Le maire socialiste de Marmande Joël Hocquelet a peut-être refusé de louer une salle à Jordan Bardella, mais le patron du Rassemblement national se présentera en terrain conquis pour son meeting du dimanche 10 novembre à Tonneins. La commune voisine lui a ouvert ses portes ainsi qu’aux 2 000 sympathisants attendus par le parti lepéniste. Quel homme ou femme politique aujourd’hui pourrait rassembler autant de monde un dimanche après-midi dans le Lot-et-Garonne ?
Il faut dire que cela faisait cinq ans que Jordan Bardella ne mettait pas les pieds dans le département. Une éternité en politique. A l’époque, le président du RN avait déjà gagné les européennes. Avec à ses côtés, en deuxième position, une certaine Hélène Laporte, devenue en 2022 députée du Marmandais. Aujourd’hui, Jordan Bardella revient avec le drapeau du RN bien planté dans cet ancien bastion de la gauche dont les murs s’effritent vote après vote. Aux dernières élections européennes, le RN est arrivé en tête dans toutes les communes du département. Quant à Hélène Laporte, elle a raté de peu sa réélection dès le premier tour.
« Aujourd’hui, nous comptons environ 500 adhérents à jour de leurs cotisations. C’est historique »
« Nos idées bénéficient d’un élan national. Mais ces résultats s’expliquent aussi par un travail de terrain qui porte ses fruits», estime la députée lot-et-garonnaise à la veille d’accueillir sa championne dans sa circonscription. « Je réponds personnellement à tous les emails qui m’ont été adressés, je reçois tout le monde à mon bureau, quelle que soit l’étiquette. J’aide les personnes ayant des problèmes d’accessibilité à la fibre ainsi que des problèmes de taxe foncière. C’est à cela que sert le travail local, et c’est payant. »
Campagne permanente
Serait-elle la seule dans le Lot-et-Garonne à jouer la carte du contact direct ? Probablement pas. En revanche, le RN est peut-être le dernier parti à pratiquer la stratégie de campagne permanente, électorale ou non. « Pour nous, le remorquage porte à porte, c’est toute l’année. Nous étions au marché du Passage il y a quelques jours, nous venons de faire le marché de Marmande. La politique à l’ancienne parle aux gens», assure Sébastien Delbosq. Le délégué départemental du RN va plus loin : « Les Français adorent parler politique. Donc, même s’ils ne sont pas d’accord avec nous, ils aiment ça, et moi en premier. Aujourd’hui, nous sommes les seuls à le faire. »
Le conseiller régional a vu les rangs du parti d’extrême droite grossir rapidement dans le département. « Nous étions une centaine en 2017. Aujourd’hui, nous comptons environ 500 adhérents à jour de leurs cotisations. C’est historique. » Des militants s’empressent de remorquer, de poser des affiches, de labourer ces terres agricoles dans de grandes souffrances. Avec une seule instruction, ne répondez pas aux attaques.
Fabrice Valenduc en fait partie. Lui, l’ancien responsable technique de la centrale de Golfech. Trente-cinq ans de CGT. Issu d’une famille ouvrière du Nord où tout le monde était « communiste rouge de rouge ». « Aujourd’hui, j’habite à Foulayronnes, dans une ville bourgeoise. Mais au fond, je suis toujours pro-ligue», raconte le retraité de 65 ans qui a voté Le Pen pour la première fois en 2017 et qui pose aujourd’hui les affiches. « J’ai voté à gauche jusqu’à Hollande. Je suis pour le travail, pas pour la paix sociale que l’on achète avec l’aide sociale. La gauche a abandonné les travailleurs. Le prolétariat du futur pour elle, c’est l’étranger », affirme-t-il tout en se revendiquant de gauche, « mais d’abord pour mon pays ».
Il y a aussi Philippe Alex. Cet ancien d’Horizons et ancien partisan du député macronien Michel Lauzana a rejoint le RN au printemps. « J’en avais marre du décalage entre les constats faits en interne sur la sécurité et l’immigration et les discours publics où on ne dit pas ce qu’on pense. » A 64 ans, le militant attend la retraite dans quelques mois pour s’engager pleinement auprès de Sébastien Delbosq.
Beaujolais Nouveau
Ces fidèles que le RN chouchoute et entraîne se retrouvent tous les deux mois pour des rencontres plutôt festives. « Nous faisons appel à une personnalité nationale du parti. Et puis on essaie de changer de secteur. » Les prochaines retrouvailles auront lieu fin novembre à Dolmayrac, avec au programme la fête du Beaujolais nouveau.
Confiant en sa solidité, le parti ouvrira dans quelques semaines un bureau permanent à Agen. Un siège où les membres pourront se réunir en dehors des campagnes électorales et où sera stocké le matériel de propagande. « Nous sommes devenus un parti de militants, pas encore un parti d’élus locaux. Mais nous espérons que cela changera avec les élections municipales de 2026 », prévient Sébastien Delbosq.
Hormis le geste de rébellion du maire de Marmande, qui a reçu sur Facebook un « soutien total » du PS lot-et-garonnais, seul le Collectif antiraciste de Tonneinquais se mobilise pour organiser un rassemblement, dimanche dès midi derrière le poste. bureau de Tonneins.
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