La tâche a déjà été plus facile pour Justin Trudeau lors des sommets internationaux. A peine élu premier ministre en 2015, il a eu droit à une rencontre bilatérale avec Xi Jinping lors du G20 en Turquie. Quelques jours plus tard, lors de l’APEC à Manille, il s’entretient de longues minutes avec celui qu’il appelait déjà « Barack ».
“C’était le moment”Le Canada est de retour», rappelle Paul Samson, qui faisait partie de plusieurs délégations canadiennes au G20, lors du premier mandat des libéraux. C’était une période d’aspiration, où d’autres pays étaient plus ouverts au Canada dans la négociation d’accords de libre-échange. Il y avait toutes sortes de raisons de s’intéresser à notre pays.
Aujourd’hui, les choses ont changé, note M. Samson, qui préside le Centre pour l’innovation en gouvernance internationale : Désormais, lorsque le Premier ministre arrive à Rio ou ailleurs pour le G20, les portes ne sont plus ouvertes comme avant.
Par ailleurs, aucune réunion bilatérale n’a été annoncée jusqu’à présent par Ottawa avec les chefs d’Etat chinois ou indien. Il n’est même pas sûr que Justin Trudeau et Xi Jinping auront une discussion informelle dans un couloir – eux qui ont eu droit à un face-à-face tendu lors du G20 il y a deux ans.
Xi Jin Ping et Justin Trudeau ont tous deux assisté au sommet de l’APEC de 2023. (Photo d’archives)
Photo : Reuters / Carlos Barria
La décision du gouvernement Trudeau en août dernier d’imposer des droits de douane de 100 % sur les véhicules électriques chinois ou une surtaxe de 25 % sur les produits en acier et en aluminium n’a bien sûr rien fait pour améliorer les relations déjà difficiles avec Pékin.
Selon nos informations, ces actions commerciales visent avant tout à se rapprocher des Américains, en montrant que le Canada est un partenaire de bonne foi et qu’il joue dans la même équipe que les États-Unis face au géant chinois.
Nous durcissons depuis un certain temps notre position face à la Chine.
a déclaré la vice-première ministre Chrystia Freeland plus tôt cette semaine lors d’un point de presse à Ottawa.
Nous sommes le seul pays au monde parfaitement aligné sur les États-Unis en matière de politique économique à l’égard de la Chine.
» prit-elle soin d’ajouter.
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La ministre des Finances et vice-première ministre Chrystia Freeland s’adresse aux journalistes après une réunion du Comité du Cabinet sur les relations canado-américaines à la suite de l’élection du président élu Donald Trump à Ottawa, le vendredi 8 novembre 2024. (Photo d’archives)
Photo : La Presse Canadienne / Spencer Colby
Dans les milieux diplomatiques canadiens, on estime que le Canada ne peut pas se permettre d’être perçu comme une porte d’entrée pour les produits chinois à prix réduit – comme c’est actuellement le cas du Mexique – d’autant plus que Donald Trump est perçu comme obsédé par la question chinoise.
Le Canada donne-t-il suffisamment aux États-Unis ?
Il est toutefois loin d’être certain que ces efforts visant à s’éloigner de la Chine et à se rapprocher des Américains porteront leurs fruits pour le gouvernement canadien.
Plusieurs membres de la future administration républicaine à la Maison Blanche ont tenu des propos très durs à l’égard de Justin Trudeau, à commencer par le conseiller à la sécurité nationale Mike Waltz, qui a déclaré que Pierre Poilievre débarrasserait le Canada d’un gâchis progressiste
– faisant allusion aux animosités dans la relation à venir.
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Justin Trudeau et Donald Trump le 3 décembre 2019 à Londres. (Photo d’archives)
Photo : La Presse Canadienne / Sean Kilpatrick
Et puis, Donald Trump est très transactionnel
dans ses relations avec l’étranger, explique le professeur à l’École de politique appliquée de l’Université de Sherbrooke, Serge Granger : Il calcule beaucoup les choses par rapport aux coûts et aux bénéfices, […] comme des gains à réaliser. Il regardera ce qui est rentable pour les Etats-Unis.
