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Postes à Lausanne

Des centaines de bornes, visant à ralentir la circulation automobile en rétrécissant les voies, sont apparues à Lausanne, provoquant des débats.

Chronique Publié aujourd’hui à 21h31

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Comme c’est une guerre, on attend que le premier meure. Il ou elle finira empalé sur le poteau, sacrifié, les bras croisés sur le bitume, on entendra juste le sifflement d’une roue de vélo électrique qui tourne dans le vide. A moins que ce soit un enfant qui s’écrase contre le poteau et qui jaillit du siège du vélo. Mais ouf, pendant que la tête du bambin se renverse lentement dans une flaque d’eau au sol, le Sabacaucho X-Last à mémoire de forme agira comme si de rien n’était, et se tiendra aussi gris et droit que si l’accident n’avait pas eu lieu.

Il faut rendre à Césarine ce qui lui appartient. C’est notre ancienne et excellente collègue Francine Brunschwig qui a mis en lumière l’affaire des bornes à Lausanne, il y a quelques semaines, dans un texte brillant dans « 24 Heures ». Depuis, un flot de lettres. Plutôt contre lesdits posts, parfois car, si vous êtes un piéton, je présume : la guerre est là, tapie. De quoi s’agit-il, vous qui habitez ailleurs qu’à Boboville ?

Achetés 300 francs pièce, sans pose, chez un fabricant barcelonais, des centaines de poteaux gris foncé, d’environ 1 mètre de haut, sont apparus en quelques mois comme de l’eczéma urbain à Lausanne. Combien exactement ? C’est là que réside l’opacité. Le responsable assure ne rien savoir de leur nombre, et donc du montant total des dizaines ou centaines de milliers de francs ainsi dépensés, car les postes sont gérés projet par projet. Mais à quoi servent ces petites choses laides et phalliques ? Pour « protéger » la population, éviter les arrêts infimes et ralentir encore plus les voitures, les obligeant à faire des rampes sinueuses de motricité fine dans mille endroits étroits. Cinquante-quatre nouvelles bornes vers Chailly, plus de 70 vers l’avenue de Provence, 34 près du chemin de la Vuachère, 3 ici, 22 là, 12 ailleurs, on ne peut plus faire 20 mètres sans slalomer entre les bornes, au centre et en périphérie.

C’est un modeste multimodal qui vous écrit. Qui prend les transports en commun, pourtant classés ici parmi les plus lents du pays et dont les conducteurs n’en peuvent plus, tombant malades à cause de leur retard, pris au piège du trafic si fameux « ralenti ». Et en tant qu’automobiliste, reconnaissons humblement que le poste est une excellente nouvelle : il permettra d’améliorer rapidement le beau métier de carrossier.

Mais c’est le cycliste quasi quotidien, dans cette ville qui parle si souvent de vouloir son bonheur, que la question des poteaux inquiète. La vilaine forêt d’élastomère polyuréthane, à peine visible malgré de petites bandes réfléchissantes, plantée en bosquets surprises, est terriblement délicate pour quiconque fait du vélo à Lausanne. Si une tragédie survient, il est pratique de blâmer la voiture la plus proche de l’accident pour avoir causé la tragédie. Mais ce sera sur le poteau qu’il y aura du sang.

Christophe Passerborn in Fribourg, has worked at Le Matin Dimanche since 2014, after having worked in particular at Le Nouveau Quotidien and L’Illustré. Plus d’informations

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