrifices ».

« L’Histoire atteste que l’Afrique, y compris le Tchad, a joué un rôle déterminant dans la libération de la France lors des deux guerres mondiales, un fait que la France n’a jamais véritablement reconnu. Les immenses sacrifices consentis par les soldats africains pour défendre la liberté ont été minimisés et aucun remerciement approprié n’a été exprimé », a-t-il déclaré.

« Concernant le Tchad, il faut souligner que la construction de notre armée n’est pas l’œuvre de la France. Notre armée, forte et résiliente, est le fruit de la bravoure du peuple tchadien et des sacrifices consentis avec « des moyens modestes ». La France n’a jamais fourni de manière significative l’armée tchadienne ni contribué à son développement structurel », poursuit le chef de la diplomatie tchadienne.

« En 60 ans de présence, marqués par des guerres civiles, des rébellions et une instabilité politique prolongée, la contribution française s’est souvent limitée à ses propres intérêts stratégiques, sans réel impact durable sur le développement du peuple tchadien », rappelle-t-il. .

« Au lieu d’attaquer l’Afrique, le président Macron devrait concentrer ses efforts sur la résolution des problèmes qui préoccupent les Français », conseille-t-il.

Abderaman Koulamallah a insisté sur l’aspiration du peuple tchadien « à une souveraineté pleine et entière, à une véritable indépendance et à la construction d’un Etat fort et autonome, acquis au prix d’inestimables sacrifices » et a invité la France et ses autres partenaires « à intégrer cette aspiration légitime dans leur approche des relations avec l’Afrique ».

Que comprendre du style de communication « décomplexé » de Macron ?

Le président français Emmanuel Macron assiste à un dîner de Noël avec des soldats français préparé par les chefs de la présidence française à la base aérienne 188

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Légende de l’image, Le président français Emmanuel Macron assiste à un dîner de Noël avec des soldats français préparé par les chefs de la présidence française à la base aérienne 188 « Colonel Massart » à Djibouti, le 20 décembre 2024.

Interrogé sur la stratégie de communication du président français qui fait polémique, le journaliste Assane Samb, spécialisé dans l’analyse du discours politique, (pense) « que la France commet de graves erreurs ».

« Ce n’est pas la première fois, et cela va bien sûr radicaliser davantage les dirigeants africains », a noté l’analyste politique.

“Je pense que Macron essaie de rattraper les erreurs commises dans les relations entre la France et l’Afrique.”

Selon lui, « il essaie en fait de se rattraper, vraiment, en essayant encore de tirer les choses à son avantage ».

“Il s’adresse en réalité à l’opinion française et à l’opinion européenne pour leur faire savoir qu’ils ont la situation sous contrôle, que ce qui arrive est dû au fait qu’ils [les Français] je le voulais. Qu’ils contrôlent toujours les rênes des relations entre l’Afrique et la France ; mais la réalité est toute autre », explique Assane Samb, qui estime que les Français « ont déjà perdu le contrôle depuis longtemps ».

« Il est clair que la France n’a pas beaucoup de contrôle sur ces relations. Et c’est justement ce qui a beaucoup perturbé et embarrassé Macron au point qu’il a fait une sortie si maladroite qui, on le soulignera aussi, aura aussi des conséquences tout aussi négatives dans les relations avec l’Afrique », a-t-il déclaré, au vu « des réactions en série » constaté au Sénégal, au Tchad, mais aussi certainement dans d’autres pays dans les jours à venir ».

Quelles pourraient être les conséquences de la déclaration de Macron sur les relations France-Afrique ?

Le président français Emmanuel Macron accueille des dizaines de dirigeants de pays francophones pour un sommet qui, espère-t-il, contribuera à renforcer l'influence de la France dans un monde en proie aux crises, notamment en Afrique, le 4 octobre 2024.

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Légende de l’image, Le président français Emmanuel Macron accueille des dizaines de dirigeants de pays francophones pour un sommet qui, espère-t-il, contribuera à renforcer l’influence de la France dans un monde en proie aux crises, notamment en Afrique, le 4 octobre 2024. (Illustration)

Assane Samb estime que cette dernière sortie de Macron pourrait avoir des conséquences négatives dans les relations France-Afrique.

“Et force est de constater que ce à quoi nous allons assister, c’est une radicalisation et la France va encore perdre du terrain”, argumente Samb.

“La Russie est là, la Chine, ces pays sont là et sont prêts à coopérer d’une autre manière et de manière beaucoup plus souple avec des moyens beaucoup plus conséquents”, poursuit-il.

Selon l’analyste politique, la France-Afrique s’essouffle.

Il souligne cependant qu’il ne pense pas qu’il y ait une « rupture totale », comme celle opérée par les États AES.

« Je ne pense pas que d’autres États suivront, notamment ceux de la CEDEAO. Absolument pas. Pour beaucoup de ces États, la France restera un partenaire stratégique. Il existe de nombreux liens historiques et culturels à tous les niveaux », rappelle-t-il.

« Sur le plan économique également, nous ne sommes pas prêts de rompre. La France est une grande puissance économique et technologique. Nous avons besoin de transferts de technologies », poursuit Assane Samb.

 
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