News Day FR

une visite surprise oblige la prison à s’expliquer

Par

Renaud Vilafranca

Publié le

30 septembre 2024 à 20h25

Voir mon actualité
Suivre 78actu

Après le drame survenu cet été à l’établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) de Porcheville (Yvelines), deux sénateurs ont fait valoir leur droit de visite. Ce lundi 30 septembre 2024, Ghislaine Senée (EELV), élue dans les Yvelines, et son homologue parisienne, Anne Sourys, ont poussé les portes de cette prison de 59 places, inaugurée en 2008, accompagnées de journalistes. Le lieu était le théâtre, le le 18 août dernierdu suicide d’un jeune détenu de 16 ans, retrouvé par un gardien pendu dans sa cellule au petit matin.

“Hé Madame la sénatrice, faites-moi sortir !” » De grands cris, et parfois même des insultes, ont éclaté du fenêtres grillées auxquels pendent des yo-yos au passage de la petite délégation au pied des immeubles.

L’adolescent était incarcéré depuis le 21 mai

On a beaucoup parlé de ce décès au cours de la trois heures où les deux sénateurs ont pu visiter les lieux et parler librement au personnel et aux détenus. Ainsi, nous avons appris que cet adolescent était incarcéré depuis le 21 mai 2024, dans l’attente d’un procès en appel pour des faits qui ne nous ont pas été précisés. Il était soumis à un régime de détention classique, seul en cellule, comme ses codétenus, mais faisait l’objet d’une « surveillance spécifique adaptée » en raison de faiblesses psychologiques.

Ainsi, comme c’est l’usage avec cet appareil, le agents pénitentiaires avaient renforcé leurs rondes autour de lui et jetaient un œil par le judas de sa cellule « toutes les trois heures » pour s’assurer que tout allait bien. Une pratique qui n’a normalement lieu que la nuit. « La surveillante venue vérifier ce soir-là n’a rien constaté d’anormal », a assuré Souad Benchinoun, la directrice, aux sénateurs qui l’interrogeaient sur le sujet.

La cellule de protection d’urgence, destinée aux détenus suicidaires. ©Jean-Baptiste Lachenal
Vidéos : actuellement sur Actu

Paradoxalement, il n’a pas été placé cellule de protection d’urgence. Construite en 2024, cette petite pièce est conçue pour laisser la personne enfermée à l’intérieur sans possibilité d’attentat à sa vie. Des bulles de plexiglas protègent les téléviseurs et les luminaires, les fenêtres ne s’ouvrent pas, le lit est solidement fixé dans un coffrage aux bords arrondis et tout est prévu pour que les détenus ne puissent pas se pendre. Le séjour à l’intérieur est limité à 24 heures, dans l’attente d’un traitement médical.

«Le jeune n’a pas été identifié comme étant en crise suicidaire», précise le directeur. “Il avait pourtant lancé un signal d’alarme”, estime Anne Sourys.

Difficultés identifiées par les médecins

Les difficultés psychologiques ont en tout cas été clairement identifiées par les personnel médical. Le docteur Lissette Lopez Marin, médecin urgentiste à l’EPM, l’avait vu en consultation trois jours avant son suicide. « Tout le personnel pénitentiaire s’est impliqué dans sa santé mentale », a-t-elle assuré aux sénateurs. Il a été suivi par le psychologue de la prison. On ne pouvait pas prédire son suicide, comme c’est malheureusement souvent le cas. »

Durant ces trois heures, le directeur de l’établissement a fait visiter l’établissement aux parlementaires. ©Jean-Baptiste Lachenal

La question du continuité des soins dans un territoire frappé par une pénurie de médecins, ce dossier se pose encore. Le psychologue et l’urgentiste étaient tous deux en vacances au moment du drame. « Nos infirmières prennent le relais, elles sont formées pour ça », a assuré le cadre soignant, présent lors de l’entretien.

L’absence de pédopsychiatre depuis 2020, dans cet établissement où vit une population vulnérable dans un environnement précaire, a également été pointée du doigt par les deux élus écologistes. “Non”, a répondu le docteur Lopez Marin. Son état ne nécessitait pas de traitement psychiatrique. »

Lorsque cela est jugé nécessaire, l’administration pénitentiaire procède à des extractions pour amener les détenus sous escorte en ville pour consultation. Concernant ce jeune homme, aucune action en ce sens n’a pas été entrepris.

Un échange avec des détenus

Les sénateurs ont également pu discuter longuement avec trois jeunes prisonniersà la fin d’une activité de pâtisserie à l’unité d’habitation. « On m’a dit qu’il ne se sentait pas bien depuis quelques jours, mais le psychologue n’était pas là », raconte un adolescent à la voix rauque et au regard vif. “Pour moi, il faudrait être plus attentif aux détenus, moins méchants avec eux”, dit-il aussi, provocateur. «Quand on ne se sent pas bien, on peut se faire aider», tempère son camarade, un grand type au comportement calme.

Ghislaine Senée et Anne Sourys, devant l’EPM de Porcheville, qui accueille actuellement 53 détenus pour 59 places. ©Renaud Vilafranca

Après les événements, le parquet de Versailles et l’administration pénitentiaire ont chacun ouvert une enquête pour faire la lumière sur cette tragédie. En 2023, une tentative de suicide a été recensée dans l’établissement, contre aucune cette année.

Cette inspection, autorisée par une loi de 2000, s’est également concentrée sur la scolarité de ces jeunes. Derrière ces hauts murs surmontés de barbelés, salles de classe et professeurs les accueillent pour les mettre au courant et leur permettre de retourner à l’école à leur sortie. Ils disposent également d’un CDI, d’une bibliothèque, d’une médiathèque et une mini entreprise de fabrication de savon a même été créée pour assurer le étapes dans l’enseignement professionnel. « Un rapport a montré que le taux de réussite au baccalauréat est bon ici », a souligné Ghislaine Senée.

Suivez toute l’actualité de vos villes et médias préférés en vous abonnant à Mon Actu.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :