Pour les enfants, il y a le Parc Astérix. Pour Elon Musk, il y a l’élection présidentielle américaine. Il suffit de jeter un coup d’œil au compte du milliardaire sur son réseau social. En vingt-quatre heures, plus de 70 posts et reposts ont inondé son profil. Mèmes baby-boomers, accusations infondées de fraude électorale, auto-promotion… Le quinquagénaire, devenu l’un des plus fervents partisans de Donald Trump, s’affole. Célébrant au passage sa possible entrée dans l’administration du prochain président des Etats-Unis. Libé a retracé sa soirée électorale en remontant le fil de ses messages.
21h01 : « Avec le vote de demain, l’humanité se trouve à la croisée des chemins »
A la veille de l’ouverture des bureaux de vote, le fondateur de Space X est déjà au travail. Pendant des heures, il a partagé et repartagé des extraits du podcast de Joe Rogan où il s’exprimait. Le présentateur, accusé de racisme et de complot, avait annoncé la veille du vote soutenir officiellement la candidature de Donald Trump. Et à son micro, le milliardaire se sentait à l’aise. Pêle-mêle, il accuse les démocrates de “Laissez les criminels violents en liberté”. Relaye des accusations (infondées) de fraude électorale. Dans un autre extrait, on le voit remplir calmement sa tasse de café tout en prédisant d’un ton sérieux : “Si Trump ne gagne pas, je pense que ce seront les dernières élections.” D’accord avec lui-même, l’homme d’affaires a republié l’extrait et écrit sur X : « Votez pour protéger la démocratie. »
00h38 : «Bravo, Joshua d’Arizona !»
Pipe et beaucoup d’audace. Le patron de Tesla félicite un certain «Josué d’Arizona». Sur une photo, l’homme rayonne de bonheur : il vient de gagner un million de dollars. On rembobine. Après avoir annoncé son soutien à Donald Trump en juillet, Elon Musk s’est lancé à corps perdu dans la campagne. Au total, le milliardaire a dépensé 75 millions de dollars et a concentré ses efforts sur les swing states où il a lancé un “loterie”. Chaque jour jusqu’à l’élection, le signataire d’une pétition pro-Trump pourrait être tiré au sort pour recevoir un chèque d’un million de dollars. Enfin, « par tirage au sort ». Les gagnants sont en fait “porte-parole” soigneusement sélectionnés. Ce sont les avocats d’Elon Musk qui ont révélé la supercherie devant la justice de Pennsylvanie, lundi 4 novembre, alors que la récompense avait fait l’objet d’une demande de suspension. Une demande que le tribunal de Philadelphie a décidé malgré tout et sans explication de rejeter.
00h40 : « Cette plateforme est la première Source d’information sur Terre ! »
Les affaires sont les affaires. Tout au long de la journée, Elon Musk orne son profil de tweets vantant les mérites de ses entreprises. Bien entendu, il salue Space X à plusieurs reprises. Il déborde surtout de compliments pour « Cette plateforme est la première Source d’information sur Terre ! Un peu plus tard, il demande : “Envoyez des liens http://X.com à vos amis pour qu’ils sachent ce qui se passe réellement.” Et agrémente le tout de critiques adressées au « médias traditionnels »jugé partial et plein de « canulars ». Alors que le réseau social est régulièrement critiqué pour sa désinformation galopante depuis son rachat. Et qui, depuis la campagne, est accusé de faire office de caisse de résonance en faveur de Donald Trump.
11h09 : « La cavalerie est arrivée »
Que serait Elon Musk sans sa communauté masculiniste ? Il suffit d’un tweet d’un compte anonyme, suivi par 400 000 personnes, pour enthousiasmer le patron : “J’entends des informations venant de tout le pays selon lesquelles les hommes se rendent aux urnes en grand nombre”, affirme l’internaute. Qui ajoute : “La file d’attente devant mon bureau de vote ici en Floride est presque entièrement composée de jeunes hommes.” La réponse d’Elon Musk du tac au tac : “C’est un changement radical.” Quelques minutes plus tard, il prend feu : « La cavalerie est arrivée. Les hommes votent en nombre record. Ils comprennent désormais que tout est en jeu.» Le milliardaire voit-il, dans cette information non sourcée, le signe d’une victoire de son adversaire ? Certainement. À plusieurs reprises, l’élection a été présentée comme un « guerre des sexes » selon les sondages, avec des femmes de plus en plus démocrates et des hommes plus républicains que jamais.
15h06 : “Je viens de voter”
«Je viens de voter dans le comté de Cameron, au Texas, où se trouve Starbase. [site de Space X, ndlr]», a tweeté Elon Musk mardi après-midi. C’est dans cet État que l’entrepreneur souhaite relocaliser les sièges sociaux de deux de ses sociétés, X et Space X. Une décision prise cet été après un coup de gueule contre l’adoption d’une loi californienne protégeant les étudiants trans. Dans un « Space », une conversation audio publique sur X, le chef d’entreprise annonçait quelques minutes plus tard qu’il s’envolait pour la Floride. Direction Mar-a-Lago, la résidence privée de Donald Trump, où le candidat républicain doit assister aux résultats de l’élection.
00h35 : “Je vous laisse réaliser”
Les anciens comprendront le clin d’œil. Lorsqu’il rachète Twitter en 2022, Elon Musk entre au siège du réseau… un évier à la main. “Laisse ça pénétrer”, il a écrit à propos de X. Un jeu de mots sur le double sens du mot couler. Deux ans plus tard, il récidive. Vers 6h30 (heure française), les résultats de certains swing states se révèlent favorables à Donald Trump. Et Musk triomphe déjà avec un photomontage de lui et son évier… à la Maison Blanche. Donald Trump lui a en tout cas promis la tête d’une commission chargée d’optimiser les finances publiques. Qu’elle dure ou non, leur idylle s’avérera pour le moins lucrative pour le chef d’entreprise : dans la foulée de la victoire de son acolyte, le cours de l’action Tesla a bondi de 13 %.