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La Belgique, un petit eldorado pour les cosmétiques belges ?

En Belgique, il existe plus de 50 marques de cosmétiques belges. Et de nouveaux arrivants apparaissent constamment. La plupart se positionnent comme des acteurs souhaitant promouvoir une beauté durable. Et attirent de plus en plus de Belges. Revenons sur les raisons de ce succès.

C’est sans doute l’un des chiffres les plus encourageants révélés par l’enquête menée par Le Vif Weekend en octobre dernier : plus d’une Belge sur quatre déclare acheter des produits cosmétiques belges. Et peut-être qu’ils sont encore plus nombreux puisque 64% avouent ne pas connaître l’origine exacte des marques qu’ils privilégient.

Malgré une énorme concurrence internationale, le terrain belge semble donc propice à l’entrepreneuriat dans le secteur de la beauté. Notre magazine, qui s’intéresse depuis toujours aux entrepreneurs locaux, est constamment à la recherche de ces nouveaux acteurs – en grande majorité des femmes, mais pas que – qui décident un jour de lancer la marque dont ils ont toujours rêvé.

Effet « faites-le vous-même »

Le cosmétologue Frédérick Warzée, responsable de la communication chez Detic, l’association belge des producteurs et distributeurs de cosmétiques, explique de différentes manières ce dynamisme indéniable. « Depuis plusieurs années, le « do it yourself » a le vent en poupe, notamment dans le domaine des cosmétiques. Les marques vous proposent d’acheter des kits pour réaliser vos crèmes à la maison, vous pouvez suivre des ateliers. Cela a sûrement contribué à donner des idées à ceux qui souhaitaient un jour créer leur propre marque.

Autre avantage et non des moindres : l’existence sur le sol belge de secteurs de production et de recherche qui mettent leur savoir-faire au service des entrepreneurs. « Il n’est donc pas nécessaire de savoir le formuler soi-même pour se lancer », poursuit Frédérick Warzée. Ces entreprises mettent à votre disposition un produit sans label spécialement fabriqué selon vos souhaits tout en respectant la législation en vigueur en Europe. Il ne vous reste plus qu’à y ajouter votre nom. L’important pour commencer est de trouver comment se démarquer – en commençant par un ingrédient rare ou une histoire personnelle qui permettra à la marque de construire son story narratif. »

Dès le départ, Anne-Sophie Charle a tenu à puiser ses atouts dans les sous-produits des vignes Chant d’Eole.

Un secteur saturé

Comme le pense également Anne-Sophie Charle, la fondatrice de Maison Eole, la marque de soins visage et corps qui s’apprête à fêter son troisième anniversaire, l’enjeu n’est pas tant de réussir son lancement que de réussir à asseoir sa notoriété.

« Nous avons toutes les compétences en Belgique pour assurer une fabrication de qualité de A à Z », reconnaît-elle. Mais c’est aussi un secteur complètement saturé – par les acteurs classiques déjà et les nouveaux arrivants qui ne sont pas tous belges d’ailleurs. A la tête de beaucoup de ces marques, on retrouve souvent des passionnés de cosmétiques qui ont voulu un jour créer un produit qu’ils ne trouvaient pas sur le marché. Au début, cela permet peut-être de réaliser un projet de vie personnel, d’en vivre même dans le meilleur des cas. Mais c’est très difficile de tenir la distance. Si on veut créer de la valeur, des emplois, on est obligé à un moment ou à un autre de produire de gros volumes pour arriver à un prix de revient acceptable.»

Attention à l’essoufflement

Se professionnaliser en quelque sorte, ce qui implique souvent un business model complètement différent de celui des débuts. Si les difficultés de démarrage ne semblent pas insurmontables, c’est sur le long terme que se situe le problème. “Surtout chez ceux qui n’ont pas su se projeter suffisamment dans l’avenir en pensant dès le départ un circuit de distribution plus large que le site Internet sur lequel ils se sont lancés et le financement d’une production amenée à devenir de plus en plus importante”, souligne Frédérick Warzée qui voit souvent les marques s’essouffler au bout de trois ans. Et ce même lorsque la qualité est au rendez-vous.

Lorsque nous avons commencé notre recensement des principales marques belges de cosmétiques publié en marge de notre enquête, nombre d’entre elles semblaient avoir le même dénominateur commun : la volonté de proposer des produits les plus naturels possibles, de préférence fabriqués de manière durable. en Belgique. Une dimension locale que notre expert est obligé de relativiser.

Des matériaux rarement belges

«Bien sûr, les sites de production peuvent être implantés ici, mais il est quasiment impossible de fabriquer des produits cosmétiques uniquement à partir d’ingrédients belges», admet-il. En termes de durabilité, l’impact environnemental de l’approvisionnement est nettement moindre pour un produit cosmétique que celui de l’utilisation des ressources – eau et énergie – nécessaires à sa fabrication et à son utilisation. Sa biodégradabilité est également essentielle.

