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«Tout un parcours à construire»

« Il fallait trouver notre expert. C’est pour ça que ça a pris du temps», explique Nadine Rousselot, directrice de l’Office des Premiers Peuples à l’Université Laval.

Annoncée cette semaine, dans le cadre de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, la formation en langue innue offerte par l’Université Laval aura finalement lieu à la mi-octobre. Déjà en 2020, lors du dépôt du plan « En action avec les Premiers Peuples », l’Université Laval disait entreprendre la création d’un cours de langue innue.

De tradition orale, l’Innu s’intègre difficilement dans les prérequis du système éducatif actuel, souligne le directeur. Il n’existe, pour l’instant, aucun matériel pédagogique, aucun programme pédagogique et trop peu d’experts pour assurer le remplacement des enseignants et la tenue des cours sur le long terme.

« Il faut prendre le temps de concevoir un programme et devenir un expert car il n’y en a pas. Il faut commencer quelque part.

— Nadine Rousselot, directrice de l’Office des Premiers Peuples à l’Université Laval

La formation non créditée en langue innu est donc considérée comme un projet pilote. « Il faut former les gens. L’université doit être là pour faciliter l’accès aux diplômes et pour que les gens puissent développer des programmes de formation pédagogique en langues autochtones. C’est tout un parcours à construire », explique le réalisateur.

« Ce que nous voulons, c’est susciter l’intérêt des étudiants à poursuivre leurs études pour éventuellement devenir de futurs enseignants-intervenants »

— Nadine Rousselot, directrice de l’Office des Premiers Peuples à l’Université Laval

Le directeur prévoit, dès la première version de la formation, de trouver un étudiant intéressé à assister l’enseignant en place afin d’éviter de se retrouver « dans une impasse ». Comme la relève est rare, « il faut déjà l’anticiper », explique-t-elle.

D’abord « dédiée exclusivement » aux étudiants des Premiers Peuples pour assurer une augmentation du nombre de conférenciers, la formation sera éventuellement accessible à tous les étudiants de l’Université Laval.

Autres formations à suivre

Mme Rousselot, elle-même Innue de Pessamit, estime que le manque historique de reconnaissance des langues autochtones est à l’origine des difficultés rencontrées.

« À cause d’un système qui ne nous a jamais profité, nous perdons rapidement de futurs locuteurs des Premiers Peuples. C’est triste», murmure-t-elle. “Nous sommes soumis au système.”

Même si l’Office des Premiers Peuples a finalement mis la main sur un enseignant ilnushakueu expérimenté prêt à élaborer un programme et à concevoir du matériel, le défi demeure.

Le développement de cours sur d’autres langues autochtones se heurtera forcément aux mêmes problématiques. « Il faut maintenant trouver des experts partout, dans tous les conseils de bande. Nous avons besoin d’un expert en technolinguistique atikamekw, d’un expert en anishinabe, d’un expert en wendat », énumère-t-elle.

« C’est pourquoi nous établissons des partenariats interuniversitaires. Nous courons tous après les technolinguistes des langues indigènes », explique la réalisatrice, qui ajoute qu’elle ne veut pas « surcharger les experts ».

Se conformer aux normes

Le réalisateur critique les normes linguistiques imposées par les autorités gouvernementales qui influencent également la lenteur du processus.

“Nous n’avons pas un gouvernement qui soit favorable ou qui veuille trouver des voies de passage”, estime-t-elle. «Nous avons le plan En action avec les Premiers Peuples“, mais maintenant nous devons changer le système.”

Le pavillon Jean-Charles-Bonenfant abrite le Cercle des Premiers Peuples. La mise en place de cet espace de sécurité culturelle s’inscrit dans le cadre du plan En action avec les Premiers Peuples. (Archives Le Soleil)

Elle appelle le gouvernement à établir des « mesures transitoires » qui faciliteraient le développement de la formation et le parcours des étudiants autochtones. « Pouvons-nous accueillir les universités ? Pouvons-nous faire des exceptions transitoires pendant que nous assemblons notre équipement ? demande-t-elle.

Mme Rousselot condamne notamment les « échelles linguistiques européennes » auxquelles doivent se conformer les formations linguistiques. « Je suis prête à aller de l’avant avec les règles linguistiques d’outre-mer, mais d’abord, je dois être comprise dans ma langue et nous devons justifier la manière dont nous envisageons de catégoriser ma langue », traduit-elle. après avoir d’abord expliqué sa façon de penser en innu.

Que le début

“C’est un processus qui va être encore très long, mais au moins on le démarre”, se réjouit Mme Rousselot.

Le directeur de l’Office des Premiers Peuples souhaite mettre en place « un microprogramme et peut-être même un certificat en langues autochtones ».

« Il est impensable pour nous qu’à l’école de langues il y ait beaucoup de cours de langue, mais pas de cours de langues autochtones », souligne-t-elle. «Nous aussi, nous avons une histoire à raconter.»

Deux heures par semaine pendant 10 semaines, la formation non créditée en langue innu débute le 15 octobre à l’Université Laval.

 
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