« Sound of Freedom », tous complices

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« C’est un film très important et un documentaire très important, tout cela réuni en un seul film qui traite d’un sujet qui doit être débattu. » Habituellement, dans les longs et inimitables e-mails qu’il envoie à ses partisans, Donald Trump parle surtout de lui, de sa candidature, voire de lui-même en tant que candidat. Mais en ce jour d’été 2023, l’ancien président souhaite urgemment recommander un film à ses fans. Et pas n’importe quel film : Le son de la liberté (SoF), d’Alejandro Monteverde.

Ce choix est tout sauf innocent. Tourné en 2018, pour un budget de 15 millions de dollars, ce thriller de série B avait été mis au placard par son producteur, Fox, suite à son rachat par Disney : les dirigeants n’étaient visiblement pas convaincus par la qualité artistique de la production. Mais, cinq ans plus tard, SoF est racheté par Angel Studios, spécialiste des films chrétiens basé dans l’Utah, État comptant 65% de population mormone, qui mise sur sa distribution sur les écrans.

Le film, présenté comme une production indépendante qui a dû lutter contre Hollywood pour obtenir une sortie en salle, a rapidement trouvé son public, et son succès a même dépassé toutes les espérances. Lors de sa sortie le 4 juillet 2023, jour férié national, SoF fait mieux que la cinquième partie deIndiana Jones et suit le dernier Mission : ImpossibleÀ ce jour, IMDB estime son box-office mondial à 250 millions de dollars.

Le « Pizzagate » a des relents

Le succès de SoF est un brouillage savamment entretenu entre réalité et fiction. Dans son message, Donald Trump le qualifie de « documentaire ». Le film prétend transposer à l’écran les exploits d’un homme bien réel, nommé Tim Ballard. Mormon, ancien agent fédéral, il a fondé et dirigé l’opération Underground Railroad (OUR) jusqu’en 2023., une organisation paramilitaire censée lutter contre le trafic d’enfants et les réseaux pédophiles.

Le nom OUR fait référence à l’histoire de la lutte contre l’esclavage et au réseau clandestin mis en place par les abolitionnistes pour aider les esclaves en fuite à retrouver leur liberté. Ces réseaux ont atteint leur apogée dans les années précédant la guerre de Sécession (1861-1865) et auraient permis l’exfiltration de 30 000 à 100 000 fugitifs, selon les estimations des historiens. Cependant, pour les militants chrétiens de toutes confessions mobilisés derrière Trump, le phénomène de la pédophilie est l’équivalent moderne de l’esclavage au XIXe siècle.et siècle. C’est leur deuxième cause sacrée, après la lutte contre l’avortement.

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