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“Aujourd’hui, il n’y a plus de mots, les rappeurs font tous la même chose”

Les textes lui parvenaient en un seul flux. Quatorze titres dans lesquels Gringe dresse un triste portrait de notre société. Comme son vrai nom, Guillaume Tranchant, le rappeur livre punchline après punchline sur la guerre au Moyen-Orient (« Feelings »), sur « l’incarnation du vide moderne » que sont les créateurs de contenus (« Fake ID ») ou encore sur la mort. du jeune Nahel Merzouk, « abattu de sang-froid » par la police française en juin 2023 (« Plomb »).

« Nous pensions avoir dix ans de retard sur les États-Unis, mais nous y sommes ! Nous vivons dans un État autoritaire et arbitraire, où la répression est de plus en plus violente. On dirait un épisode de « Black Mirror » avec nos politiques sur TikTok ou chez McFly et Carlito », déplore-t-il en ajustant la visière de sa casquette.

Avec ce deuxième album, il espère sensibiliser les gens. Au moins « faire réagir les gens ». « N’est-ce pas le rôle d’un artiste ? Sans être leader d’une quelconque opinion, nous avons au moins la possibilité d’être entendus. Certains n’osent pas prendre position parce qu’ils ont peur d’être renversés. » Il se souvient avec nostalgie du rap qui l’a bercé. Un rap conscient, qui raconte la rue comme le ferait un reporter de guerre.

« J’ai grandi dans les années 1990 au sein de groupes très engagés, parfois boycottés ou censurés, comme NTM ou Ministère AMER. Tout cela était perdu. Aujourd’hui, on ne parle plus. Les rappeurs font tous la même chose. Ils ne sont plus dans le discours mais dans le mode de vie. Dans le culte de l’individu. » Il a la courtoisie de ne pas citer d’exemples, même si quelques noms lui viennent vite à l’esprit.

C’est infiniment compliqué pour moi de promouvoir. Je ne veux pas jouer au jeu de la médiocrité

Gringe

Le cinéma français, qui l’a approché à plusieurs reprises, le prend également au sérieux. A 44 ans, Gringe « sature » et ne supporte plus « l’indifférence et l’indécence de certains acteurs » qui monopolisent l’espace médiatique. « C’est infiniment compliqué pour moi de promouvoir. Je ne veux pas jouer au jeu de la médiocrité. » Son regard complète ses propos.

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L’acolyte d’Orelsan dans Casseurs Flowters a été le premier artiste à évoquer sa santé mentale et son usage d’anxiolytiques, bien avant que Stromae ne s’en mêle. « En parler lève le voile sur ce tabou. Il faut pouvoir travailler avec des gens qui vous comprennent, qui sont conscients que vous ne pouvez rien sortir avant cinq ans. »

Je suis allé si loin dans la dépression. J’aime sonder mes abîmes.

Gringe

C’est d’ailleurs après une longue dépression qu’il se lance dans l’écriture de ce deuxième album. L’écriture est sa thérapie. « Je ne pense pas que mes titres soient si sombres… Le fait est que j’ai développé tellement de compétences dans le noir et en hors-piste », dit-il en souriant. Je suis allé si loin dans la dépression. J’aime sonder mes abîmes. Nous devons accepter cet état. Mais cela peut être sans fin. »

Il y a plusieurs raisons à sa mélancolie. Et c’est avec beaucoup de pudeur qu’il raconte dans « Goodbye BB » son expérience de parentalité non désirée. « Je ne sais pas qui ni pourquoi j’ai réalisé cette pièce. Mais j’avais besoin d’écrire à ce sujet. » Un premier pas vers la lumière.

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« Hypersensible » (3e Bureau). En tournée dans toute la à partir du 7 novembre. En concert à Paris le 5 décembre 2024 (La Cigale) et le 6 mai 2025 (Olympia).

© DR ​

 
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