Avec 38 morts et plus de 400 blessés sur les routes de l’Eure depuis le début de l’année, des chiffres en forte hausse par rapport à 2023, on aurait pu penser qu’Alexandre Rassaërt, le président du conseil départemental, jouerait la carte de la prudence. Mais c’est le raisonnement inverse qui l’a poussé à annoncer en début de semaine qu’il allait voter en février 2025 le retour à 90 km/h sur l’ensemble des quelque 4 000 km de routes départementales dont il a la charge. . charge : « Nous avons maintenant six ans de recul sur la mesure et, ce que nous constatons, c’est que limiter la vitesse à 80 km/h ne fonctionne pas : le choc psychologique ne s’est pas produit pour changer le comportement des conducteurs et nous avons même constaté un augmentation significative du nombre de blessés sur les routes. »
Il compare également les 38 morts de 2024 au chiffre de 2017, « la dernière année à 90 km/h, où l’on a déploré 33 morts sur toute l’année ». Il faudra encore attendre début 2026 pour que l’Eure rejoigne la cinquantaine de départements pour bénéficier de l’assouplissement sur la vitesse permis par la loi d’orientation des mobilités promulguée le 26 décembre 2019.
Ce que Pauline Jouvenaux, la directrice régionale de l’association Sécurité routière, ne voit pas d’un bon oeil : « Alors que la situation s’est dégradée sur les routes de l’Eure en 2024, nous sommes à un an noir, nous décidons d’augmenter la vitesse ? Nous ne serons pas d’accord, c’est sûr. » Chiffres à l’appui, elle pointe les conséquences d’une augmentation de 10 km/h des véhicules. « Cela augmente la distance de freinage de 13 m, soit la longueur d’un camion. Cela réduit le champ de vision. Et, schématiquement, plus l’accident se produit à une vitesse élevée ou mal adaptée, plus les conséquences sont graves : d’une blessure légère on passe à une blessure grave, d’une blessure grave on passe à un décès. « .
Pour elle, il est plus que probable que la commission départementale de sécurité routière, qu’il faut contacter avant le passage effectif à 90 km/h, rendra un avis défavorable à cette demande. Mais ce ne sera que consultatif. Et surtout, il ne reflétera certainement pas l’avis des automobilistes européens, comme l’espérait la majorité départementale qui a lancé une pétition en ligne dans la foulée de son annonce pour apporter de l’eau au moulin de son leader : « Ce qui tue sur la route, c’est la drogue, l’alcool, la somnolence, le téléphone et la vitesse excessive des automobilistes », affirment les élus de son groupe, qui ajoutent « la voiture est le principal moyen de mobilité dans l’Eure. S’ils ne garantissent pas une meilleure sécurité aux usagers, les 80 km/h favorisent surtout les amendes et la crainte des usagers de perdre un si précieux permis de conduire.
Autant d’arguments que Pauline Jouvenaux a déjà entendu. « Réduire la vitesse n’est jamais populaire et cela suscite le mécontentement des automobilistes. Mais toute la difficulté en matière de sécurité routière est de montrer ce que l’on évite, les accidents qui n’arrivent pas. Si les résultats 2024 ne sont pas bons dans l’Eure, c’est lié à de multiples facteurs. Et il va falloir y réfléchir. Mais augmenter la vitesse, c’est prendre un risque supplémentaire », prévient-elle.
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