On se souvient de cette poignée de main peu conventionnelle entre les deux hommes lors de la réouverture de Notre-Dame le 7 décembre. Maintenant que Donald Trump a été investi comme 47e président des États-Unis, la question se pose du côté français des relations avec Emmanuel Macron. maintenir avec son homologue. La séquence de Notre-Dame disait-elle déjà quelque chose de ce point de vue ?
« Beaucoup y ont vu un rapprochement entre les deux présidents, je ne suis pas d’accord », explique Taoufik Djebali, maître de conférences en études anglaises à l’université de Caen Normandie et spécialiste des relations transatlantiques. J’ai vu un président français tenter de se rapprocher, même physiquement, de Donald Trump, et c’était à la limite de la gêne, devant un Trump indifférent et hautain. Au fond, je ne pense pas que les deux hommes s’aiment beaucoup. »
« Trump a une vision complètement différente de la société »
Pour Taoufik Djebali, leur vision du monde est effectivement trop lointaine. Il suffit de voir l’attaque de Donald Trump, lors de son discours d’investiture, contre les personnes transgenres, affirmant que les États-Unis ne reconnaîtraient désormais que « deux sexes, masculin et féminin ». « En France, et en Europe occidentale dans son ensemble, nous avons dépassé ces questions. Trump a une vision complètement différente de la société et il veut résoudre les problèmes, y compris les guerres, avec sa vision du monde. Les relations seront donc difficiles, d’autant plus que Trump est plus idéologique qu’avant. »
Le président américain “a clairement gagné les élections”, rappelle l’enseignant-chercheur, “donc psychologiquement, il n’est plus un “canard boiteux”. [canard boiteux]. Regardez le revirement du Parti Républicain, devenu pratiquement un parti Maga [Make america great again]. Il ne se contentera pas de petites réformes au sein de la société, il passera de l’idéologie à l’action. »
“Je comprends la position modérée de Macron pour le moment”
Evidemment, Emmanuel Macron se prépare à tout cela. Il a également répété lors de son discours aux ambassadeurs début janvier que « si nous décidons d’être faibles et défaitistes, il y a peu de chances d’être respectés par les États-Unis d’Amérique du président Trump. » En revanche, il rappelle la nécessité de « coopérer » avec le nouveau président américain. Que la France reste un « allié solide » des États-Unis.
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-« Évidemment, ce serait suicidaire pour Macron, et pour l’Europe, de rompre les liens avec le président américain », prévient Taoufik Djebali. Emmanuel Macron n’a aucun intérêt à entrer en confrontation directe avec ce président, et je comprends sa position plutôt modérée pour l’instant. Mais la situation est compliquée pour lui, car il doit entretenir des relations avec Trump tout en faisant preuve de force, notamment en renforçant l’UE. »
« La question fiscale va être un gros problème pour la France »
Pour le conférencier, « deux sujets chauds » opposeront également la France et les Etats-Unis : « la défense et l’économie ». « En matière de défense, Trump souhaite que les membres de l’OTAN augmentent leurs budgets, qui tournent actuellement autour de 2 % du PIB, à environ 5 % », rappelle-t-il. Cela impliquerait que la France dispose d’un budget militaire [actuellement de 50 milliards d’euros] environ 100 milliards d’euros. C’est impossible. Là, les choses vont bloquer, et on ne parviendra pas à trouver un arrangement avec Trump sur ce point. »
Sur le plan économique, c’est bien sûr l’intention de Donald Trump de taxer une série de produits étrangers qui inquiète les dirigeants européens. « La question fiscale va être un gros problème pour la France et pour l’Allemagne, qui exporte beaucoup de machines-outils et de voitures. Pour la France, ce sont les équipements aéronautiques, les produits de luxe, le vin… Sachant que le vin est un secteur déjà en grande difficulté. Cela va donc accentuer la crise dans ces secteurs, à un niveau qui pourrait devenir ingérable pour le gouvernement français, qui tente déjà depuis plusieurs mois de contenir la colère des agriculteurs. »
Sur ce dossier notamment, « l’Europe a tout intérêt à unifier sa position face à Donald Trump », insiste Taoufik Djebali.
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