D’une simple pression du pied, Régis Moriceau fait disparaître sa botte dans la terre meuble de son champ. “Voir? Si le sol ne nous soutient pas, cela ne vaut même pas la peine d’y introduire une machine. » A la tête du Gaec La Chemillière, à Pierrefitte, l’éleveur des Deux-Sévrien sait de quoi il parle. La dernière fois qu’une ensileuse est entrée sur sa parcelle, le 8 octobre “nous avons dû le retirer avec un tracteur”. Trois semaines plus tard, le 29 octobre, le terrain restait impraticable.
« Sur quatre-vingt-six hectares, nous en avons récolté dix »
« Sur 86 hectares, nous en avons récolté 10 »rapporte Pierrefittois. Dans sa main, un épi de maïs mûr depuis plus de dix jours. Bon à l’ensilage, mais impossible à récolter. “Le taux d’humidité est d’environ 70%”alors qu’elle ne devrait pas dépasser 40 %. Avec un cumul de pluie supérieur à 300 millimètres entre le 15 septembre et le 15 octobre, les vendanges s’avèrent difficiles, voire impossibles, pour les agriculteurs des Deux-Sèvres.
Il y a deux ans, nous ramassions le maïs fin juillet à cause de la canicule, et maintenant nous allons devoir le faire début novembre.
Régis Moriceau, breeder Pierrefitte
Si la météo fait partie intégrante du métier, ils se retrouvent confrontés à la fréquence et à l’intensité croissantes des aléas climatiques. « Il y a deux ans, nous ramassions le maïs fin juillet à cause de la canicule, et maintenant nous allons devoir le faire début novembre »résume Régis Moriceau. A tel point que dans de nombreuses exploitations agricoles des Deux-Sèvres, l’année 2024 est considérée “catastrophique”.
En témoignent les résultats de la Coopérative d’Utilisation du Matériel Agricole (Cuma) de La Fontaine, forte d’une trentaine d’adhérents : sur un total de 470 000 hectares de maïs à ensiler, seuls 150 000 ont pu l’être en octobre. 29 , rapporte le secrétaire de la FDSEA 79, Thierry Bernier. Cet éleveur de Luché-Thouarsais risque de ne plus pouvoir semer pour la deuxième année consécutive.
Plantés tardivement, en juin 2024, ses trente-trois hectares de maïs ne sont pas encore arrivés à maturité, retardant ainsi la récolte et la plantation des plants d’automne. De quoi attrister l’éleveur, qui vient d’importer pour 10 000 euros de paille afin de “remplacer les céréales qui n’ont pas pu être récoltées cet été”.
Pour ne rien arranger, certaines cultures du Nord-Deux-Sèvres ont été stoppées par les épisodes venteux de septembre et octobre derniers. Souhaitant garder l’anonymat, un éleveur de Gâtine déplore la perte d’une dizaine d’hectares de maïs, destinés à nourrir son bétail. « Je dois rapporter l’équivalent d’un mois et demi de nourriture, alors que d’habitude je suis indépendante. »
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Il s’agit, en pourcentage, de la baisse de la production de céréales à paille enregistrée en 2024 par rapport à la moyenne des cinq années précédentes, selon le ministère de l’Agriculture.
Animaux malades
Surtout, plusieurs de ses bovins sont émaciés ou infectés par des vers gastro-intestinaux, dont la fréquence augmente avec le changement climatique, «des étés particulièrement pluvieux et humides». Inquiet des éventuelles pertes économiques qui pourraient en résulter, il a appliqué deux antiparasitaires à son élevage, pour un coût total de plus de 8 000 euros.
Plusieurs agriculteurs prévoient de se mobiliser dans les prochaines semaines. Le 30 octobre, plusieurs panneaux villageois du Nord-Deux-Sèvres ont mystérieusement disparu, rappelant l’opération “On marche sur la tête” orchestrée par les principaux syndicats agricoles, un an plus tôt, pour solliciter le soutien de l’État.
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