Les vrais problèmes de Québec solidaire

Les vrais problèmes de Québec solidaire
Les vrais problèmes de Québec solidaire

Depuis dix jours, nous analysons l’affaire Haroun Bouazzi sous tous les angles. Les propos controversés du député – et le refus de ce dernier de s’excuser auprès de tous les élus de l’Assemblée nationale – ont certainement causé beaucoup de tort à Québec solidaire.

Toutes ces controverses renforcent encore davantage la perception selon laquelle Québec solidaire se préoccupe avant tout des questions de justice sociale, alors que le parti cherche justement à briller sur d’autres questions.

Comme l’expliquait récemment un stratège en micro fermé, les médias ont spontanément tendance à se tourner vers Québec solidaire lorsqu’il s’agit de commenter un cas de racisme, ou même une problématique liée à l’identité de genre. Ce faisant, le parti renforce sa position de défenseur des groupes minoritaires.

En revanche, lorsqu’il s’agit de commenter un enjeu de santé ou d’éducation, la voix de Québec solidaire se mêle à celle des autres partis, eux aussi appelés à réagir. Le problème, c’est que les Québécois sont avant tout préoccupés par les enjeux liés à l’économie ou aux services publics, comme l’ont démontré de nombreux sondages au cours des dernières années.

Rien de très surprenant ici. Aux États-Unis, de nombreux analystes attribuent la défaite du Parti démocrate au fait que ses représentants se sont davantage intéressés aux questions d’égalité sociale qu’aux problèmes économiques au cours de la dernière décennie.

Aux États-Unis, de nombreux analystes attribuent la défaite du Parti démocrate au fait que ses représentants se sont davantage intéressés aux questions d’égalité sociale qu’aux questions économiques au cours de la dernière décennie. (Photo d’archives)

Photo : Associated Press / J. Scott Applewhite

Priorités des membres

Ce qui est peut-être plus surprenant, c’est que les membres de Québec solidaire eux-mêmes semblent plus préoccupés par les enjeux matériels que par les enjeux auxquels ils sont spontanément associés dans les médias.

Lorsque nous interrogeons nos membres, nos sympathisants, avec nos outils internes, ce qui ressort avant tout est la question du coût de la vie et des services. La question de la lutte contre le racisme, par exemple, arrive bien plus loin dans la liste.explique une Source.

Même la question de l’environnement, bien qu’au centre des deux dernières campagnes électorales de Québec Solidaire, ne semble plus avoir le même attrait qu’avant, du moins auprès des jeunes. Il est vrai que la lutte contre le changement climatique est plus facile à supporter lorsqu’on est bien logé que lorsqu’on peine à subvenir à ses besoins fondamentaux.

Cela ne veut pas dire que ces questions ne sont pas importantes pour les défenseurs de l’éducation politique ; seulement que leur véritable niveau d’inquiétude ne correspond pas forcément à l’image que l’on s’en fait. À cet égard, une autre distinction s’impose : celle entre membres du parti et délégués.

S’il faut être adhérent pour être choisi comme délégué à un conseil national ou à un congrès du parti, ceux qui participent à ces instances ne sont pas nécessairement représentatifs de tous les membres du parti politique. L’activisme demande beaucoup de temps et d’investissement, et tout le monde n’a pas le même niveau d’engagement.

Nous demandons beaucoup à nos militants bénévoles. C’est beaucoup de lecture, beaucoup de préparation pour participer à une instance. Les jeunes et les personnes plus vulnérables n’ont pas forcément les ressources pour le fairesouligne une autre Source.

Autrement dit, les manifestations organisées par le parti attirent d’abord les personnes les plus mobilisées. Cela peut expliquer pourquoi certaines questions captent l’intérêt des délégués sans que ces mêmes questions trouvent forcément la même résonance auprès de tous.

La question économique

À cela s’ajoute un autre problème structurel. Traditionnellement, la réponse de la gauche aux problèmes économiques a été principalement de prôner un rôle plus fort de l’État dans l’économie. Pour lutter contre le taux de chômage, en période de récession, davantage de dépenses publiques sont promises pour générer des emplois et aider les citoyens les plus durement touchés.

Cependant, l’inflation et la hausse du coût de la vie frappent actuellement, même si le taux de chômage reste faible. Les gens traversent une période difficile, mais il est difficile de trouver un discours qui réponde à celaon vous explique en coulisses.

Les citoyens se montrent également plus méfiants à l’égard des discours axés sur une utilisation accrue des fonds publics. Non seulement les dépenses ont été considérables depuis la pandémie – sans que cela contribue à résoudre les problèmes qui affligent les services à la population – mais ces dépenses sont elles-mêmes responsables de la hausse de l’inflation.

Face à la situation actuelle, les partis de tous bords cherchent activement à répondre aux besoins de la classe moyenne. Chez nous, comme ailleurs dans le monde, nous réduisons les impôts et envoyons des chèques aux citoyens pour les aider à couvrir le coût de la vie – une solution à laquelle la gauche n’est généralement pas favorable.

C’est sans compter qu’il est plus facile de promettre de nouvelles dépenses lorsque l’on est en période d’excédent budgétaire que lorsque l’État enregistre déjà le déficit le plus lourd de son histoire en termes absolus.

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Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a annoncé de nouvelles mesures pour aider les Canadiens à faire face à la hausse du coût de la vie. (Photo d’archives)

Photo : La Presse Canadienne / Chris Young

Pragmatisme au menu

Car quelque chose de mauvais engendre du bien, dit le proverbe. Si la polémique des derniers jours a au moins un bénéfice, c’est sans doute d’apporter des arguments à Gabriel Nadeau-Dubois.

Le co-porte-parole de Québec solidaire souhaite voir son parti mieux choisir ses combats, prioriser les enjeux qui comptent le plus pour les citoyens. La polémique autour d’Haroun Bouazzi lui permettra de mieux illustrer son propos. Encore faut-il que les militants partagent sa vision des choses et que le principal parti concerné ne laisse pas les derniers développements ternir son enthousiasme.

 
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