La méconnaissance des risques posés par certains aliments et l’engouement des parents pour l’alimentation autonome de leurs enfants pourraient expliquer une augmentation du nombre d’enfants admis à l’hôpital suite à un épisode d’étouffement provoqué par l’aspiration d’aliments.
C’est ce que révèle une étude publiée dans le Revue canadienne de médecine respiratoire, de soins intensifs et de médecine du sommeil par une équipe de l’Université Laval et du Centre de recherche du CHU de Québec — Université Laval. Les membres de cette équipe ont examiné les dossiers de jeunes de 0 à 17 ans qui avaient été admis au Centre mère-enfant Soleil du CHU de Québec – Université Laval entre avril 2006 et décembre 2020 à la suite d’un épisode d’étouffement.
« Le Centre reçoit tous les enfants de l’Est du Québec qui ont eu un épisode d’étouffement et qui présentent des symptômes comme des difficultés respiratoires ou une toux persistante. Nous effectuons un examen des voies respiratoires sous anesthésie pour déterminer si le corps étranger est toujours présent et, si c’est le cas, nous l’enlevons», explique l’un des auteurs de l’étude, Patrick Daigneault, directeur du service de pédiatrie. à la Faculté de médecine de l’Université Laval, chercheur au Centre de recherche du CHU de Québec – Université Laval et pneumologue pédiatrique au CHU de Québec-Université Laval.
Au cours de la période considérée, 191 enfants, dont l’âge moyen était de 31 mois, ont subi cet examen. Dans 101 de ces cas, un corps étranger était encore présent dans les voies respiratoires. « Le nombre d’enfants nécessitant une hospitalisation suite à un épisode d’étouffement a augmenté de 87 % entre les cinq premières et les cinq dernières années de la période couverte par l’étude. Il s’agit d’une augmentation trois fois supérieure à celle du nombre d’enfants admis au Centre Mère-Enfant Soleil au cours de la même période. Les cas d’étouffement semblent clairement en hausse chez les enfants », résume le professeur Daigneault.
Dans 73 % des cas, le corps étranger aspiré par l’enfant était un morceau de nourriture. Il s’agissait principalement de carottes (20 %), de noix et graines (19 %), d’arachides (10 %), de pop-corn (8 %) et de fruits ou légumes fermes autres que les carottes (6 %). Les autres cas étaient principalement imputables à des jouets (8 %) ou à des objets divers (17 %).
Les épisodes d’étouffement surviennent principalement à la maison (85 % des cas) lorsque les enfants sont sous la surveillance de leurs parents (79 % des cas). « Dans 41 % des cas, il a fallu qu’un témoin de la scène, souvent un parent, intervienne pour aider l’enfant à libérer ses voies respiratoires. L’intervention allait de la simple tape dans le dos à la réanimation cardio-pulmonaire », précise le pneumologue pédiatre.
Dans 70 % des cas, l’aliment responsable de l’étouffement figure sur la liste des aliments auxquels il faut prêter une attention particulière en raison des risques qu’ils présentent pour les jeunes enfants. «Cela nous amène à croire qu’il y a un manque de connaissances des parents sur les recommandations de prévention de l’étouffement ou un manque de respect de ces directives», souligne-t-il.
Le professeur Daigneault n’exclut pas la possibilité qu’une partie de cette augmentation soit liée à la popularité croissante de la diversification alimentaire menée par les enfants. Cette approche permet à l’enfant de participer activement à son alimentation en mangeant lui-même des aliments coupés en morceaux. « Si les parents ne savent pas ce qui est sécuritaire pour leur enfant, cette approche peut présenter certains risques. Les sites Web qui font la promotion d’une diversité alimentaire dirigée par les enfants peuvent ne pas mettre suffisamment l’accent sur les aliments ou les textures alimentaires à éviter. »
Selon le pneumologue pédiatre, il serait important de réaliser des interventions auprès des parents afin de mieux les informer sur les recommandations visant à réduire les risques d’étouffement chez les enfants. « De plus, dans un monde idéal, tous les adultes devraient connaître les manœuvres de base pour dégager les voies respiratoires d’un enfant afin qu’il puisse réagir rapidement et de manière appropriée en cas d’épisode d’étouffement. »
Justine Veilleux, qui était résidente en pédiatrie à l’Université Laval sous la direction du professeur Daigneault au moment de l’étude, est la première auteure de l’article publié dans le Revue canadienne de médecine respiratoire, de soins intensifs et de médecine du sommeil. The other signatories are Sandrine Bellavance and Mahukpe Narcisse Ulrich Singbo from the CHU de Québec-Université Laval.