« Après huit semaines dans le marais, nos cahiers sont pleins de boue »

« Après huit semaines dans le marais, nos cahiers sont pleins de boue »
« Après huit semaines dans le marais, nos cahiers sont pleins de boue »
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Gisèle Pelicot et son avocat Stéphane Babonneau, à la sortie du palais de justice, à Avignon, le 19 novembre 2024. CHRISTOPHE SIMON / AFP

Cela fait 50 accusés dans une petite salle d’audience. Ce mardi 19 novembre, dernier jour des débats avant les plaidoiries et l’acte d’accusation, plus de dérogations, tout le monde est de nouveau convoqué. Des Blancs, une majorité de Blancs, des Maghrébins, trois noirs. Des grands, des maigres, des moyens, des chétifs, des ventrus, beaucoup de ventrus, quelques obèses. Des taches chauves, beaucoup de taches chauves. Queues de cheval, très présente la queue de cheval, maladive ou luxuriante. Certaines barbes bien entretenues, d’autres non. Crânes rasés, cheveux blancs, grisonnants, huilés, teints en noir, avec des houppes colorées. Piercings, tatouages. Deux paires de béquilles, une paire de baskets. Et à la barre, un dernier accusé.

Mécaniquement, nous avons noté : Philippe L., 62 ans. J’ai posté l’annonce “à la recherche d’une femme coquine” sur Coco.fr. A été contacté par Dominique Pelicot. Déplacement à Mazan (Vaucluse) le 7 juin 2018. Nous avons écouté la cinquantième réponse à la même cinquantième question du président. « Admettez-vous le viol dont vous êtes accusé ? – Non. – Gisèle Pelicot a-t-elle pu vous donner son accord ? ? – Non. » Les dernières explications du dernier accusé ont été enregistrées. « Cela m’a semblé bizarre, et puis je n’ai pas cherché plus loin. ” ” Il [Dominique Pelicot] Il m’a dit de faire ceci, il m’a dit de faire cela, je l’ai fait. » Et aussi : «J’ai perdu la connexion avec mon cerveau. » Et enfin : “Je m’excuse d’avoir involontairement participé aux souffrances de Mmoi Pélicot. » C’était fini, le procès pour viol de Mazan sortait du tunnel des interrogatoires dans lequel il était entré deux mois plus tôt.

Habituellement, c’est le moment où vous souhaitez vider vos cahiers. Pour raconter la scène oubliée. Le témoin inattendu, le rire, le dialogue pétillant, l’instant joyeux, l’évasion. Partager le souvenir de l’émotion d’une mère, le fantasme d’une réponse, la lumière d’un regard. Bref, de toutes ces choses vues qui sont la richesse d’une longue épreuve.

Dans nos cahiers remplis des audiences pour viol de Mazan, il y a : “bite dans la bouche”, “bouffer le cul”, « Jacques doigté », « magnifique de près et derrière », « bien rempli », “ça rentre tout seul”, “bien cherché et bien baisé”, “battu dans le dos 2”, « 3e jardin “, “gicle sur le cul”C’est le titre des vidéos enregistrées par Dominique Pelicot, que le président Roger Arata a fini par cesser de prononcer au lancement de leur diffusion. Qu’est-ce qu’on fait avec ça ?

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