l’essentiel
Les élections à la Chambre d’agriculture de janvier 2025 verront les syndicats prendre position sur des sujets majeurs. Après la viticulture et les maladies dans les élevages, voici le 3ème volet consacré au développement des énergies renouvelables.
« La souveraineté alimentaire doit primer sur la souveraineté énergétique », c’est sans doute un sentiment partagé par l’ensemble des représentants syndicaux agricoles, et plus largement par l’ensemble de la profession. Mais l’agriculture doit jouer son rôle dans le développement des énergies renouvelables. Sous certaines conditions évidemment, qui diffèrent d’un syndicat à l’autre. Qu’en pensent leurs managers ?
CONFÉDÉRATION PAYSANNE. Sylvie Colas, secrétaire nationale et porte-parole du Gers.
Nous voulons un schéma énergétique local. De quoi avons-nous besoin, quelle est la vocation du Gers ? Pour nous, il s’agit de produire des aliments locaux, nourrissants, plutôt que de sacrifier nos terres pour produire de l’énergie. Nous ne pouvons pas mettre la production souveraine de nourriture en concurrence avec la production d’énergie. Nous n’avons jamais été opposés au photovoltaïque sur les toits des bâtiments agricoles. Au contraire, si cela apporte de l’autonomie.
En revanche, nous sommes totalement opposés au photovoltaïque au sol au détriment des terres agricoles. Cela va à l’encontre de l’installation des jeunes, notamment en augmentant les prix, tuant le paysage…
Par ailleurs, nous sommes très inquiets du développement des projets de méthanisation. Il existe un plan régional qui prévoit entre 30 et 40 projets dans le Gers. Il y aura donc des usines tous les 7 km. Parce que ce sont des usines à gaz, au propre comme au figuré. Nous sommes complètement en concurrence avec la production alimentaire pour produire de l’énergie.
JEUNES AGRICULTEURS. Clément Souques (responsable énergies renouvelables).
Pour nous, le photovoltaïque est un moyen d’être plus résilient dans les exploitations agricoles. Nous souhaitons que chacun puisse bénéficier d’un bâtiment solaire pour le stockage, pour améliorer ses conditions de travail, etc. Que la valeur ajoutée reste chez les agriculteurs. Si nous occupons tous les toits agricoles, nous atteindrons les objectifs fixés par le gouvernement.
Sur le terrain, l’agrivoltaïsme, si le projet est conforme à la loi, la libre entreprise prime. Mais nous disons qu’une bonne terre doit rester productive.
Concernant la méthanisation, la charte de la Chambre d’Agriculture soutient la méthanisation comme une nouvelle filière, pour la valorisation des cultures associées. On ne fabrique pas de maïs pour le mettre dans un méthaniseur, sauf s’il s’agit d’une culture secondaire. Si c’est pour faire comme en Allemagne et faire du maïs qui ira à 100 % dans un méthaniseur, c’est un non catégorique.
COORDINATION RURALE. Lionel Candelon, président départemental.
Nous sommes plutôt favorables à l’équipement des toitures agricoles, avec la revente d’énergie pour l’agriculture. Et ce n’est pas comme cela se fait aujourd’hui. Cela servira à sécuriser la trésorerie, avec un revenu financier. Nous voulons un bâtiment solaire par ferme. L’agrivoltaïsme est plus complexe. Il y a des zones qui en ont besoin, où les terres finiront de toute façon en jachère. Il faut essayer de maîtriser l’agrivoltaïsme avec un vrai projet agricole.
La méthanisation nécessite de développer certains projets, à petite échelle, pour les agriculteurs. Nous ne voulons pas de super digesteurs de méthane, monopolisés par les grands groupes. On parle de 30 à 40 projets dans le Gers, mais il faut rester lucide, c’est trop, il nous faut 5 à 10 projets. Mais cela reste une question de revenus. Si les céréales étaient mieux payées, si elles apportaient de réels revenus à l’agriculteur, ce type de projets n’aurait pas besoin. C’est donc nécessaire mais raisonnable.
MODEF. Lucie Lafforgue, présidente départementale.
Nous sommes favorables au développement des énergies renouvelables, si bien sûr cela ne nécessite pas de terres agricoles. Comme tout le monde, nous encourageons l’installation de panneaux sur les bâtiments agricoles plutôt que sur les terres arables.
Nous essayons de défendre cela, le but de l’agriculture est de vendre le produit de sa terre.
Sur la digestion anaérobie, nous y sommes plutôt favorables, à condition de n’y mettre que des déchets, pas de la nourriture, tant pour les humains que pour les animaux. L’enjeu est là, nous y restons favorables, mais nous craignons que cela entraîne une perte de céréales pour les agriculteurs qui devront les acheter. Les agriculteurs chercheront des revenus là où ils le peuvent, nous le comprenons, même si cela nous inquiète.
FDSEA. Marianne Dutoit (renewable energy manager).
Nous défendons d’abord une agriculture de production économiquement viable, vivable et durable. Notre mission première est de nourrir. Mais il est possible de tirer des revenus supplémentaires de nos opérations.
Nous disons oui au développement, nous n’allons pas laisser passer le train, mais de manière maîtrisée et en sécurisant les enjeux collectifs, à savoir nourrir, renouveler les générations, avoir accès à la terre, et avoir une rémunération pour notre production alimentaire. La priorité est aux toitures professionnelles et aux espaces artificiels. La valeur ajoutée est aujourd’hui captée par des tiers et ne revient pas aux agriculteurs.
Il est important pour nous de dire oui à ce développement si cette valeur ajoutée revient aux agriculteurs et au territoire. C’est la même chose avec la méthanisation. Dans le Gers, ce que nous souhaitons, c’est que cela continue comme les premiers projets qui existent déjà en valorisant nos déchets.
Tous ces projets nécessitent une véritable planification car il est hors de question que le premier arrivé soit premier servi, car on sait déjà aujourd’hui que cela bloque l’installation de nouveaux agriculteurs.
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