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« Ce serait mesquin, quand on est réaliste, de parler d’espoir »

Roromme Chantal, haïtienne d’origine et politologue à l’Université de Moncton, au Nouveau-Brunswick, se souvient très bien du tremblement de terre du 12 janvier 2010.

J’ai étudié pour obtenir une maîtrise, puis je suis retourné dans mon pays. Un ami m’a appelé pour me demander si j’avais des nouvelles d’Haïtidit-il.

J’ai posé la question : quelles nouvelles ? Et il m’a dit que c’était l’apocalypse.

Une citation de Roromme Chantal, au sujet du séisme de 2010

Un séisme de magnitude 7,3 a frappé à 25 km de Port-au-Prince, la capitale haïtienne.

Le bilan est dévastateur : 280 000 morts, 300 000 blessés et 1,3 million de personnes sans abri.

Une rue de Port-au-Prince dévastée par le violent tremblement de terre du 12 janvier 2010.

Photo : Reuters / Daniel Aguilar

Roromme Chantal décrit les moments qui ont suivi comme les plus dramatiques de sa vie. Il dit s’être senti impuissant face à cette catastrophe naturelle.

Nous sommes loin de notre pays, nous aurions aimé y être et contribueril confie. Nous avons perdu des parents et des amis que nous connaissions et dont nous étions très, très proches.

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Roromme Chantal, politologue à l’Université de Moncton.

Photo : -

C’est toujours un pays auquel je suis resté attaché. Lorsque nous avons vécu une tragédie d’une telle ampleur, peu importe où nous nous trouvons physiquement, en réalité, nous ne sommes pas à l’abri des séquelles et des conséquences..

Après l’impuissance, c’est la culpabilité qui a lieu, dit Roromme Chantal.

C’est comme si nous avions abandonné notre pays, même si les conditions étaient telles qu’envisager un retour n’était pas tout à fait rationnel.

Une citation de Roromme Chantal

Neifide Antiope-Phaton, maintenant résidente de Moncton, se trouvait à Dessalines, à deux heures de route de la capitale haïtienne, lorsque le tremblement de terre a frappé.

Un incident inattendu l’avait contrainte à quitter son domicile à Port-au-Prince la veille.

Nous avons ressenti le tremblement de terre de làdit-elle. La maison que j’avais quittée la veille a été complètement détruite.

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Neifide Antiope-Phaton (à gauche) et Fabienne Innocent (à droite), deux femmes haïtiennes récemment installées à Moncton, au Nouveau-Brunswick, se trouvaient en Haïti lors du tremblement de terre.

Photo : - / BABATUNDE LAWANI

Fabienne Innocent vivait avec ses parents à 45 minutes de l’épicentre du séisme. Sa famille a évacué la maison par crainte d’un autre tremblement de terre.

Je ne vais pas dire que je vivais très bien avant le tremblement de terre, mais j’ai vécu l’enfer après.confie-t-elle.

Malgré le temps, ces deux survivants disent avoir du mal à surmonter leur traumatisme psychologique.

La fête est finie, adieu aux saints

Après le tremblement de terre, la communauté internationale a rapidement contribué aux efforts visant à venir en aide aux victimes d’Haïti.

Professeur de relations internationales et ancien fonctionnaire du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) en Haïti, Roromme Chantal constate que le pays n’était pas préparé à affronter des drames naturels.

Même avant le tremblement de terre, Haïti était un pays déjà détruit, en proie à une crise politique et à des institutions étatiques faibles.

C’est grâce au soutien inestimable de pays comme le Canada, la et les États-Unis et particulièrement de communautés comme l’Acadie que nous avons pu, dans un premier temps, faire les interventions nécessaires pour venir en aide aux survivants.dit Roromme Chantal.

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Haïti a pu compter sur un « soutien inestimable » de pays comme le Canada, selon Roromme Chantal. Sur cette photo, le premier ministre Stephen Harper visite une clinique médicale canadienne à Jacmel, le 15 février 2010.

Photo : La Presse Canadienne / Fred Chartrand

Si l’aide à court terme a été efficace, le professeur estime que l’aide internationale pour la reconstruction du pays à long terme a été plutôt décevante.

Aujourd’hui, 15 ans plus tard, le pays n’a pas été reconstruit et se trouve dans une situation encore pire. Aujourd’hui, c’est un pays qui n’existe pas.

Une citation de Roromme Chantal

Il est vrai que la tâche de reconstruire le pays incombe aux Haïtiens eux-mêmes, mais comme on dit en Haïti : une fois les vacances terminées, adieu aux saintsdéclare-t-il. Nous n’avons pas vraiment vu ni assisté à la réalisation des promesses faites.

Bandes gangs de rue et bandits en Haïti

Si vous avez déjà connu Haïti, n’y retournez pas maintenant car cela vous fera un choc terrible.dit Roromme Chantal.

Ayant grandi dans les années 1980 et ayant connu la dictature des Duvalier, il dit avoir souvent entendu au fil des années que l’espoir redonne vie à Haïti.

Quinze ans après le tremblement de terre, le règne de Michel Martelly, la montée de la violence et de la corruption laissent Roromme Chantal sceptique quant à l’avenir.

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Un membre d’un gang pose pour une photo au cimetière national, lors du festival Fete Gede, qui célèbre le Jour des Morts et rend hommage aux esprits vaudous Baron Samedi et Gede, le 1er novembre 2024 à Port-au-Prince.

Photo : Associated Press / Odelyn Joseph

Je pense que ce serait mesquin, quand on est réaliste, de parler d’espoiril décide. Ce à quoi nous assistons de ce côté-ci, c’est une descente aux enfers.

Ce que mes parents me décrivent aujourd’hui, la façon dont les gens vivent, même les animaux dans un pays comme le Canada ne pourraient pas le supporter.

Une citation de Roromme Chantal

Malgré le contrôle de les gangs action de rue sur le pays, il n’y a aucune réaction de la part des Haïtiens ni de la communauté internationale, déplore-t-il.

Selon Roromme Chantal, ce qui se passe en Haïti est un drame moral.

Ils peuvent se suicider, ils peuvent se retrouver dans leur situation, et nous n’allons pas, par exemple, envoyer nos soldats [canadiens]note-t-il, avant d’ajouter que son pays aura besoin de l’aide de la communauté internationale pour se reconstruire.

Avec les informations de Janic Godin et Babatunde Lawani

 
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