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les habitants craignent des nuisances

Par

Emma Grivotte

Publié le

16 janvier 2025 à 16h45

La circulation sur l’autoroute A13 impose déjà un bruit de fond aux habitants de la localité de La Gohaigne, à Saint-André-d’Hébertot (Calvados). Mais c’est régulier, rien à voir avec les coups de feu que les riverains craignent d’entendre un jour. Parce que un club de tir sportif ont acheté un terrain à proximité de chez eux et ont entrepris des transformations.

Jusqu’en novembre 2024, Pascal Kerbellec-Turmel a appris par un voisin qu’un stand de tir serait prévu sur ce terrain boisé, situé à Beuzeville (Eure). Il décide d’y regarder de plus près, accompagné d’un autre riverain, Marcel Babonneau. Là, les hommes s’affairent à abattre plusieurs rangées d’arbres. Ils ont creusé un chemin et amené une excavatrice. Ils se présentent comme membres du Centre de tir sportif Porte Océane (CTSPO), club récemment évincé de ses anciens locaux du Havre. (lire ci-dessous). « Nous avons dit : « On dirait qu’il va y avoir un champ de tir » et lorsque nous avons demandé : ils étaient affirmatifs. Ils ont précisé que pour l’instant ils n’avaient pas déposé de dossier et que cela prendrait un petit an”, précisent les deux riverains.

L’inquiétude surgit. Les maisons les plus proches se trouvent à environ 250 mètres du lieu. Pascal Kerbellec-Turmel est infirmier. « Quand je travaille de nuit, je dors le jour, avec la fenêtre ouverte quand il fait chaud », explique-t-il. Il ne pouvait pas supporterentendre des coups de feu. Le professionnel de santé alerte ses voisins, ainsi que la préfecture et la mairie.

Près de Beuzeville, les habitants craignent une augmentation de la circulation si un centre de tir venait à voir le jour. ©Emma Grivotte

Ils craignent les nuisances

Voici les nuisances redouté par les riverains, une trentaine d’entre eux se sont rassemblés pour dénoncer un potentiel stand de tir :

Le bruit. Pascal Kerbellec-Turmel dénombre une quarantaine de maisons dans un périmètre de 800 m, susceptibles d’entendre les explosions. Et « il y a des animaux à côté, des moutons, des chevaux et des chiens qui aboient toute la journée », pense un autre voisin.

Augmentation du trafic. « Les voisins ont tous des enfants, entre 3 et 23 ans », souligne l’infirmière. Si un champ de tir est créé, l’augmentation de la circulation routière constituera un risque pour la sécurité des familles marchant dans leur rue.

La perte de valeur de leur maison. Si de nouvelles nuisances sonores et routières apparaissent, les habitants affirment que leurs maisons perdront de la valeur.

Un danger pour les usagers de l’autoroute à proximité. Contactée, la Sanef a indiqué n’avoir « aucune connaissance sur ce sujet ». Nous ne pouvons pas nous positionner car nous ne disposons pas d’informations précises. »

Aucun projet déclaré

Pascal Kerbellec-Turmel points l’absence de déclaration des travaux réalisés ou à venir. La préfecture lui confirme, comme Le réveil de Pont-Audemer :

A ce jour, aucun dossier pour l’ouverture d’un club de tir sportif sur la commune de Beuzeville n’a été transmis.

Préfecture de l’Eure

Idem pour le maire de Beuzeville : « Aucun dossier n’a été déposé. Les travaux effectués sont des travaux de défrichement et vous avez le droit de nettoyer votre parcelle. Le terrassement, c’est aussi le nettoyage », explique Joël Colson.

Selon le PLUi, il s’agit d’un zone agricole donc “il ne peut y avoir aucune installation”, assure le maire, qui indique à Éveil qu’il restera « vigilant autour de ce projet ».

The mayor of Saint-André-d’Hébertot, Delphine Carval Boulangera également affirmé son soutien aux habitants de Gohaigne via l’application PanneauPocket, assurant qu’elle mettra en œuvre “tout ce qui est possible pour faire […] pour que ce projet n’aboutisse pas.

Le terrain acquis par le club de tir sportif borde l’autoroute A13 ©EG

L’association dément

Contacté après avoir échangé avec la commune de Beuzeville, le Centre de Tir Sportif Porte Océane (CTSPO) conteste par l’intermédiaire de son secrétaire adjoint, Rodolphe Grillonla réalité même d’un projet.

Le club CTSPO a acquis un terrain en zone agricole, il ne peut accueillir de construction. Nous n’avons pas fait de demande, de déclaration de travaux ou quoi que ce soit. Nous sommes en train d’entretenir le terrain.

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Rodolphe Grillon, secrétaire adjoint du club de tir sportif

Il reconnaît que la création d’un stand de tir n’est pas exclue « si le PLUi change un jour, mais qu’il vient d’être changé, donc je ne vois pas comment ».

