Rive-Nord | Poissons volants de la rivière Romaine – .

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Cette semaine : la rivière Romaine


Publié à 00:31

Mise à jour à 5h00



L’hélicoptère survole la rivière Romaine avec à son bord 20 000 passagers, tous impatients de rentrer chez eux. Jamais on n’a vu des saumons – des milliers de minuscules alevins, dans ce cas-ci – remonter une rivière aussi rapidement.

Ces poissons prennent l’hélicoptère dans le cadre d’un projet d’ensemencement financé par Hydro-Québec pour pallier aux conséquences écologiques du harnachement de la rivière Romaine, réalisé à partir de 2009. Plus d’un million d’alevins y ont été relâchés au cours des dernières années par la Société saumon de la rivière Romaine, responsable du programme.

  • PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

    Le bateau Zodiac doit être transporté par hélicoptère.

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    Les glacières remplies de frites sont transportées de l’hélicoptère au bateau Zodiac.

  • L’eau des glacières doit être à la même température que celle de la rivière.

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    L’eau des glacières doit être à la même température que celle de la rivière.

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    Jay-Penuen Ishpatao est aux commandes du bateau, qui comprend également la biologiste Nadine Marois.

  • Jay-Penuen Ishpatao suit les berges pour permettre au biologiste de choisir les sections les plus propices à la survie du saumon.

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    Jay-Penuen Ishpatao suit les berges pour permettre au biologiste de choisir les sections les plus propices à la survie du saumon.

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« On en a mis beaucoup », confirme la biologiste Nadine Marois, après avoir transféré ses glacières remplies d’alevins dans un zodiac. Le bateau a aussi été héliporté sur une trentaine de kilomètres.

Il n’y a pas de route, ce n’est pas accessible. Il y a des pistes pour quatre roues, mais pas pour tirer un bateau.

Nadine Marois, biologist

Une fois l’opération lancée, la méthode d’ensemencement contraste fortement avec les outils complexes et coûteux déployés jusqu’alors : Mmoi Marois utilise un simple filet d’aquarium pour placer les alevins dans l’eau de la rivière, une centaine à la fois. Elle doit d’abord s’assurer, à l’aide d’un thermomètre, que l’eau des glacières est à peu près aussi froide que l’eau de la rivière. Une trop grande différence pourrait provoquer un choc thermique chez les poissons.

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Les alevins sont relâchés à l’aide d’une épuisette.

Aux commandes du bateau, Jay-Penuen Ishpatao longe les berges pour permettre au biologiste de choisir les sections les plus propices à la survie du saumon.

« Dès qu’ils entrent dans l’eau, ils nagent jusqu’au fond et tentent de se cacher », décrit-elle. Pendant les deux ou trois années suivantes, les jeunes se déplaceront peu et se nourriront de plancton.

« Ils savent d’où ils viennent »

Par moments, le Zodiac semble perdu sur un fleuve complètement vierge, sans aucune trace d’activité humaine. Ce serait oublier les centaines de milliers de tonnes de béton qui ont été coulées en amont pour construire quatre centrales hydroélectriques.

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Parfois, le Zodiac semble perdu sur une rivière complètement vierge.

Un hydravion jaune survole le fleuve. « Il y a du trafic ce matin ! », s’amuse Jay-Penuen Ishpatao, sans lâcher la barre. « C’est lundi ! », répond aussitôt Nadine Marois.

L’eau aussi bouge. Depuis le début du chantier, des équipes de biologistes travaillent sur une série de projets liés à la protection du saumon et d’autres espèces affectées par les changements de leur rivière.

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Un grand filet est utilisé pour compter les saumons qui remontent ou descendent la rivière.

Sur son passage, l’hélicoptère a déjà survolé une équipe d’ouvriers en combinaison imperméable qui lutte contre le courant pour installer un grand filet. Le but : compter les saumons qui descendent ou qui montent.

Nous avons les codes ADN de tous les poissons que nous mettons à l’eau. Nous avons constaté qu’il y a des femelles issues de l’élevage qui sont remontées pour frayer. Donc, ça a marché. C’est encourageant.

Nadine Marois, biologist

Les étapes à suivre pour descendre la rivière, rejoindre les eaux glacées de l’océan Atlantique nord, puis revenir frayer dans la Romaine sont donc inscrites au plus profond de leur cerveau.

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Jay-Penuen Ishpatao tient un bocal rempli de frites.

« Ils savent d’où ils viennent et où ils doivent retourner », explique le biologiste.

Car si les alevins n’ont jamais vu la rivière, leurs parents viennent de là-bas : les parents – capturés dans la Romaine – sont conservés dans un laboratoire de l’Université Laval. C’est de là que partent chaque automne les milliers d’œufs confiés à la pisciculture.

” Mes bébés “

Pour Pierre Desjardins, les journées d’ensemencement sont l’aboutissement de plusieurs mois de travail. À la pisciculture installée près de l’embouchure de la Romaine, c’est lui qui veille sur les oeufs de saumon, devenus alevins depuis la fin avril.

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Pierre Desjardins veille sur les oeufs de saumon à la station piscicole installée près de l’embouchure de la Romaine.

L’homme de 62 ans a même installé un lit de camp pour pouvoir passer la nuit avec eux si nécessaire.

« Je n’ai pas le choix, explique-t-il. Parfois, en hiver, on annonce des tempêtes. Si le système déclenche une alarme à ce moment-là, je ne pourrai pas y aller. » Car si les pompes qui alimentent la rivière en eau tombent en panne, les répercussions peuvent être catastrophiques.

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La rivière Romaine coule du Labrador jusqu’au fleuve Saint-Laurent. Son embouchure se trouve près de Havre-Saint-Pierre.

M. Desjardins doit continuellement entretenir les tiroirs qui servent d’incubateurs aux œufs de saumon. Cependant, ils ne sont pas maintenus au chaud, bien au contraire : en hiver, l’eau de la rivière est si froide qu’elle gèlerait si elle n’était pas en circulation constante. L’homme se gèle continuellement les mains pour nettoyer les petits bassins, retirer et compter les œufs qui n’ont pas survécu, et vérifier que tout le monde se porte bien.

« Ce sont mes bébés », dit-il en riant.

L’attachement sentimental de M. Desjardins, ancien pêcheur de homards, a ses limites. Dans le frigo de la pisciculture, sa compagne Lorraine a déposé pour lui… une assiette de saumon.

Apprendre encore plus

  • 451 kilomètres
    Il s’agit du tronçon de la rivière Romaine, qui coule du Labrador jusqu’au fleuve Saint-Laurent. Son embouchure se trouve près de Havre-Saint-Pierre.
 
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