Alors que débute aujourd’hui le congrès de l’Association des Maires de France, Clémentine Le Marrec, maire de la petite ville de Bénouville (Calvados) vient parler de son quotidien, de sa passion et des difficultés auxquelles sont confrontés les maires, notamment avec la baisse des subventions. .
Alors que le congrès de l’Association des Maires de France débute aujourd’hui à Paris avec le thème « Collectivités… Heureusement ! », les communes qui gèrent des services publics au quotidien, qui portent des projets concrets qui améliorent le cadre de vie des habitants et qui donnent du sens à l’action publique, bref beaucoup de choses. N’est-ce pas parfois un peu trop pour vous, en tant que maire ?
Ça arrive ! Mais il est vrai que ce rôle polyvalent est aussi enrichissant. Dans les petites et moyennes collectivités, vous rédigez un dossier de subvention d’une quinzaine de pages, une heure plus tard, vous installez des tables et des chaises dans le gymnase et vous déposez ensuite un colis pour une personne isolée. C’est donc vrai qu’il faut savoir s’adapter constamment.
L’Association des maires de France dénonce un gaspillage et brandit le chiffre de 41 démissions de maires par mois. Qu’est-ce qui te fait tenir ? Qu’est-ce qui vous donne envie de vous lever chaque jour pour être maire de Bénouville ?
J’ai choisi cet engagement jeune parce que je considère que je vis la commune d’une autre manière. Je suis active, je dépose mes enfants à l’école tous les matins. Je participe également aux événements associatifs un peu tard. Alors voilà, je vis différemment la vie associative et j’ai souhaité avoir cet engagement très tôt. Donc après c’est un choix.
Comme vous l’avez dit, c’est très prenant. Vous n’en avez jamais marre ?
Si parfois le dimanche soir, lorsque vous êtes appelé par la gendarmerie à 22h30, vous devez sortir et que votre accompagnateur ne comprend pas forcément… vous en avez parfois marre. Mais c’est aussi un choix que nous avons fait. C’est un engagement que nous avons pris et que nous devons respecter.
On ressent donc depuis plusieurs années une exaspération croissante chez les maires de France. Et puis la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, ce sont les coupes budgétaires prévues pour le budget 2025. Est-ce inacceptable ?
L’État n’est aujourd’hui plus un partenaire fiable. C’est à dire qu’on nous donne des règles, qu’on nous impose un certain nombre de contraintes que nous respectons malgré le manque de ressources humaines dans nos communautés. Et aujourd’hui, alors qu’on arrive au bout du chemin, c’est-à-dire au dépôt du permis de construire et des demandes de subvention, on nous dit que les règles ont changé, que finalement l’enveloppe budgétaire est moindre et qu’on ne sait plus si le projet pourra finalement être réalisé.
Y a-t-il des projets dans votre commune qui sont remis en cause ?
Nous sommes en train de construire un centre culturel et social. Ici nous sommes vraiment à la dernière étape et il faut savoir que l’Etat nous demande de ne pas faire de demandes de subvention tant que nous n’avons pas atteint cette dernière étape qui est l’avant-projet final et le dépôt du permis de construire. Et donc, on arrive à la veille de la pose de la première pierre et on nous dit « bon, peut-être que l’enveloppe va être réduite ».
Cela vous met-il en colère parce que vous, les communes, devez rendre des comptes ?
Complètement ! Un euro reçu pour un euro dépensé. Nous sommes obligés de voter l’équilibre budgétaire, alors que l’État ne le fait pas. Il peut voter pour un budget déficitaire. Et il le fait depuis des décennies. Donc, nous, la position de l’AMF, c’est de dire que la rigueur au sein des municipalités est déjà présente. Nous faisons beaucoup d’efforts même si nous sommes responsables de 70% des investissements publics.
Après la fronde des départements qui ont obtenu gain de cause auprès du Premier ministre Michel Barnier, pensez-vous que vous pourrez à votre tour vous rassembler et faire évoluer la position du gouvernement sur les coupes budgétaires ?
Je le pense et je l’espère, car nous sommes toujours le premier lien de proximité. Lorsque les habitants ont un problème ou une idée, ils viennent en mairie. Nous sommes le premier employeur de France. Comme je l’ai dit plus tôt, 70 % des investissements publics sont réalisés par les collectivités locales. Et comme le disait David Lisnard (président de l’association des maires de France), nous ne sommes pas là pour nous plaindre. Nous sommes juste là pour pouvoir faire avancer nos dossiers, travailler et offrir un bon niveau de service public à nos citoyens.
Mais est-ce qu’il faut économiser de l’argent quelque part ?
Oui, donc nous le faisons à notre échelle. Après, on parle souvent du millefeuille administratif. Le problème c’est que tout le monde touche à tout. Un exemple : les compétences en tourisme. Tout le monde fait du tourisme, les EPCI, les régions, les départements, l’Etat… Alors peut-être est-ce là qu’il faudrait chercher les économies plutôt que chez les collectivités locales qui gèrent leur budget au centime près.