Le CTSPO recherche un emplacement (lire ci-dessous)« mais en attendant, nous sommes obligés d’avoir une base car l’adresse de notre club est chez notre président. C’est une terre agricole et nous la nettoyons. Les membres nous aident, on passe un bon moment. Nous avons amené une machine agricole pour créer un chemin. C’est un lieu de rencontre entre nous si nous en avons besoin. Il faut bien l’entretenir, après on verra ce qu’on en fera. »

Autorisations essentielles

Ce discours laisse les riverains perplexes : « A quoi ça sert de nettoyer et d’abattre des arbres sur un terrain qui ne va pas être utilisé ? » demande Pascal Kerbellec-Turmel.

«En aucun cas je n’irai tirer sur un terrain sans sécurité ou quoi que ce soit. Ce terrain est également interdit à la chasse »affirme en tout cas Rodolphe Grillon. Pour valider un stand de tir, « il faut des études de solidité et de sécurité, l’agrément du référent FFTir de la préfecture et de la Fédération française de tir ». La préfecture ajoute que cela nécessite l’accord du maire. “Dans ces conditions, et en l’absence d’informations plus précises sur le projet, je vous informe que j’émettrai un avis défavorable”, a écrit Joël Colson à la préfecture, pour rassurer les habitants.

Rodolphe Grillon précise que le CTSPO est également une association de tir à l’arc et que ses membres pratiquent également le « tir au plomb », soit avec des armes aériennes de catégorie C, soit avec des armes aériennes de catégorie D. Or, en , seul le tir avec une arme de catégorie B est réellement interdit en dehors des installations agréées. Or, dans l’Eure, l’arrêté préfectoral du 25 septembre 2014 interdit de manière générale « tout bruit gênant ».

Plusieurs dizaines d’arbres ont été abattus. ©EG

Et les arbres ?

Pascal Kerbellec-Turmel salue la rapidité des réactions de la préfecture et des mairies : « Les élus locaux ont pris en compte l’avis des habitants. »

Une autre question persiste, celle des dizaines d’arbres abattus sur les terres. Était-ce légal ? Pour le CTSPO, il peut faire ce qu’il veut sur son territoire. « Il s’agissait d’arbres couchés et morts, plantés tous les 2,50 mètres. Il y avait des arbres sur le point de tomber sur le bord de l’autoroute», explique Rodolphe Grillon.

L’Office français de la biodiversité est venu sur place pour observer les travauxaccompagné de gendarmes, et doit dresser un procès-verbal sur ce point. Le secrétaire adjoint du CTSPO invite les résidents ayant des questions à contacter le bureau de l’association : « Nous n’avons jamais refusé de parler à qui que ce soit. »

Le terrain du CTSPO Beuzeville est, selon le club, un pied-à-terre en attendant de trouver un endroit où s’installer. ©EG

“Nous recherchons un lieu accueillant pour pouvoir pratiquer sereinement nos loisirs”, demande le club de tir

Le Centre de Tir Sportif Porte Océane le sait. Trouver un nouveau lieu de formation ne sera pas une tâche facile. «Nous avons déjà une position délicate compte tenu de notre activité, souvent mal perçue, alors même qu’elle est hyper structurée et contrôlée», précise Rodolphe Grillon, secrétaire adjoint du club. Avec la réduction des terrains constructibles, particulièrement isolés, il est devenu très difficile d’ouvrir de nouveaux stands de tir.

Expulsé par la Ville du Havre

Fondé en 1990, le centre de tir a été créé à l’origine pour les besoins des forces de l’ordre, qu’il accueillait pour des formations. Mais en 2021, la mairie du Havre décide d’évincer le CTSPO. « Dans le cadre de la réhabilitation et de la revalorisation du plateau de Dollemard, la Ville du Havre a acquis, le 14 janvier 2021, un ensemble immobilier », indique une décision de la Ville, et cette acquisition a mis fin au bail du CTSPO. Le Havre a exproprié d’autres propriétaires afin de réaliser ce grand projet de renaturation au bord de la falaise.

Le centre de tir doit quitter les lieux. Le 21 octobre 2022, un jugement du juge de l’expropriation fixe le montant de l’indemnité de cession d’activité à 21 360 euros. C’est avec ces fonds que l’association a racheté le terrain de Beuzeville, indique Rodolphe Grillon.

Des travaux de terrassement ont déjà été réalisés sur le terrain. ©EG

Difficulté à trouver un nouveau logement

« La Ville du Havre n’a pas pu nous relocaliser. Nous avons rencontré les Communautés de Communes de Port-Jérôme-sur-Seine, Honfleur, et de nombreux maires de Seine-Maritime et de l’Eure… Le problème c’est que beaucoup de terrains sont classés naturels et qu’on ne peut rien y faire. », déplore le membre du bureau.

C’est pourquoi le CTSPO lance un appel: « Nous recherchons un lieu accueillant pour pouvoir exercer nos loisirs sereinement et sereinement. Aujourd’hui, nos licenciés sont obligés de payer une licence dans un club extérieur pour pratiquer leur hobby. Si quelqu’un est prêt à nous accueillir à terre, dans un immeuble ou un hangar, dans le Calvados ou dans l’Eure, nous aimerions en discuter. »

Rodolphe Grillon recalls that le tir sportif est une discipline olympique. « On peut comprendre qu’un club puisse susciter l’inquiétude, pourtant il y a plus de morts dans les accidents de la route que dans des clubs de tir comme celui-ci. Nous passons des diplômes certifiés par la Fédération française de tir », conclut-il.

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