Vincent Thommelin, pouvez-vous d’abord nous parler de votre parcours ?
Originaire du Jura, j’ai grandi à Séligney près du Deschaux. J’ai étudié au lycée de Dole puis en classe prépa à Dijon puis en école de commerce à Toulouse avec un double diplôme avec Sciences po. Depuis 2021, je travaille comme collaboratrice parlementaire de Danielle Brulebois. Depuis un an et demi, je suis président de l’association Du Jura aux Grandes Écoles, association créée en 2022. C’est une déclinaison départementale de la fédération Des Territoires aux Grandes Écoles, fondée en 2017. L’objectif est d’accompagner les jeunes. Habitants du Jura dans leur orientation, l’association a pour objectif de rassembler une communauté d’étudiants et de diplômés de tous âges souhaitant agir pour promouvoir l’égalité des chances dans le Jura et œuvrer à son développement.
D’où vient cette envie de soutenir les jeunes ?
J’ai remarqué que beaucoup de mes camarades avaient abandonné des cours parce qu’ils étaient mal orientés, notamment vers les grandes écoles. Quand j’ai fait mon stage dans un cabinet ministériel, j’ai vu les chiffres de l’accès aux grandes écoles pour les ruraux, ça m’a révolté. Grâce à un autre Juranais Christophe Boillon, nous avons créé cette association dans le but de promouvoir les études de longue durée et d’accompagner les jeunes ruraux qui souhaitent accéder à ces études.
Combien de branches départementales de cette fédération existe-t-il ?
Nous sommes 55 aujourd’hui. Celle du Jura a été créée il y a trois ans, Christophe Boillon en a été le président avant moi.
Quelles sont vos actions ?
Le cœur de nos actions sont les interventions auprès des premiers et finissants étudiants pour présenter notre association et nos actions et présenter également les chiffres qui sont édifiants. Un étudiant parisien a trois fois plus de chances d’accéder à une grande école (commerce, ingénierie, IEP, sciences po…), notamment via les concours. L’inégalité est encore plus grande chez les non-Île-de-France. Dans ces grandes écoles, la moitié des élèves sont issus des grandes villes alors que les lycéens des grandes villes représentent 20 % en France et alors que le niveau des lycéens est à peu près le même entre Dole, Saint-Claude et Paris 18.e.
Comment expliquez-vous ces chiffres ?
Nous faisons trois observations. Tout d’abord, l’autocensure qui est un facteur que l’on retrouve très régulièrement. Ils ont les capacités, les bons fichiers mais il y a toujours le « c’est pas fait pour moi ». C’est dommage car les jeunes ruraux font souvent de très bons profils.
La distance aux secteurs est également importante. Dans le Jura, si on veut faire une classe préparatoire, il faut quitter le département. Cela peut être une source de stress d’un point de vue financier.
La question des finances est très importante. Il faut pouvoir trouver un logement, sans compter le coût de la vie, etc.
-Quelles sont vos autres actions ?
Mentorat. Dans nos échanges, certains étudiants n’osent pas remettre en question. Cela permet un accompagnement plus personnalisé. Le but est d’accompagner l’étudiant dans son parcours, quel stage choisir, quelle filière choisir…
Cette année, nous souhaitons mettre en place un système de bourses d’excellence en partenariat avec le Crédit Agricole. Lorsque l’on discute avec les parents, l’aspect financier est toujours le premier critère qui revient.
Combien de bénévoles avez-vous ?
Nous sommes sept. L’association vit à travers ses membres. Nous accueillons volontiers les nouveaux membres. Il existe de nombreux et merveilleux parcours d’étudiants jurassiens très sensibilisés à cette problématique. Je les encourage à me contacter. Dans l’association, nous sommes sur deux à avoir des jeunes diplômés, mais aussi des personnes encore étudiantes. Pour s’identifier, il est plus facile pour les jeunes lorsque leurs mentors sont encore aux études ou viennent d’arriver sur le marché du travail.
Trois membres travaillent à Paris, les autres étudient à Lille, en Allemagne… Avant les vacances de Noël, nous travaillions au lycée Considérant à Salins-les-Bains, nous retournons régulièrement dans le Jura.
Réussir, c’est ne pas travailler dans le Jura ?
Non pas du tout. C’est une très bonne question. Nous voulons promouvoir l’égalité des chances, mais aussi promouvoir les territoires. L’association est jeune et on ne peut pas tout faire, mais nous essayons aussi de favoriser le retour des jeunes dans le Jura car il y a plein de belles choses à faire. Cela passe aussi par recréer du lien avec les entreprises… On peut réussir partout, le premier objectif étant d’être heureux et dans le Jura on peut l’être. Notre message c’est juste de dire aux jeunes de faire ce qu’ils veulent et de le faire à fond, pas forcément d’aller à l’université, ce n’est pas du tout notre sujet ni le message que nous voulons faire passer. Il y a aussi plein de beaux sentiers à faire dans le Jura en dehors des grandes études.
Contact on social networks: Instagram djge39, Facebook page Du Jura aux Grandes Ecoles and linkedin.