Liam Rosenior ne possède sans doute pas, dans sa bibliothèque, de volumes racontant l’histoire de Calais. Ni le souvenir qu’entre 1347 et 1558 – jusqu’à la libération de la ville portuaire par Henri II – ses ancêtres britanniques avaient fait de ce coin de France un territoire acquis à la perfide Albion. Mais le technicien strasbourgeois, Londonien dans l’âme, sait que « la magie de la coupe » – expression qu’il a lancé samedi soir, dans les dédales du Stade de l’Epopée – avait parcouru les 32 kilomètres séparant les falaises de Douvres de la plage de Calais. “ Je pense que vous avez aussi cette formule ici, dit le jeune quadragénaire. Calais a montré une belle image du Football en termes de caractère, d’attitude et nous a donné du fil à retordre. En fin de première période, on commençait à être tendu et heureusement Karl-Johan (Johnsson) j’ai fait cette très belle sauvegarde. »
C’est à ce moment-là, alors que le doute et le frisson d’un soir de coupe commençaient à planer dans le ciel de Calais au milieu de rafales de vent à désorienter une mouette, que le gardien alsacien se détendit (0-0, 39e).e). « Si on donne cette pénalité, ce n’est pas le même résultata rejoué Olivier Laridon, l’entraîneur du Racing Club de Calais (N3). Mais nous ne le saurons jamais. » Au retour des vestiaires, Andrey Santos sur corner (0-1, 57e) puis Sékou Mara à deux reprises (0-2, 73e ; 0-3, 89e) ont finalement extrait les leurs d’une toile de piégeage malgré la différence de quatre divisions. Après avoir salué sa famille dans les salons VIP du quartier de Calais, Olivier Laridon a adressé un dernier sentiment : « Nous avons rendu les gens heureux, je pense. »Régler la dette
C’est qu’à Calais, le souffle du plaisir footballistique a été pendant près de 15 ans (32 dernierse en 2009) hors du radar. Des années sombres marquées par le sceau des querelles de clocher, des largesses financières et de l’incapacité chronique à redresser la situation. Entré dans l’imaginaire populaire au printemps 2000, le CRUFC (Calais Racing Union Football Club), épouvantail de quatrième division et finaliste de la Coupe de France (après avoir battu Lille, Cannes, Strasbourg et Bordeaux avant de s’incliner dans les derniers instants contre Nantes au Stade de France), était l’étendard d’une ville. Un phare, jusqu’aux relégations administratives et licenciements de dirigeants valant plusieurs dizaines de milliers d’euros qui ont conduit l’entité – bien qu’elle aussi quart de finaliste en 2006 – devant les tribunaux ainsi qu’à la liquidation judiciaire en septembre 2017. Natacha Bouchart (divers droite) jure que « le CRUFC s’est suicidé ».
Longtemps, les oreilles de l’élu résonneront de ce jour où le robinet municipal a été coupé. “ Dès 2010, j’ai récupéré un club placé en procédure de sauvegarde avec un million d’euros de detterappelle aujourd’hui l’édile. Nous tenons le CRUFC à distance chaque année. Mais à un moment donné, le poids de la dette était trop lourd et il a fallu dire stop. ” et ” chagrin » pour Bouchart et un traumatisme pour des générations de Calaisiens bercés par des soirées d’euphorie à Julien-Denis, chaudron du centre-ville (jusqu’à 4 000 spectateurs en moyenne en CFA), à un moment les supporters pouvaient quitter le stade à la mi-- direction le bistrot du coin pour reprendre des forces pour revenir chanter un quart d’heure plus tard.
Fusion express
La liquidation ouvre une nouvelle ère. Un mélange de vide, d’espoirs, de passation de pouvoir difficile dans une ville de 67 000 habitants où la crise migratoire braque trop souvent les projecteurs et où cohabitent au moins dix clubs de quartier. “ Ramener tout le monde à la table n’a pas été facile », agrees Natacha Bouchart. The Calais journalist Baptiste Vendroux hatched the project “ Calais Ambition 2030 », et cet Arlésien issu d’un grand club reprend du poids. Marseille a son « subventions » chaque été, Calais son « Grandclub » tous les six mois. ” Ils m’ont ri au nez à ce moment-là », se souvient encore le maire. Les dirigeants qui, jusqu’à présent, ne regardaient pas dans la même direction ne détournent plus le regard. Et comme ici, tout est une histoire de fusion (comme la naissance du CRUFC, en 1974), Grand Calais Pascal (issu d’un club centenaire) et Calais Hauts-de-France imaginent le Racing Club de Calais à l’été 2023 .