L’argument « made in » au moment du départ est également très relatif. Seules 7% des femmes se disent sans hésitation « prêtes à payer un prix plus élevé » pour un produit belge, contre 62%… « dans une certaine mesure ».

Chez Miglot, à Gand, chaque étape de production est contrôlée en interne, depuis la création du parfum par Kristof Lefebre, le fondateur, jusqu’à la mise en bouteille des flacons en atelier.

A la Maison Eole pourtant, Anne-Sophie Charle a insisté dès le départ pour que le plus grand nombre possible d’actifs présents dans ses cosmétiques soient des produits issus du vignoble familial d’où sont issus les flacons de Chant d’Eole. Elle a travaillé en étroite collaboration avec des universitaires locaux pour optimiser au mieux la valorisation de ce qui était jusqu’alors considéré comme des « déchets » issus de la production des fameuses bulles multi-primées que l’on retrouve désormais sur les plus belles tables gastronomiques du pays.

L’expertise du pharmacien

« Nous avons immédiatement lancé 16 produits pour proposer une offre diversifiée et nous avons immédiatement mis l’accent sur la distribution en pharmacie parallèlement à nos ventes dans la boutique du domaine et sur notre site afin de poser immédiatement les bases de notre développement futur, rappelle-t-elle. Le pharmacien est un professionnel de santé de confiance, le plus à même de discuter de produits basés sur des recherches scientifiques complexes. Il ne choisit également pour sa pharmacie que les gammes auxquelles il croit et pour lesquelles il est tombé amoureux.

Une relation de confiance qui se noue également avec les utilisatrices : comme le révèle notre enquête, quatre Belges sur 10 achètent leurs soins du visage en pharmacie. Kristof Lefebre connaît bien ce secteur pour avoir travaillé des années en pharmacie avant de lancer la marque de parfum Miglot il y a près de 5 ans. Il a pu observer le va-et-vient de petites marques de soins.

Attention à la taille critique

«J’ai eu l’occasion de superviser en coulisses de petites entreprises belges de cosmétiques», analyse-t-il. Très souvent, je constatais que la viabilité n’était pas au rendez-vous car ils n’avaient que peu de produits et en même temps, l’investissement nécessaire était trop important pour eux. Pour être rentable lorsque vous vendez de la crème solaire ou du rouge à lèvres, vous devez les vendre et donc en produire beaucoup dans un premier temps. Si vous avez par exemple six produits et que vous en fabriquez 10 000 de chacun, cela représente un investissement énorme à réaliser en une seule fois. Même si vous espérez pouvoir les vendre, vous devez également prévoir un endroit pour les stocker. »

En choisissant le parfum, Kristof Levebre, qui s’apprête à ouvrir début décembre une deuxième boutique-atelier à Anvers, n’a pas seulement réalisé son rêve d’enfant. Il s’est également assuré de pouvoir vivre durablement de sa passion. “L’accès au marché est très différent de celui des autres marques belges de cosmétiques”, poursuit-il. Nous avons choisi de garder une distribution restreinte. Et de produire quasiment à la demande. Comme je suis également parfumeur, je contrôle chaque étape de production. C’est pourquoi nous disposons désormais d’une gamme de 22 parfums sans avoir des milliers de flacons en stock. Nous savons également ce qui se vend le mieux et notre production s’adapte aux goûts de nos clients. »

De niche mais pas trop

C’est aussi sur leur parfum que les femmes se disent prêtes à dépenser le plus : plus de 70% des personnes interrogées dans notre enquête acceptent d’y consacrer plus de 50 euros et même plus de 100 euros pour 16% d’entre elles. Et deux fois par an. « Notre positionnement nous permet d’être ni dans le créneau du luxe inaccessible à beaucoup, ni dans le marché de masse où la concurrence est énorme », se réjouit Kristof Lefebre. Avec un parfum, vous établissez également un lien plus fort avec votre client en tant que marque. C’est moins interchangeable qu’un rouge à lèvres qu’on peut trouver à 3 euros ou 60”.

Malgré le Covid qui a pu légèrement ralentir son business plan comme pour la plupart des acteurs du secteur, notre parfumeur se dit très satisfait de la croissance organique de Miglot. « J’ai eu la chance de pouvoir faire de ma passion mon métier », conclut-il. Et de créer une entreprise rentable sans avoir cherché à combler un vide sur le marché dans le seul but de gagner de l’argent.»

C’est peut-être là que réside le succès des entrepreneurs belges de la beauté qui réussissent à s’imposer au fil du temps : la volonté de proposer avant tout un beau produit, le plus durable et le plus qualitatif possible. En vous donnant le temps dont vous avez besoin pour le faire.

 
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