Ce sont des militants d’extrême droite qui l’ont révélé, mais l’indignation s’étend à la gauche : le député Ugo Bernalicis et les membres du groupe La France insoumise ont déposé mardi 19 novembre une proposition de loi visant à « abroger du code pénal le délit d’apologie du terrorisme ».
► Que veut abroger La France insoumise ?
La facture est courte. D’une part, il abroge l’article du code pénal qui punit « provoquer directement des actes de terrorisme ou prôner publiquement ces actes ». En revanche, il demande des rapports parlementaires sur l’utilisation de cet article.
Dans l’exposé des motifs, le texte affirme « une volonté de préserver la liberté d’expression et notamment le débat politique de toute intrusion d’institutions répressives ». Et d’insister : « Au nom de l’apologie du terrorisme, les ressources de la police et de la justice sont détournées pour en faire le lieu de règlement des débats politiques ; les manifestations, les conférences, les expressions publiques furent interdites, empêchées, étouffées. »
Particulièrement visée est une circulaire du 10 octobre 2023 précisant que l’apologie du terrorisme inclut la tenue publique de propos faisant l’éloge des attentats terroristes subis par Israël le 7 octobre 2033. « en les présentant comme une résistance légitime à Israël ». Or, de nombreux élus, cadres et militants de LFI considèrent que ces massacres ne constituent des crimes de guerre que dans le cadre de la « Résistance palestinienne »ou même un «offensive armée des forces palestiniennes», percevant le Hamas comme un “mouvement de résistance” et non en tant qu’organisation terroriste.
Mathilde Panot, présidente du groupe à l’Assemblée nationale, et Rima Hassan, aujourd’hui députée européenne, ont ainsi été entendues en avril 2024 par la police judiciaire en raison de plaintes pour apologie du terrorisme. Le projet de loi lui-même parle simplement de « crimes de guerre et massacres perpétrés le 7 octobre 2023 par le Hamas en Israël »et non le terrorisme.
► Que propose LFI pour lutter contre l’apologie du terrorisme ?
“Nous ne voulons pas abroger le délit d’apologie du terrorisme, nous voulons revenir à l’État d’avant 2014, c’est-à-dire rétablir ce délit dans le droit de la presse”, a assuré Mathilde Panot, dimanche 24 novembre sur BFMTV. “Il ne s’agit pas d’une nouvelle incrimination, mais d’un transfert dans le code pénal de ce qui figurait déjà dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse”confirms Yves Mayaud, professor emeritus at the University of Paris-Panthéon-Assas, in a note published by Le Club des juristes.
“Ce transfert a été fait pour des raisons d’efficacité”poursuit ce spécialiste du droit pénal. Avant la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, l’apologie du terrorisme était en effet « d’un régime particulièrement favorable, qui a toujours été dicté par la volonté de liberté de la presse protégé d’une répression excessive ». D’où la volonté du gouvernement de gauche de l’époque d’insérer ce délit dans le code pénal afin de permettre l’application de « les règles de droit commun de procédure et de poursuite, exclues en matière de presse, telles que la possibilité de saisies ou la possibilité de recourir à la procédure de comparution immédiate ».
C’est donc le régime précédent, celui de la loi de 1881, que LFI souhaiterait voir à nouveau appliqué. Si le projet de loi d’Ugo Bernalicis affiche clairement cette intention dans son exposé des motifs, il ne la transpose pas dans la loi. Autrement dit, le texte supprime non seulement le code pénal du délit d’apologie du terrorisme, mais l’ensemble du droit français.