le fléau du sucre ravage la santé des enfants et inquiète de nombreux spécialistes

Diabète, stéatose hépatique, obésité, caries dentaires : une consommation excessive de sucre fait des ravages sur la santé de nombreux enfants québécois qui nécessitent des soins de santé lourds et coûteux, s’inquiètent les médecins.

Boissons sucrées, biscuits, barres granola, gâteaux : le sucre sous toutes ses formes est largement consommé par les jeunes Québécois.

“Plus on mange, plus notre cerveau en veut”, souligne le pédiatre D.D Julie St-Pierre, spécialisée en obésité chez les jeunes. On en mange plus souvent [qu’avant] et plus encore dans tout.

“Je n’ai pas pu résister”

Les principaux problèmes de santé liés au sucre chez les enfants sont : l’obésité, le diabète de type 2 et une « épidémie silencieuse » de caries dentaires chez les tout-petits (lire lundi).

Certaines personnes deviennent plus dépendantes que d’autres du sucre, une dépendance qui peut rendre malade.

«Je n’ai pas pu résister, c’était trop dur pour moi», a déclaré Alexandre Lazure-Lagacé, 13 ans, à propos de sa consommation de boissons gazeuses.

Le journal J’ai également rencontré un enfant chez qui on a diagnostiqué une stéatose hépatique à l’âge de deux ans seulement.

Selon plusieurs spécialistes, les boissons sucrées (jus, boissons gazeuses, spécialités de café ou de thé), qui contiennent souvent plus de 30 grammes (g) de sucre par portion, seraient la principale Source de surconsommation chez les jeunes. Dans une journée, la quantité totale de sucre ingérée ne doit pas dépasser 10 % des calories (voir les tableaux ci-dessous).

«Notre environnement le rend beaucoup plus accessible, il y en a partout où l’on se tourne», résume Marie-Claude Paquette, nutritionniste à l’Institut national de santé publique du Québec. Ce n’est pas cher et le sucre est un goût inné chez les enfants.

« Il faut vraiment réduire. Je vois des jeunes en clinique qui prennent un litre par jour [du jus de fruits]», note le DD Mélanie Henderson, endocrinologue à l’hôpital Sainte-Justine.

Selon le DD St-Pierre, le sucre représente un problème de santé publique criant, au même titre que la cigarette autrefois.

Comme les cigarettes

«Quand je vois un enfant avec un Coca-Cola ou un thé glacé, ça me choque autant qu’un enfant avec une cigarette à la bouche», compare la spécialiste de l’Hôpital de Montréal pour enfants.

La relation entre le sucre et l’obésité « est claire », écrit la Fondation des maladies du cœur.

De manière inquiétante, les nouveaux cas de diabète de type 2 ont augmenté de 60 % chez les enfants canadiens entre 2008 et 2019, montre une étude publiée en 2023. Une maladie qui n’existait presque pas il y a 20 ans.

Pédiatre Julie St-Pierre, de l’Hôpital de Montréal pour enfants.

Photo Pierre-Paul Poulin

“C’est vraiment majeur”, dit le DD Henderson, qui s’inquiète de l’avenir déjà hypothéqué de ces enfants.

“C’est un fléau en ce moment”, ajoute le DD Saint-Pierre.

Le principal facteur de risque du diabète de type 2 est l’obésité, qui touche environ 10 % des enfants québécois. Deux éléments ressortent pour justifier cette hausse des diagnostics : une mauvaise alimentation (notamment en sucre) et un mode de vie sédentaire. Des facteurs génétiques entrent également en jeu.

Nous sommes confrontés à une maladie qui va générer des consultations sans fin. Cela va coûter une vraie fortune. »

Dr Rémi Rabasa-Lhoret, endocrinologue

image tirée du site du CHUM

Les médecins sont d’autant plus inquiets que cette maladie est plus agressive à un jeune âge et que les échecs thérapeutiques sont plus fréquents. À Sainte-Justine, des jeunes de 12 ou 13 ans souffrent même déjà de maladies liées à leur diabète (yeux, reins, hypertension).