Aujourd’hui, on compte 700 licenciés, une hausse en N3 par rapport à la première saison acquise l’été dernier devant 6000 supporters et une moyenne de 1500 à 2500 spectateurs en championnat. “ C’est allé très vite », analyse Nicolas Bouloy, néo-président du Racing qui emprunte les couleurs historiques du football calaisien, noir-jaune-rouge. Nicolas Bouloy, c’est 38 balais», trois heures de sommeil par jour », holding de 14 sociétés informatiques pour une cinquantaine de salariés, passionné de football capable de poursuivre simultanément deux licences (à Montrouge en région parisienne, et Brêmes-les-Ardres dans la campagne calaisienne) pendant ses études. Cet entrepreneur hyperactif – numéro 10 lorsqu’il jouait – énumère « Ronaldo, Beckham, Zidane » ou le « grand Real de l’époque » en référence, déguste des frites au stand Xercès chez Bollaert et promet que « le jour où je n’apporterai plus rien à Calais, je quitterai les lieux. Je ne peux pas imaginer une présidence de 20 ou 25 ans, comme Aulas et Martel où l’après a été compliqué « . Le directeur sportif Sylvain Jore – entraîneur du CRUFC dans les années 2000 – en parle comme d’un « grand professionnel », le principal intéressé y voit un « Je veux faire avancer le club avec des gens qui ne sont pas là par intérêt. Nous faisons des erreurs et nous en ferons encore, mais nous devons nous améliorer pour que cela ne soit pas gaspillé. Aujourd’hui, il faut se renforcer avec un directeur financier par exemple. Calais n’a pas un grand historique professionnel (une saison en D2 en 1981, NDLR), mais cette ville doit au moins être en N1. Dans deux ou trois ans, si on arrive déjà à rester en N3 ».
Calais n’est pas « Qatar du N3 »
Inutile de lui parler de Ligue 2. » c’est une étape importante » ce à quoi Dunkerque a réussi et pourrait faire à nouveau de Boulogne (leader de N1), les deux références voisines, une réalité. ” Si nous voulons des ambitions, nous devons nous armer d’investisseurs locaux. Aujourd’hui, l’économie calaisienne est peut-être plus en difficulté pour le monde professionnel. Mais la Nationale 1 est possible », estime-t-il. Derrière sa bonne gueule, le patron suscite l’humilité, ne veut pas entendre parler » Qatar vous N3 » selon ses détracteurs en raison du budget de 850 000 à 900 000 euros (dont 30 % de subventions municipales, contre 50 % la saison précédente) et souhaite faire disparaître les horreurs des opérations opaques du passé. Aujourd’hui, les contrats fédéraux (avec quelques Calaisiens, des décrocheurs de centre de formation et l’ex-Lyonnais Claudio Beauvue toujours en activité) répartissent la masse salariale entre 1 000 et 2 000 euros par mois selon le président : « On n’attend pas l’argent public et en plus, il sert à la formationinsiste le gérant. Les enfants qui allaient à Boulogne avant restent avec nous maintenant. »
L’objectif aussi est de ne plus regarder systématiquement vers l’arrière : « L’histoire fait que pendant des années, on continuera à parler de l’épopée 2000 et nous étions tous fiers d’être Calaisiens à cette époque. Mais aujourd’hui, le succès de la fusion n’est pas celui de CRUFC. Nous nous effaçons de cette histoire, même si nous lui aurons toujours un grand respect. C’est à nous d’écrire le nôtre maintenant. “Pas cette année, mais contre Strasbourg” les joueurs ont pu mesurer l’importance de la Coupe de France, ici », apprécie Sylvain Jore. Le - d’une soirée, en réminiscence d’une ferveur trop longtemps contenue, 11 000 silhouettes ont convergé de Calais Nord, du centre-ville, des quartiers populaires, vers le stade de l’Épopée. Lequel, depuis son inauguration en septembre 2008, n’avait pas accueilli une telle affluence pour le club phare. “ J’ai tout vécu à Calais : les épopées, les ascensions et finalement être mis de côtétermine le directeur sportif. Là, le train avance. » En espérant qu’il ne déraille plus.
Les Verts peuvent-ils redorer leur blason ?