Après des semaines d’intenses négociations, le Premier ministre français François Bayrou tiendra ce mardi son discours de politique générale devant une Assemblée nationale fragmentée. L’intervention du nouveau chef du gouvernement, nommé le 13 décembre par Emmanuel Macron, sera non seulement cruciale pour sa survie à ce poste – sans être censuré comme son prédécesseur Michel Barnier – mais aussi pour la transition écologique.
Tous les voyants sont au rouge, alertant les scientifiques et les organisations environnementales. Car dans une période d’incertitude politique et économique, les particuliers et les entreprises retardent leurs décisions. La vente de pompes à chaleur s’est effondrée ; la construction de pistes cyclables a ralenti, tout comme le déploiement de nouveaux transports publics. Pire encore, estime Anne Bringault, directrice des programmes au Réseau Action Climat, « on constate par exemple que les ventes de véhicules électriques stagnent. Ceci est en partie lié aux flottes des entreprises. Les entreprises ne jouent pas le jeu des véhicules qu’elles achètent pour leurs propres besoins. Et la France est également très en retard en matière de rénovation énergétique des logements. Dès qu’il fait plus froid, on utilise donc plus de chauffage, ce qui veut dire plus de fioul et plus de gaz fossile. ».
La planification écologique passe au second plan
Ces difficultés peuvent surprendre. Depuis deux ans et demi, le France avait adopté une planification écologique, censée placer la transition au cœur de toutes les décisions politiques. Mais le brouhaha d’instabilité qui a suivi la dissolution de l’Assemblée nationale a éclipsé l’urgence climatique au profit d’autres sujets, comme la sécurité ouimmigration. A cela s’ajoutent les contraintes budgétaires liées au déficit public de la France. Pour combler un trou de 60 milliards d’euros dans les caisses de l’Etat, Michel Barnierle prédécesseur de François Bayrouprévu également de réduire drastiquement les primes allouées à la rénovation énergétique, à l’achat de véhicules électriques mais aussi au fonds vert, un mécanisme pour financer la transition écologique des collectivités locales. Si ce projet de budget tombe en même temps que le Premier ministre Barnier, il reflète tout de même un manque de cohérence politique au regard de l’objectif que s’était fixé la France, à savoir : une réduction de 55 % de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.
Les émissions de gaz à effet de serre repartent à la hausse en France
« Les effets sont très concrets. Depuis le troisième trimestre 2024, les émissions de gaz à effet de serre repartent à la hausse en France », déplore Anne Bringault. « On voit donc bien que cette instabilité fait que les mesures politiques ne sont pas mises en œuvre, que les budgets ne sont pas alloués à la transition écologique. Et le résultat, malheureusement, c’est que la France perd l’avance qu’elle avait en matière de transition écologique. ».
Le discours de François Bayrou ce mardi après-midi sera particulièrement scruté par les autorités locales chargées de mettre en œuvre la majorité des projets d’atténuation et d’adaptation. changement climatique. « Les communes, départements et régions français ont augmenté leurs dépenses climatiques de 44 % entre 2017 et 2022 », note François Thomazeau, directeur du programme Communautés et adaptation aux changements climatiques à l’Institut d’économie pour le climat, qui craint que de mauvaises décisions politiques n’entraînent un arrêt brutal de cette dynamique pourtant cruciale.
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