Un réseau criminel international de fraude aux cartes opérant entre l’Espagne et le Maroc a été démantelé, suite à une opération conjointe de la Garde civile espagnole et de la police municipale de Bilbao. Nommé « Danie », cette opération a conduit à l’arrestation de quatre individus et à l’ouverture d’enquêtes contre sept autres membres présumés du réseau. Les investigations ont révélé des fraudes dépassant les 90 000 euros, essentiellement axées sur le détournement de données bancaires et le commerce illégal de produits électroniques de haute technologie.
Tout a commencé en novembre 2023, lorsqu’un distributeur de téléphonie mobile situé à Valence a alerté les autorités après avoir remarqué sur son site en ligne des commandes suspectes, d’un montant total de 9 490 euros. Une plainte a été déposée et l’enquête qui a suivi a révélé une fraude complexe et organisée. Le réseau criminel a utilisé des données de cartes de crédit volées à des résidents de pays européens comme le Danemark, l’Allemagne et la Norvège. Le processus utilisé, connu sous le nom de carding, consiste à voler les informations de carte de crédit et à tester leur validité sur des achats de faible valeur avant de procéder à des transactions plus importantes.
Les fraudeurs ciblaient spécifiquement les téléphones mobiles haut de gamme, des appareils qui, en raison de leur forte demande et de leur capacité à conserver leur valeur, sont populaires sur le marché parallèle. Les produits achetés frauduleusement étaient principalement des appareils électroniques coûteux, qu’ils transportaient ensuite au Maroc pour les revendre.
L’une des révélations les plus frappantes de cette enquête a été le lien avec le Maroc. En effet, lors de l’examen des téléphones portables obtenus frauduleusement, les enquêteurs ont constaté que certains étaient utilisés avec des cartes SIM marocaines, ce qui permettait de tracer une partie des produits jusqu’à leur destination finale. La découverte de ces connexions a permis aux forces de l’ordre de confirmer que les téléphones n’ont jamais été activés en Espagne, mais transportés clandestinement au Maroc où ils ont été vendus au marché noir.
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L’opération « Dania » a été menée avec rigueur, notamment à travers plusieurs perquisitions dans les villes espagnoles de Bilbao et Durango, où les suspects avaient installé plusieurs points de récupération d’objets achetés illégalement. Quatre perquisitions ont permis de saisir au total 48 téléphones portables soupçonnés d’avoir été achetés avec des cartes de crédit volées, ainsi que divers appareils électroniques, des documents d’identité et plus de 5 800 euros en espèces. Parmi les objets saisis figuraient également deux passeports marocains, preuve supplémentaire des liens du réseau avec ce pays du Maghreb.
Le rôle des établissements espagnols dans le réseau
L’enquête a également mis en lumière les rouages du réseau criminel. Les fraudeurs opéraient depuis plusieurs établissements situés à Bilbao et Durango, utilisant au moins 13 lignes téléphoniques différentes pour organiser leurs transactions. Il est apparu que certains membres du réseau résidaient dans ces locaux pour surveiller les marchandises illégales et garantir leur acheminement vers les destinations étrangères, notamment le Maroc. L’ampleur du réseau apparaît plus grande qu’initialement estimé, avec des transactions étalées sur plusieurs mois.
L’un des aspects les plus inquiétants de cette affaire est la révélation de l’exploitation des travailleurs sans papiers. Au cours de l’opération, les forces de l’ordre ont découvert deux personnes en situation irrégulière, ce qui a conduit à l’implication de l’Inspection espagnole du travail et de la sécurité sociale dans l’enquête. Cela met en évidence une autre dimension de l’organisation criminelle, celle de l’exploitation du travail dans des conditions de travail précaires.
A ce jour, les autorités espagnoles ont confirmé que le montant de la fraude liée aux 33 cartes analysées s’élevait à 56 200 euros. Ils estiment cependant que le montant total des transactions frauduleuses aurait pu dépasser 91 500 euros, certaines transactions ayant été annulées ou restituées en raison de données manquantes ou incorrectes sur les cartes utilisées. L’affaire, toujours en cours d’instruction, est sous le contrôle du Tribunal d’Instruction numéro 8 de Bilbao. L’enquête pourrait s’étendre à d’autres membres du réseau et des poursuites pour blanchiment et association de malfaiteurs sont envisagées.
Un réseau international aux ramifications étendues
Cette affaire révèle l’ampleur des réseaux criminels transnationaux qui exploitent les failles du système bancaire international et du commerce électronique. Le recours au cardage et aux transactions via des cartes volées, combiné à un système de revente de produits électroniques sur les marchés illégaux, démontre l’ingéniosité des criminels pour contourner les systèmes de contrôle. Cette affaire met également en lumière les risques liés à la sécurité des données bancaires et la nécessité d’une coopération internationale renforcée pour lutter contre ces formes de fraude transfrontalière.
Les autorités espagnoles, dans le cadre de cette opération, ont démontré une fois de plus leur capacité à démanteler des réseaux criminels complexes et à protéger les consommateurs. Toutefois, les enquêtes révèlent un défi majeur dans la lutte contre ce type de criminalité, avec des implications qui s’étendent bien au-delà des frontières espagnoles.
L’opération « Dania » démontre l’efficacité de la collaboration entre les forces de l’ordre espagnoles et les autorités locales et internationales pour endiguer un phénomène de fraude à grande échelle à la carte bancaire. Si cette affaire illustre l’adaptabilité des criminels, elle nous rappelle également l’importance d’une vigilance constante dans la protection des informations sensibles et du commerce électronique. Les autorités espagnoles, après cette saisie importante, espèrent pouvoir démanteler d’autres réseaux similaires, contribuant ainsi à endiguer le phénomène à l’échelle mondiale.