Toutefois, si le Canada veut échapper aux tarifs douaniers de 10 % que le futur président a promis d’imposer sur toutes les importations en sol américain, Ottawa devra probablement mettre quelque chose sur la table, estiment plusieurs experts. Car convaincre nos voisins du Sud qu’eux aussi souffriraient de ces nouvelles barrières tarifaires de 10 % – comme tente actuellement de le faire le gouvernement Trudeau – ne sera pas une bonne chose. suffisant
estime Paul Samson du Centre pour l’innovation en gouvernance internationale.
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Les ministres Mary Ng, Chrystia Freeland et François-Philippe Champagne répondent aux questions des journalistes.
Photo : La Presse Canadienne / Kelly Clark
Le Canada, selon lui, aurait bien plus à perdre que les États-Unis avec ces tarifs.
Un négociateur comme Robert Lighthizer, qui reviendra dans l’administration de Donald Trump, estime que le Canada est en position de faiblesse et risque de l’exploiter
précise M. Samson.
Le professeur de sciences politiques à l’UQAM, Justin Massie, est du même avis.
La stratégie canadienne est d’essayer d’être exempté. En disant : « nous sommes trop importants pour l’économie américaine et vous devez nous épargner. Il n’est pas tout à fait sûr que cela fonctionnera avec les Etats-Unis.»
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Justin Massie est professeur titulaire de sciences politiques à l’Université du Québec à Montréal et codirecteur du Réseau d’analyse stratégique.
Photo: Radio-Canada / Benoît Roussel
Les relations avec le géant américain pourraient donc également se dégrader dans les années à venir – une difficulté qui s’est déjà fait sentir lors des sommets du Pérou et du Brésil. Car, même si le président élu ne sera pas physiquement présent à l’APEC et au G20, son ombre risque de planer sur ces rencontres.
L’élection de Donald Trump va changer plusieurs conversations qui auront lieu lors de ces sommets
note une Source gouvernementale canadienne haut placée.
Un accord commercial avec l’Indonésie
Pour tenter de diversifier ses partenaires économiques, le Canada mise de plus en plus sur les pays asiatiques, autres que la Chine, qui seront présents à l’APEC, comme l’Indonésie et la Corée du Sud.
Selon nos informations, Justin Trudeau doit également profiter de la rencontre internationale au Pérou pour annoncer la signature d’un accord commercial avec l’Indonésie – un pays qui compte environ 277,5 millions d’habitants et qui est considéré comme un porteur de marché pour le Canada.
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Le premier ministre Justin Trudeau participe à une cérémonie de bienvenue aux côtés du président indonésien Joko Widodo avant une réunion bilatérale au palais Merdeka à Jakarta, en Indonésie, le mardi 5 septembre 2023. (Photo d’archives)
Photo : La Presse Canadienne / Sean Kilpatrick
Nous sommes cependant loin d’un accord économique avec l’Inde et ses 1,4 milliard d’habitants, le troisième géant avec lequel le Canada est actuellement en conflit. Les négociations pour un éventuel accord commercial ont également été suspendues à la fin de l’été 2023, juste avant qu’Ottawa accuse le gouvernement Modi d’être impliqué dans le meurtre d’un sikh en Colombie. Britannique.
Ce n’est pas seulement que nous avons une relation difficile avec la Chine
note la politologue de l’Université d’Ottawa, Pascale Massot. Nous avons également une relation très difficile avec l’Inde. Nous aurons également une relation très difficile avec les États-Unis.
Il n’y aura pas de solution miracle, aucun pays ne viendra sauver la situation.
Justin Trudeau arrive donc à l’APEC et au G20 de manière de plus en plus isolé
estime le directeur du Réseau d’analyse stratégique de l’UQAM, Justin Massie. Plusieurs de ses alliés traditionnels – Joe Biden aux États-Unis, Olaf Scholz en Allemagne, Emmanuel Macron en France – ont perdu de leur influence et apparaissent ou sont complètement en fin de règne.
Justin Trudeau, qui est peut-être en train de terminer le sien, semble lui aussi loin de son fameux slogan : « Le Canada est de retour ».