Miguel Gomes nous emmène dans un « Grand Tour » éclair

Une évasion magnifique

Edward (Gonçalo Waddington) fuit Rangoon en Birmanie et prend subitement un bateau pour Singapour. Et puis, de fil en aiguille, des trains, des bateaux et des ânes pour parcourir Bangkok, Hanoï, Tokyo et Bandung… Assez malade sur ce chemin, on se demande à quoi ça ressemble. Est-il un espion de Sa Majesté ? En réalité, il fuit sa fiancée Molly, venue de Londres bien décidée à l’épouser.

Au-delà des clichés

Il y a des paysages, de la végétation, des instruments de musique, des chefs spirituels et de l’opium. Et pourtant, le film de Miguel Gomes évite l’écueil de montrer des photos de vacances. Nous sommes en 1917, à l’heure où l’Europe s’automatise sur le front et où le fantasme de sa domination demeure dans les Empires… Et pourtant, c’est le début de la fin. Le consul anglais à Bandung, réfugié à la campagne, dit : « Nous partirons d’ici sans rien comprendre. »

Du grand Miguel Gomes

Miguel Gomes, qui a travaillé à distance pour la plupart de ses repérages, en raison de la fermeture de la Chine pendant le COVID, parvient à proposer son « culte » en noir et blanc depuis Tabou (2012) et à l’agrémenter de couleurs. Certaines images et insignes d’aujourd’hui se fondent dans le grain vintage de la photo. Quant aux langues, elles sont espiègles : le portugais est parlé partout avec assurance par les personnages et la voix off change selon le pays que l’on « visite ». Finalement, le road movie se transforme en comédie du milieu et la répétition de certaines images et de certains lieux perturbe toutes les certitudes les plus rassurantes.

Une belle réflexion sur la fin de l’Empire

Le Beau Danube Bleu du Grand Tour répond maintenant à la chevauchée Valkyrie d’Apocalypse. Le ténor chante seul Verdi dans la cabine du capitaine, que tout le monde a désertée. Et Miguel Gomez propose, avec douceur et ironie, une réflexion à la fois puissante et fine sur la colonisation et sa fin. Un film qui doit être récompensé au 77ème Festival de Cannes.

 
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