Mercredi 15 janvier 2025 au tribunal judiciaire de Besançon dans le Doubs a eu lieu la signature du protocole relatif à l’amélioration de la prise en charge des enfants dans le cadre des homicides conjugaux. Nous allons vous l’expliquer.
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« Il n’y a pas de pire malheur pour un enfant que de perdre l’un de ses parents dans des circonstances aussi violentes ». Pour parler de la prise en charge des enfants dans le cadre des homicides conjugaux et principalement dans le cas des féminicides, Patricia Lime, représentante de Christine Boutin, présidente du département du Doubs, choisit ces mots et cite Simone Veil.
Afin de ne pas ajouter malheur sur malheur, le département du Doubs et ses acteurs politiques, judiciaires et médico-sociaux ont signé mercredi 15 janvier un protocole relatif à l’amélioration de la prise en charge des enfants touchés par la perte d’un parent. , lorsque ce dernier est tué par le deuxième parent. Objectif : éviter une prise en charge empirique des mineurs et professionnaliser leur prise en charge dès la constatation des faits.
Depuis janvier 2024, le tribunal de grande instance de Besançon, l’ARS, la gendarmerie du Doubs, le département du Doubs, le CHU de Besançon, le centre hospitalier de Novillars et le Conseil général travaillent sur le développement de ce protocole. L’objectif est triple. Débouchant sur une action urgente, le protocole permet d’identifier le cadre d’action de chaque action, d’organiser également une hospitalisation immédiate et systématique et enfin de permettre une évaluation immédiate de la situation globale de l’enfant et de son entourage.
“Nous sommes partis du constat que dans le cadre des dossiers judiciaires sur le département et notamment sur les homicides conjugaux, lorsqu’un conjoint commet un homicide sur son conjoint, la question de la prise en charge des enfants se pose”, présente Alain Troilo, président du tribunal d’instance de Besançon. « Sous l’impulsion de Christine de Curraize, l’idée était de réfléchir à une meilleure prise en charge des enfants ». Christine de Curraize est la procureur adjoint au parquet de Besançon.
Les enfants sont considérés comme des victimes de violence domestique. Avant, c’était juste des témoins.
En six ans, trois féminicides impliquant des enfants ont eu lieu dans le département du Doubs. Le 30 octobre 2018, un ressortissant d’origine afghane a été poignardé sur la voie publique (lire à nouveau notre article). Son compagnon, qui avait pris la fuite, avait été extradé. « Ce couple avait deux enfants et il fallait les accueillir en urgence » recalls Etienne Manteaux, public prosecutor of Besançon.
Le 6 septembre 2022, à Morre, une femme a été abattue par son compagnon à leur domicile. L’homme s’est ensuite suicidé en retournant l’arme contre lui. « Les enfants se sont retrouvés au retour de l’école avec la gendarmerie devant chez eux. Avec ce cas, nous avons pris conscience que la gestion ne devait pas être empirique, mais qu’il fallait un protocole. » précise le procureur de la République.
Récemment, le 25 juillet 2024, une dame a été étranglée par son mari qui s’est ensuite suicidé en incendiant le domicile conjugal. “Il avait trois enfants dont un mineur dont il fallait s’occuper”.
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Concrètement, « Nous avons fourni aux enquêteurs des fiches réflexes, des éléments de base à considérer : les vêtements de secours, la couverture de confort, le carnet de santé. Des choses pour qu’il y ait le moins de perturbations possible pour le mineur”, précise Etienne Manteaux. Suite au drame, les enfants seront directement pris en charge par les services hospitaliers de pédiatrie et de pédopsychiatrie du CHU de Besançon et du centre hospitalier de Novillars.
Il existe des blessures psychologiques réelles et intenses qui doivent être traitées immédiatement. Nous avons tendance à le cacher.
Christine de Curraize est procureure adjointe au parquet de Besançon
Pendant trois à cinq jours en moyenne, un SAS, service d’accès aux soins, permet aux enfants de se détendre et d’être pris en charge par des professionnels de santé. Un temps bénéfique qui permet à l’ASE d’évaluer les solutions familiales.
Il apparaît que souvent en cas d’urgence les enfants sont confiés à une tante elle-même en deuil, c’est très compliqué en termes de prise en charge. Elle va vite se retrouver en difficulté.
Cette durée d’hospitalisation permet aux familles de recevoir des nouvelles sans avoir à s’occuper directement des enfants. A l’issue de ce temps d’évaluation, le juge des enfants sera contacté et décidera de ce qui convient le mieux aux mineurs. Une solution familiale sera recherchée en priorité.
Dans ce type de situation, « Il est très important d’évaluer les environs, car il y a des interdictions. Le SAS permet de répondre aux questions de l’enfant, car dans la famille comme dans la famille du père, ils ne pourront pas forcément poser de questions ou juste les proches ne pourront pas répondre parce qu’ils souffrent trop », précise Christine de Curraize. Ce type de protocole existe déjà dans d’autres départements et a été initié en Seine-Saint-Denis, à Bobigny.
Ce protocole très pratique reste flexible. Le choc peut nécessiter une hospitalisation plus longue ou à l’inverse une adaptation du protocole. Pour le féminicide de l’été 2024, le protocole en construction a été activé. « L’adolescent a eu beaucoup de mal à être hospitalisé. Nous n’étions pas du tout rigides. Il voulait faire son deuil avec sa famille et il a pu aller voir son frère et sa sœur qui étaient adultes. assure-t-elle. A l’issue de cette hospitalisation, les enfants poursuivront leur soutien psychologique.