Ce métier est-il une vocation ?
Oui. J’avais envie de travailler dans la fonction publique pour être au plus près de mes concitoyens. C’est lors de mon année de volontariat dans la Gendarmerie que ma vocation s’est confirmée. Ma formation militaire a renforcé ce choix. Cela correspondait à mon tempérament, ma personnalité et mes valeurs. Nous ne choisissons pas ce métier par hasard.
Vous êtes allé en Afghanistan en 2007. Qu’avez-vous appris de cette expérience ?
J’y suis resté plus de quatre mois. Je commandais une section des transmissions. Ce fut une expérience passionnante malgré un contexte très dangereux. J’avais beaucoup de jeunes sous mes ordres. Au bout de trois semaines, un camarade d’une unité de montagne est décédé. Tous ces jeunes se sont alors rendu compte qu’ils se trouvaient dans un pays en guerre dont ils ne reviendraient peut-être pas. Humainement et professionnellement, cela a été très enrichissant.
Comment êtes-vous devenu président du groupe de Seine-et-Marne ?
J’avais demandé à commander un groupe en Île-de-France, pour concilier au mieux ma vie professionnelle et celle de mon conjoint. J’étais à la Direction générale de la Gendarmerie nationale (DGGN) depuis cinq ans et je souhaitais assumer les responsabilités de commandant de groupe conformément au cursus classique des officiers de gendarmerie. Passer commande est l’occasion de valoriser son personnel et de s’engager pleinement au service de mes concitoyens.
Quelles sont les principales caractéristiques de ce département ?
Elle est très diversifiée avec des zones extrêmement reculées, très périurbaines, rurales et agricoles. Plus de 70 % du territoire est en zone gendarmerie. Les défis sont donc variés et nombreux.
Quel premier bilan faites-vous ?
Nous avons beaucoup travaillé sur les violences conjugales et la lutte contre toutes les formes de trafic. Nous avons également fait un très gros effort en matière de sécurité routière. Concernant la délinquance générale, notre taux d’élucidation est supérieur à la moyenne nationale. Nos militaires sont très impliqués et mènent de grandes enquêtes. Il y a une dynamique avec des jeunes gendarmes qui ont l’envie de servir et prennent en compte toutes les dimensions de leur métier. La Gendarmerie véhicule une bonne image dans ce département. Nous avons des valeurs qui nous guident au quotidien.
Les chiffres de la sécurité routière ne sont pas bons avec une hausse des accidents mortels cette année…
Une vie perdue est toujours une tragédie. Nous multiplions cependant les actions préventives comme le réglage des phares des véhicules lors du changement d’heure d’hiver ou le réglage du guidon pour les motocyclistes. Il s’agit de contrôles de sensibilisation, c’est-à-dire sans verbalisation. Nous faisons le même travail pour les travaux sur les autoroutes. Le commandant de l’escadron départemental de sécurité routière est très impliqué. Au fil du -, nous avons encore fait d’énormes progrès.
Vos effectifs sont-ils suffisants ?
Nous ne sommes jamais assez nombreux, c’est le même constat pour tous les groupes. J’aimerais par exemple avoir des renforts à Nangis (théâtre d’événements d’actualité graves ces derniers mois, NDLR). C’est un sujet soulevé par nos parlementaires et auquel de nombreuses personnes sont sensibles. Nous disposerons de deux nouvelles brigades mobiles à Nemours en 2025 et à Beton-Bazoches en 2027, ce qui fera 48 unités territoriales au total. Le ministre de l’Intérieur (Bruno Retailleau, ministre démissionnaire, NDLR) nous assurait récemment qu’il y aurait une augmentation des effectifs. C’est une bonne nouvelle.
Comment se traduit la sécurité au quotidien ?
Par une présence importante sur la voie publique. Mon objectif, c’est de voir des gendarmes qui entrent au contact et non des voitures qui traversent les communes. Je souhaite qu’ils puissent communiquer avec nos concitoyens pour que l’information circule. C’est aussi une manière de rassurer la population.
La violence domestique est donc une priorité. Quels sont vos outils ?
Il y avait un groupe d’enquête et de protection des familles (Geprof) à Coulommiers. J’ai décidé d’en créer un deuxième à Meaux en septembre et il y en aura un troisième début janvier à Melun. Ces personnels sont dédiés à ce type de litiges et savent prendre en charge les victimes. Cela permet de traiter ces dossiers en priorité.
A quel niveau se situe la délinquance ?
C’est plutôt stabilisé. Cette année, il y a eu 6 071 atteintes aux biens contre 5 988 en 2023. Les plus préoccupants sont les vols de matériel subis par les agriculteurs (84 cambriolages de janvier à novembre, ndlr). Les atteintes intentionnelles à l’intégrité physique ont augmenté de 13 %, mais ce taux est inférieur à celui du niveau national.
Un mot sur la lutte contre la drogue ?
Le « stup Uber » prend beaucoup d’ampleur, mais nous parvenons régulièrement à démanteler les réseaux. Nous avons réalisé 22 359 dépistages cette année, soit une augmentation de 29,54% par rapport à 2023. Les infractions se sont stabilisées.
Vous avez déclaré : « Je ne suis pas dans un rôle, je sais me faire comprendre ». Qu’est-ce que cela signifie?
Quand on est patron, il faut être soi-même. J’essaie d’être un leader juste, qui décide et écoute. Nous bénéficions toujours d’être proches de ceux que nous commandons. On travaille toujours quand on a du respect pour son patron, j’en suis fermement convaincu. C’est toute la magie d’être humain. Un leader porte ses gendarmes, mais l’inverse est aussi vrai. C’est l’obéissance dans l’amitié.
Tu sais ce que tu veux…
Je suis très attaché aux valeurs militaires et j’essaie de donner du sens à notre action. Nos jeunes générations sont exigeantes et nous devons montrer l’exemple en étant à leurs côtés dans les moments difficiles. Malgré un planning extrêmement serré, j’aime être proche de mes policiers pour comprendre leurs difficultés. Je veux être à la hauteur de leurs attentes.
La rivalité avec la Police Nationale existe-t-elle vraiment ?
Non, je déteste la concurrence malsaine. Entre nous, ça marche très bien. J’ai énormément de respect pour mon homologue, Laurent Mercier. Le préfet se voit donner l’image d’une gendarmerie et d’une police unies. Faire la guerre est impossible et serait improductif. Sinon, on oublie l’essence même de notre mission qui est de protéger nos concitoyens.
Comment jugez-vous votre carrière ?
Je suis pleinement épanoui, car je voulais commander un groupe. Gérer près de 1 000 gendarmes et 550 réservistes est parfois compliqué, mais il est important de maintenir une proximité. J’ai probablement fait des erreurs, mais c’est ce qui m’aide à devenir meilleur. Je suis fier de ma police. Je cite souvent Antoine de Saint-Exupéry : « Pour bien commander ses hommes, il faut les aimer. » Je m’efforce de le faire tous les jours.
NOMBRES
- 1 escadron départemental de sécurité routière.
- 5 compagnies départementales de gendarmerie (Melun, Coulommiers, Fontainebleau, Meaux et Provins). Il existe également 5 sociétés de réserve.
- 26 brigades territoriales réparties dans tout le département.
- 48 unités de soutien opérationnelles et spécialisées.
- 355 les communes sont couvertes parle groupement de gendarmerie de Seine-et-Marne sur les 507 que compte le département.
- 550 les militaires constituent la réserve opérationnelle.
- 943 des militaires intégrés au groupement de gendarmerie de Seine-et-Marne.f
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