Si les vols commerciaux sont impossibles depuis Petite-Terre, les rapatriements vers la Réunion et la France se poursuivent. Sur place, c’est la cohue entre ceux de « la liste » et ceux venus tenter leur chance. La population mahoraise s’estime victime de discrimination.
À Petite-Terre, l’aéroport Marcel-Henry est toujours fermé et les vols commerciaux sont suspendus depuis le passage du cyclone Chido. Cependant, il y a une cohue à l’entrée. Les rapatriements ont commencé depuis plusieurs jours et un nombre important de Mahorais se sentent victimes d’une politique de «deux poids, deux mesures »…
Ce qui a changé, c’est la procédure communiquée par la préfecture de Mayotte le week-end dernier. Pour quitter l’île sinistrée, les candidats au départ doivent répondre à un certain nombre de critères et constituer leur dossier qui sera envoyé par email.
Parmi ces critères de priorisation, l’état de leur logement, la situation sanitaire et médicale ou encore la situation familiale. Les étrangers (régulièrement présents) et les non-résidents sont également prioritaires afin de libérer des places d’hôtel pour des renforts, expliquent les autorités. Mais aussi les proches des personnels gérant la crise (policiers, gendarmes, militaires).
Il n’en demeure pas moins que les premières images de ces rapatriements, concernant donc des responsables de l’État, et partagées notamment par l’influenceuse Sally sur les réseaux sociaux, ont choqué une grande partie de la population locale se sentant lésée.
Lors de son discours controversé à Pamandzi, le président Emmanuel Macron a peut-être appelé au respect de tous, assurant que les services de l’État ne faisaient pas de distinctions. Ce sentiment de discrimination est toujours là. “Tout le monde se bat, quelle que soit la couleur de la peau ! Ne montez pas les gens les uns contre les autres !a insisté le chef de l’Etat.
Le sujet reste d’actualité puisqu’il faut désormais être sur la « liste » de la préfecture pour pouvoir quitter l’île. Rencontre à l’aéroport avec cette jeune Mahoraise qui n’habite pas à Mayotte et qui doit retourner travailler.
“J’ai fait toutes les démarches mais je n’ai toujours pas eu de réponse, alors je suis venu voir si je pouvais faire quelque chose depuis l’aéroport», dit-elle. “C’est mon deuxième jour ici pour essayer de trouver des solutions. Il y a pas mal de gens qui dorment ici, pas moi, Dieu merci« .
La jeune femme décrit un «organisation catastrophique« . “Les gens ne savent pas quand ils partent, nous ne savons même pas si nous sommes sur la liste. Il y a beaucoup de problèmes de communication. Ce n’est pas normal qu’il y ait autant de désordre« .
“Ce qui m’attristecontinue-t-elle, c’est le fait qu’on dit à ceux qui ne sont pas sur la liste qu’ils ne peuvent pas partir, alors que certains arrivent quand même à le faire en jouant sur leurs connaissances. Ce n’est pas juste pour nous tous qui n’avons pas de bras aussi longs.« .
Un constat qui peut sans doute être fait, quel que soit le pays, en situation de crise extrême. “Dans une situation comme celle-ci, tout le monde devrait être considéré de la même manière», insiste toutefois notre interlocuteur.
Anzifati est sur la liste. Son mari est policier et elle fait donc partie du contingent de proches de fonctionnaires ayant obtenu une autorisation de départ.
Elle explique avoir pris la décision de quitter l’île pour ses enfants »,car il n’est pas certain que l’école puisse reprendre normalement« .
“Nous sommes debout depuis 5h du matin, il n’y avait pas d’heure de départ précise mais finalement nous partons ce soir. Nous sommes soulagés de pouvoir partir», murmure-t-elle.
Damien est professeur de collège et il attend lui aussi son tour pour quitter Mayotte. Il a pu obtenir rapidement la confirmation de son départ de l’île en composant le numéro de crise du rectorat. “Les étapes sont assez simples à faire», explique-t-il.
Cependant, sur place, c’est un peu moins simple. “J’attends depuis ce matin et on m’explique que les listes sont mélangées entre celles du rectorat, de l’ARS, ou de la Justice et c’est la préfecture qui choisit finalement qui y va. Donc c’est indépendant de la volonté du rectorat, il faut attendre« .
Parallèlement, la préfecture de Mayotte a annoncé sur Facebook le rétablissement des liaisons maritimes entre Mayotte et l’Union des Comores (Anjouan) à compter du mercredi 25 décembre. Deux bateaux de la SGTM ont été réquisitionnés par l’Etat pour permettre ces soi-disant rapatriements.humanitaire« .
“Tous les ressortissants comoriens, sans conditions de statut et de ressources financières, pourront donc rentrer dans leur pays.», écrit la préfecture. Le premier départ aura donc lieu ce mercredi Le 25 décembre au quai du terminal maritime international (Quai Ballou) à partir de 9h00
“Les passagers ne pourront emporter avec eux qu’un seul bagage par personne.“, précise-t-on encore.