L’égalité entre hommes et femmes existait en Valais il y a 6000 ans

L’égalité entre hommes et femmes existait en Valais il y a 6000 ans
L’égalité entre hommes et femmes existait en Valais il y a 6000 ans

Un des corps découverts dans la nécropole de Barmaz.

UNIGE

Le Néolithique marque le début de l’élevage et de l’agriculture. En Suisse, cette période s’étend entre 5500 et 2200 avant notre ère. Les premières communautés agropastorales sont ainsi progressivement passées d’une économie de prédation, où la chasse et la cueillette fournissaient les nutriments essentiels à leur survie, à une économie de production. Ces changements profonds bouleversent les habitudes alimentaires et la dynamique de fonctionnement des populations. Les os et les dents des individus conservent des traces chimiques que les scientifiques savent désormais détecter et interpréter.

Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) a étudié les ossements d’individus enterrés il y a 6000 ans dans la nécropole de Barmaz, en Valais, l’une des plus anciennes populations néolitiques connues en Suisse romande. L’objectif de l’étude menée par Déborah Rosselet-Christ, doctorante au Laboratoire d’archéologie et d’anthropologie africaines de la Faculté des sciences de l’UNIGE, est l’application de l’analyse isotopique sur des restes humains, afin d’en apprendre davantage sur leur alimentation et leur mobilité.

Les isotopes révèlent ce qu’ils ont mangé

Les niveaux de certains isotopes du carbone, de l’azote, du soufre et du strontium dépendent en effet de l’environnement dans lequel chaque individu vit et se nourrit. Les isotopes sont des atomes qui possèdent le même nombre d’électrons et de protons, mais un nombre différent de neutrons. Cette technique très fine et délicate est appliquée pour la première fois sur des populations agropastorales alpines du Néolithique moyen en Suisse romande.

Fouillé dans les années 1950 et 1990, le site de Barmaz, à Collombey-Muraz dans le Valais Chablais, est l’un des plus anciens vestiges de sociétés agropastorales de Suisse romande conservant des restes humains. Il est constitué de deux nécropoles ayant renfermé les ossements d’environ soixante-dix individus. Pour ses travaux de maîtrise, Déborah Rosselet-Christ, première auteure de l’étude publiée dans le « Journal of Archaeological Science : Reports », en a sélectionné 49 (autant de femmes que d’hommes) sur lesquels elle a systématiquement prélevé des échantillons. du collagène sur certains os ainsi que des fragments d’émail de leur deuxième molaire.

«La deuxième molaire est une dent dont la couronne se forme entre trois et huit ans», explique le chercheur. « Une fois formé, l’émail des dents ne se renouvelle plus tout au long de la vie. Sa composition chimique est donc le reflet de l’environnement dans lequel son propriétaire a vécu durant son enfance.

14% d’étrangers

L’analyse des 49 individus de Barmaz révèle une grande homogénéité chez la majorité d’entre eux et des valeurs nettement différentes dans seulement 14% des échantillons, indiquant qu’il s’agissait de personnes d’origine différente.

«La technique permet de déterminer qu’il s’agit d’individus qui n’ont pas vécu les premières années de leur vie là où ils ont été enterrés, mais il est plus difficile de déterminer d’où ils viennent», précise Jocelyne. Desideri, maître de conférences dans le même laboratoire et dernier auteur de l’article. « Nos résultats montrent que les gens se déplaçaient à cette époque. Ce n’est pas une surprise, plusieurs études mettent en évidence le même phénomène dans d’autres lieux et à d’autres époques du Néolithique.

Le collagène permet la détermination des rapports isotopiques du carbone (δ13C), de l’azote (δ15N) et du soufre (δ34S). Chaque mesure renseigne sur des aspects précis de l’alimentation, comme les catégories de plantes, la quantité de protéines animales ou encore la consommation d’animaux aquatiques. Les os se renouvelant constamment, les résultats ne concernent que les dernières années de la vie d’un individu.

Une égalité qui ne se retrouve pas partout

Les scientifiques ont pu en déduire que ces anciens habitants de la région de Barmaz avaient une alimentation basée sur les ressources terrestres (et non aquatiques) avec une très forte consommation de protéines animales. « Ce qui est plus intéressant, c’est qu’on n’a mesuré aucune différence entre les hommes et les femmes », constate Déborah Rosselet-Christ. « Pas même entre locaux et non-locaux. Ces résultats suggèrent donc un accès égal aux ressources alimentaires entre les différents membres du groupe, quels que soient leur origine ou leur sexe. Ce n’est pas toujours le cas. On retrouve par exemple des différences alimentaires selon le sexe dans les populations néolithiques du sud de la France.

Les scientifiques ont cependant pu démontrer que les personnes enterrées d’origine non locale n’étaient enterrées que dans l’une des nécropoles (Barmaz I) et que des niveaux plus élevés d’isotope de l’azote étaient mesurés dans l’autre. (Barmaz II). Les deux nécropoles étant contemporaines et distantes de seulement 150 mètres, cette dernière observation pose la question de savoir s’il existe une différence de statut social entre les deux groupes de défunts. «Nos mesures isotopiques offrent un complément intéressant aux autres approches utilisées en archéologie», estime Jocelyne Desideri. “Ils permettent d’éclairer l’image que l’on tente de se faire de la vie de ces premières sociétés agropastorales alpines, des relations entre les individus et leur mobilité.”

 
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