Mieux choisir les friandises

D’autres problèmes peuvent également être liés à une consommation excessive de sucre, comme des problèmes de concentration et de mémoire. À plus long terme, problèmes cardiaques et cancers sont également associés.

Malgré tout, les spécialistes estiment que les parents ne devraient pas interdire le sucre à leurs enfants, mais plutôt mieux doser les friandises.

«Le but n’est pas d’éliminer à 100 % tous les types de sucre dans l’alimentation, mais il faut leur donner la place qui leur revient», explique Marie-Jeanne Rossier-Bisaillon, nutritionniste à l’Association de santé publique du Québec.

Le sucre est-il une drogue ?

Le sucre peut créer une dépendance aussi forte que les drogues dures, l’alcool ou le jeu compulsif, confirme D.D Julie St-Pierre, pédiatre. Comme pour tous les médicaments, certaines personnes sont plus à risque que d’autres.

Le sucre envoie un message de plaisir au cerveau et augmente les niveaux de dopamine. Plus le cerveau s’y habitue, plus la dose doit être forte pour ressentir le même plaisir. Les enfants courent autant de risques de dépendance au sucre que les adultes.

“Plus on commence jeune, plus on risque de développer cette dépendance au sucre”, ajoute D.D Saint-Pierre.

Quelle quantité de sucre peut-on manger par jour ?

Le sucre ne doit pas dépasser 10 % des besoins énergétiques quotidiens et idéalement 5 %. Voici les recommandations de 10 % :

▪ 0-2 ans : 0 g
▪ Jeunes enfants : environ 15 g à 40 g par jour*, soit 4 à 10 cuillères à café
▪ Enfants et adolescents : environ 48 g pour un régime de 2000 calories, soit 12 cuillères à café

*La quantité de sucre recommandée varie en fonction de l’apport énergétique quotidien. Plusieurs facteurs l’influencent : l’âge, le sexe et le niveau d’activité. Les chiffres sont à titre indicatif. Avec un apport de 5%, les quantités sont réduites de moitié.
Source : OMS, Fondation des maladies du cœur et de l’AVC, Société canadienne de pédiatrie, naître et grandir

Et les collations ?

Les sucres contenus dans les fruits, les légumes et le lait ne sont pas nocifs pour la santé. Cependant, de nombreux parents seraient surpris de constater la quantité de sucre présente dans certaines des collations préférées de leurs enfants. Voici quelques exemples:

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Photos Martin Chevalier, Journal de Montréal

Le jus naturel est-il bon ?

Boire du jus de pomme fait ingérer beaucoup plus de sucre que manger une pomme. Le fruit apporte des nutriments, des fibres et une sensation de satiété. Le jus ne répond à aucun besoin nutritionnel.

La solution : boire de l’eau

Remplacer les boissons sucrées par de l’eau est un élément crucial pour réduire la consommation de sucre puisque c’est bon pour la santé et gratuit, insistent plusieurs experts.


Garçon mangeant des céréales de petit-déjeuner colorées

Agence photo QMI

Le sucre sous toutes ses formes :

▪ Sucre naturel : celui que l’on trouve dans les fruits ou le lait
▪ Sucres ajoutés ou sucres libres : peu ou pas de valeur nutritionnelle (boissons sucrées)
▪ Types de sucre : Sucre blanc, cassonade, mélasse, miel, sirop d’érable
▪ Autres noms : Glucose, fructose, dextrose, maltose, saccharose

Source : Fondation des maladies du cœur + AVC

Pas seulement la responsabilité des parents

Réduire la consommation de sucre des enfants nécessite une meilleure éducation et davantage de réglementations industrielles, affirment plusieurs experts.

« Les parents ont certes une part de responsabilité, mais on ne peut pas tout mettre sur leurs épaules. […] Le marketing est très agressif, insiste la nutritionniste Marie-Jeanne Rossier-Bisaillon, de l’Association de santé publique du Québec. Nous avons besoin d’environnements qui favorisent des habitudes saines.

