Complexe Desjardins | Baby Shark pour chasser les sans-abris

Complexe Desjardins | Baby Shark pour chasser les sans-abris
Complexe Desjardins | Baby Shark pour chasser les sans-abris

Un ver de l’oreille des enfants est maintenant utilisé pour éloigner les sans-abri d’un centre commercial du centre-ville de Montréal. Le Complexe Desjardins diffuse depuis plusieurs mois des chansons à pleins poumons, dont Bébé requinpour effrayer les sans-abri. Une technique que dénonce vivement le secteur associatif.

Ce que vous devez savoir

  • Le Complexe Desjardins diffuse des chansons pour effrayer les sans-abri.
  • Le milieu associatif voit dans cette pratique un manque de « bienveillance et d’empathie ».
  • Ce n’est pas la première fois que des mesures visant à repousser les sans-abri sont dénoncées à Montréal.

« De la musique a été installée dans certaines issues de secours du Complexe Desjardins, alors que nous avons rencontré certaines problématiques dans ces espaces », explique un porte-parole de Desjardins, Jean-Benoît Turcotti. Depuis la mise en œuvre de cette bonne solution, nous avons constaté une amélioration de la situation. »

En vigueur depuis environ un an, cette mesure est liée à « la présence de personnes sans abri » ainsi qu’à des « problèmes de flânerie », confirme M. Turcotti.

La mesure semble porter ses fruits. Ces problématiques « ont beaucoup diminué » ces derniers mois, ajoute M. Turcotti.

Au passage de La Presse, un peu plus tôt cette semaine, la populaire chanson Baby Shark jouait à plein volume lorsqu’on ouvrait la porte des escaliers d’urgence, dans les stationnements souterrains.

Ce n’est pas la première fois que des notes musicales servent à chasser les itinérants. Aux États-Unis, la Ville de West Palm Beach, en Floride, a également diffusé de la musique en boucle dans un parc pour éloigner les gens venant y passer la nuit. Là aussi, le titre Baby Shark avait d’ailleurs été utilisé.


Lisez l’article de CNN (en anglais)

Desjardins assure être « sensible à la situation des personnes en situation d’itinérance ». « C’est pour cette raison que nous avons deux travailleurs sociaux qui travaillent au Complexe Desjardins, afin d’assurer un dialogue avec ces personnes, souligne M. Turcotti. Notre volonté n’est pas d’agir dans la coercition, mais bien dans l’accompagnement de cette clientèle. »

Un dialogue à avoir ?

Pour le porte-parole du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM), Jérémie Lamarche, « cette technique doit être dénoncée fermement ». « Ça illustre une fois de plus que les gens qui habitent l’espace public se font de plus en plus repousser d’un peu partout », dit-il.

« Ça aurait été beaucoup plus judicieux de discuter avec les groupes communautaires du coin. Avec l’hiver qui s’en vient, il y a – au minimum – une certaine tolérance à appliquer, par souci de bienveillance et d’empathie », ajoute M. Lamarche.

Le porte-parole dit « comprendre les désagréments que les gens vivent de devoir côtoyer cette détresse », mais rappelle que les conditions de vie des personnes itinérantes « représentent la violence du système dans lequel on vit ».

Si on veut ne plus voir l’itinérance, il faudrait surtout s’attaquer aux causes structurelles qui la créent. Sinon, on alimente un cercle vicieux qui pousse à la précarité.

Jérémie Lamarche, porte-parole du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal

Président de la Mission Old Brewery, James Hugues est aussi de cet avis. « C’est un autre exemple de “pas dans ma cour”, en quelque sorte. Si des grandes instances et institutions agissent comme ça, ça envoie le message que c’est correct d’agir ainsi. Et ça, c’est préoccupant », dit-il.

« Les grands joueurs de notre société doivent faire mieux, insiste M. Hugues. Il y a des façons beaucoup plus humaines d’intervenir. Si on veut contribuer à s’attaquer à la crise actuelle, [on peut faire appel à] l’EMMIS [Équipe mobile de médiation et d’intervention sociale] ou aux travailleurs sociaux, par exemple. »

Des précédents

Au cours des dernières années, plusieurs autres mesures visant à refouler les sans-abri ont fait les manchettes à Montréal. En 2014, des piquets « anti-itinérants » installés devant le défunt magasin Archambault, rue Sainte-Catherine Est, avaient été retirés à la demande du maire Denis Coderre, après un tollé.

En 2020, la mairesse Valérie Plante a retiré un banc public installé au square Cabot, devant l’ancien Forum de Montréal. Le banc en question, de couleur bleue, comportait deux arches traversant toute sa longueur, empêchant quiconque – y compris les itinérants – de s’allonger dessus.

Dans le métro, le milieu a également dénoncé la Société de transport de Montréal (STM) pour avoir fermé des places isolées dans certaines stations, utilisées par des sans-abri.

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PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, LA PRESSE ARCHIVES

L’entrée du square Cabot de la station de métro Atwater est fermée pour l’hiver.

Il y a quelques semaines, le transporteur montréalais annonçait la fermeture de la station de métro Atwater située au même square Cabot, pour toute la saison hivernale. La STM a indiqué vouloir « réduire la fréquence des méfaits et des actions indésirables ou dangereuses, comme l’intimidation et la consommation de drogues ».

Situé au coin de la rue Sainte-Catherine Ouest et de l’avenue Atwater, le square Cabot est un lieu de rassemblement pour des dizaines de sans-abri et d’individus issus de clientèles vulnérables et souvent marginalisées. Plusieurs ressources d’hébergement temporaires et permanentes sont situées à proximité.

Apprendre encore plus

  • 72
    Nombre de décès parmi la population itinérante du Québec en 2023, comparativement à seulement une vingtaine par année de 2019 à 2021, selon les chiffres obtenus par La presse à la mi-octobre

    Source : Bureau du coroner

    4700
    Nombre de personnes en situation d’itinérance visible à Montréal

    Source : Rapport de recensement 2022 du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec

 
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