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“Les réponses sur la table ne sont pas les bonnes”, estime le député paysan Benoît Biteau

DDébut janvier, Gabriel Attal avait à peine eu le temps de s’installer à Matignon que la colère des agriculteurs saturait déjà tout l’espace politique. Onze mois plus tard, son successeur Michel Barnier n’a plus que dix semaines avant d’être rattrapé par l’exaspération d’un monde agricole encore à bout de souffle. Et ce lundi devrait marquer le début d’un nouveau bras de fer avec l’exécutif.

La FNSEA a en effet appelé à une mobilisation nationale qui concernera bien sûr le Sud-Ouest, avec des actions prévues en Gironde, dans les Landes, en Dordogne et en Lot-et-Garonne. Au sommet des revendications, l’éternelle question des revenus. Pourtant, en février, après un peu plus d’un mois d’actions d’une ampleur inédite, les agriculteurs avaient obtenu plusieurs avancées : l’abandon de la hausse prévue de la taxe sur le gazole non routier (GNR), des mesures de simplification pour la construction de bâtiments d’élevage ou des projets de stockage d’eau, et surtout la pause du plan Écophyto qui visait à réduire l’usage des pesticides.

Le compte n’est pas là

Mais, cet automne, le compte n’est toujours pas là, souligne Benoît Biteau, le député écologiste et agriculteur bio de Charente-Maritime : « Et pour cause, les réponses sur la table ne sont pas les bonnes. En janvier, les agriculteurs se sont d’abord mobilisés sur les revenus – mais sans les syndicats. Ce n’est qu’ensuite que la FNSEA et la Coordination rurale ont pris le contrôle et imposé leurs revendications : la suppression de la hausse de la taxe sur le GNR, les produits phytosanitaires… Sauf que ces sujets ne résolvent pas le problème des revenus. La preuve, le mouvement reprend. »

“Il n’y a pas de mesures concrètes qui contribuent à améliorer les revenus”

Agronome de formation, il se montre également très critique sur la fin du plan Ecophyto : « Les expériences montrent qu’en réduisant de moitié les pesticides, la production reste la même, voire augmente. Et, au niveau comptable, nous avons une amélioration de 200 euros par hectare. Sur une exploitation de 100 hectares, cela représente 20 000 euros. » Il assure : « Il n’y a pas de mesures concrètes qui contribuent à améliorer les revenus. Quant aux aides européennes de la Politique Agricole Commune (PAC), 81 % ne vont qu’à 20 % des plus gros agriculteurs, et ce sont eux qui négocient… »

Du coup, parmi les partisans du gouvernement, on observe la situation de près : « Oui, ça peut faire bouger les choses, observe un député macroniste, car les agriculteurs attendent des réponses immédiates alors que les problèmes sont structurels. »

Mercosur

De son côté, Michel Barnier a multiplié les signes d’apaisement. Vendredi, le Premier ministre s’est montré catégorique au micro de Bleu : « Je ferai tout ce que je peux », ajoutant : « Toutes les promesses faites aux agriculteurs qui ont manifesté en début d’année seront respectées. » Un engagement d’autant plus compréhensible que cette poussée de fièvre heurte une situation déjà éruptive, avec l’examen du projet de loi de finances dont l’ambition est de réduire les dépenses publiques de 40 milliards d’euros. Sans parler des débuts, mardi, du Congrès des maires, avec lequel la communication menace également d’être coupée.

Benoît Biteau reste cependant sceptique quant aux propos du Premier ministre : « Même s’il tient ses promesses, à quel moment cela va-t-il mettre de l’argent sur le compte en banque ? Je ne crois pas que ce gouvernement osera remettre en question le système. Or, les aides publiques doivent être redistribuées sur la base des unités de travail et non plus des unités de surface, c’est pourquoi plus on a de surface, plus on a d’aides. Ensuite, il faut distribuer l’aide non plus pour perfuser un modèle agricole moribond mais pour accompagner ses évolutions. L’argent public doit servir l’intérêt commun. En Europe, 12% des surfaces cultivées relèvent encore de l’agriculture familiale et agroécologique et elles représentent 32% de la production européenne. C’est de cette agriculture que dépend la souveraineté alimentaire. »

Mais pour Michel Barnier, cette colère des agriculteurs pourrait aussi être alimentée par des décisions extérieures. Et plus précisément les discussions qui s’ouvriront ce lundi au G20 de Rio, où se jouera l’avenir de l’accord avec le Mercosur, un traité commercial entre l’Union européenne et les pays d’Amérique latine que jouera la France. refusé. « En tant qu’eurodéputé, j’étais contre tous ces traités de libre-échange », rappelle Benoît Biteau. Il déclare : « Le Mercosur poussera les agriculteurs encore plus loin dans la crise. » Si cet accord finit par être signé après vingt-cinq ans de négociation, leur colère n’en sera que renforcée.

 
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