Toutes les parties prenantes contactées par Le journal Je suis d’accord : le gouvernement doit réglementer davantage la vente de produits sucrés et éduquer la population.

“Tant qu’on n’aura pas remis le pouvoir de choisir par la connaissance entre les mains du consommateur, cela ne changera pas”, estime le pédiatre D.D Julie St-Pierre.

Exemple de balises :

▪ Un étiquetage moins trompeur sur les produits dits « santé » ou « naturels »
▪ Limiter la quantité de sucre autorisée dans les produits
▪ Noter les produits selon leur valeur nutritionnelle (vert, jaune, rouge)

D’ailleurs, un nouvel étiquetage apparaîtra sur les produits ultra-transformés au Canada à partir de 2026. Les produits trop gras, trop sucrés ou trop salés devront avoir un symbole en forme de loupe sur la devant pour éclairer le consommateur.


Garçon mangeant des céréales de petit-déjeuner colorées

CAPTURE D’ÉCRAN SANTÉ CANADA

Taxer les boissons sucrées ?

La taxation des boissons sucrées a également eu des effets bénéfiques sur la consommation dans certains pays comme le Mexique. Au Québec, plusieurs experts sont favorables à cette mesure.

“La fiscalité serait intéressante si les sommes récoltées étaient reversées dans le système de santé pour la promotion des habitudes de vie”, souligne le DD Mélanie Henderson, endocrinologue à l’Hôpital Sainte-Justine.

Par ailleurs, l’éducation des consommateurs est également un élément clé pour leur permettre de faire de bons choix.

«Il y a des personnes plus vulnérables que d’autres», souligne Michel Lucas, chercheur au CHU de Québec spécialisé en épidémiologie nutritionnelle. Le consommateur non instruit est complètement pris dans cette situation. […] Cela devient un problème, une roue infernale.

« Les grands-parents ont un rôle à jouer », ajoute-t-il. Nous pensons faire le bien en offrant une friandise, mais ce n’est pas la bonne chose.

Environ 40 % des collations scolaires données sont riches en sucre

Les muffins, les jus de fruits ou les fameuses crêpes « Pattes d’ours » sont encore très présents dans les écoles québécoises : environ 40 % des collations offertes aux élèves qui proviennent de dons sont fourrées de sucre, selon un sondage québécois publié l’année dernière.

C’est une enquête réalisée par le collectif Vital (anciennement Coalition Poids) qui a permis d’y voir un peu plus clair dans la variété des aliments proposés aux élèves des écoles primaires, à la lumière d’une enquête réalisée auprès de 273 acteurs. du réseau scolaire.

«Nous avions des parents qui se plaignaient des dons que recevaient certaines écoles et nous voulions savoir ce qui se passait», raconte sa directrice générale, Corinne Voyer.

Les aliments reçus sous forme de dons, provenant d’organismes communautaires, d’épiceries ou de commerces, ont été ciblés puisqu’il semble y avoir plus de « laxisme » à ce niveau comparativement aux aliments achetés directement par les écoles, explique M.moi Voir.

Résultat : les dons alimentaires étaient présents dans 64 % des écoles ayant participé à cette enquête, et parmi les collations proposées gratuitement, environ 40 % étaient des « produits ultra-transformés riches en sucre » (comme des barres granola, des desserts, des yaourts sucrés ou du lait chocolaté). ), ce qui va à l’encontre des directives en vigueur dans le réseau scolaire.

En plus d’avoir un impact sur la santé des enfants, le fait que ces collations sucrées soient distribuées à l’école envoie un très « mauvais message » aux élèves, estime M.moi Voir.

Par ailleurs, les étudiants les plus susceptibles de consommer des collations riches en sucre sont ceux qui vivent dans des zones défavorisées, où les dons sont les plus fréquents, même s’ils sont souvent ceux qui consomment à la maison les aliments les moins nutritifs.

«À mon avis, on nuit à ces étudiants, parce qu’on augmente nos écarts de santé», déplore M.moi Voir.

— Daphnée Dion-Viens, Le Journal de Québec

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