La technologie peut-elle mettre fin à la corruption ?

La technologie peut-elle mettre fin à la corruption ?
La technologie peut-elle mettre fin à la corruption ?
La corruption touche de manière disproportionnée les communautés les plus pauvres et les plus marginalisées, ce qui en fait une tragédie économique et sociale autant qu’un problème politique. Selon le Forum économique mondial, la corruption coûte à l’économie mondiale environ 2 600 milliards de dollars par an, soit environ 5 % du PIB mondial, ce qui laisse moins de ressources pour les services essentiels dans de nombreux pays en développement.

Les outils numériques peuvent et doivent jouer un rôle important dans les efforts visant à éradiquer la corruption. Les gouvernements peuvent les utiliser pour accroître la transparence, promouvoir la responsabilité et responsabiliser les citoyens. Mais comme l’a conclu la réunion de l’IACA, la technologie à elle seule ne peut garantir le succès. Les hommes politiques doivent également s’engager à prendre des mesures anti-corruption, faire preuve de leadership et de vision, et faire respecter l’État de droit.
Premièrement, la technologie peut contribuer à la lutte contre la corruption en permettant la numérisation des services publics. Les processus bureaucratiques pesants deviennent trop souvent un terrain fertile pour la corruption. Les plateformes numériques qui rationaliseraient et automatiseraient ces services réduiraient les interactions en face-à-face et donc les possibilités de détournement. Par exemple, l’Estonie, pionnier de l’administration électronique, a numérisé presque tous ses services publics, depuis le paiement des impôts jusqu’à l’enregistrement des entreprises, garantissant ainsi une plus grande transparence et rendant plus difficile pour les fonctionnaires corrompus de demander des pots-de-vin.

Les gouvernements pourraient également utiliser la technologie blockchain et l’intelligence artificielle pour identifier et prévenir la corruption. Les systèmes de marchés publics basés sur la blockchain créeraient un enregistrement transparent et immuable des procédures d’appel d’offres. En outre, les gouvernements ont commencé à utiliser l’intelligence artificielle et l’analyse des données pour détecter les flux financiers illicites qui coûtent souvent des milliards de dollars en recettes fiscales et douanières perdues. L’IA pourrait également détecter des schémas et des anomalies susceptibles d’indiquer une corruption, comme des transactions financières suspectes ou des incohérences dans les données sur les marchés publics. De tels outils permettent une intervention rapide, ce qui peut empêcher la corruption de se développer sans contrôle.

Certains des plus grands scandales de corruption au monde ont été révélés par des lanceurs d’alerte. Pour faciliter le signalement des actes répréhensibles, les hommes politiques devraient établir des systèmes cryptés permettant aux citoyens de signaler les incidents de corruption et de pots-de-vin de manière anonyme. Ces plateformes, combinées aux médias sociaux, permettent aux citoyens de s’exprimer rapidement et sans crainte de représailles, faisant ainsi pression sur les gouvernements et les entreprises pour qu’ils agissent.

Malgré les progrès des outils numériques permettant de signaler la corruption, la technologie ne peut pas empêcher les corrompus de trouver des solutions alternatives. En outre, la fracture numérique entre les pays riches et les pays pauvres signifie que les citoyens et les responsables des pays en développement n’ont souvent pas accès aux outils anti-corruption lorsqu’ils en ont le plus besoin. Ce problème est particulièrement prononcé dans les zones rurales, où la corruption a tendance à être plus répandue et où les gens ne disposent pas toujours des connaissances numériques ou des ressources nécessaires pour utiliser les services gouvernementaux en ligne ou les plateformes de reporting en ligne.

Pour que les outils numériques soient efficaces dans la lutte contre la corruption, ceux qui sont au pouvoir doivent avoir les compétences nécessaires pour détecter les actes répréhensibles et connaître les meilleures pratiques. À cette fin, l’Iaca a concentré ses efforts sur les programmes d’éducation et de formation. L’éthique et le raisonnement moral doivent être intégrés dans les programmes scolaires dès le plus jeune âge. Les fonctionnaires, les chefs d’entreprise et les agents chargés de l’application des lois doivent recevoir régulièrement une formation sur les mesures anti-corruption les plus efficaces et les plus efficientes.

De même, les gouvernements doivent faire respecter l’État de droit en appliquant vigoureusement la législation anti-corruption et en comblant les vides juridiques. Condamner les acteurs corrompus nécessite des cadres juridiques solides, un système judiciaire et des forces de l’ordre indépendants, sans lesquels même la meilleure technologie n’aura aucun impact réel.

L’éradication de la corruption est l’un des combats les plus importants de notre époque, et nous disposons désormais d’un nouvel ensemble d’outils numériques puissants. Mais si la technologie peut aider à détecter et à prévenir les actes répréhensibles, les lois anti-corruption et les autorités chargées de les faire respecter doivent avoir l’autorité nécessaire pour faire le travail.
Azalina Othman Said, ministre auprès du Premier ministre de Malaisie (droit et réforme institutionnelle), présidera l’Assemblée des partis de l’Académie internationale anti-corruption en 2024.
© Projet Union 1995–2024

 
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