Les déversements de sol provoquent de graves tensions à Kanesatake

Les déversements de sol provoquent de graves tensions à Kanesatake
Les déversements de sol provoquent de graves tensions à Kanesatake

Construction Nexus, une entreprise d’excavation souvent sanctionnée pour ses manquements environnementaux, décharge depuis des mois la terre des chantiers de construction de la région de Montréal, au bord de la rivière des Outaouais, à Kanesatake. Alors que le conseil de bande mohawk met en demeure Nexus de cesser d’y déverser ces débris, les dirigeants mohawks qui craignent une contamination de l’eau ont été violemment attaqués, apprend-on. -.


Publié à 02h29

Mis à jour à 5h00

5 juin 2024. Des camions de l’entreprise lavalloise Nexus convergent vers la petite municipalité d’Oka. En presque une heure, - répertorie une dizaine de camions qui, à partir de l’autoroute 640, empruntent le chemin d’Oka et le rang Sainte-Philomène en longeant la rivière des Outaouais.

Une fois sur le territoire mohawk de Kanesatake, ces véhicules pénètrent dans des terres récemment déboisées. C’est là, au bout du chantier, près du cours d’eau, qu’ils déversent la terre chargée plus tôt dans un chantier de construction de la région de Montréal.

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PHOTO FRANÇOIS ROY, -

Une fois sur le territoire mohawk de Kanesatake, les véhicules pénètrent dans des terres récemment déboisées et déversent les terres chargées plus tôt.

Un camion que nous suivions chargeait de la terre depuis un chantier routier à Beaconsfield. Suivant une démarche similaire, le média anglais The Rover a affirmé samedi que des terres provenant de chantiers de construction à Laval et le long de l’autoroute 440 étaient déversées en territoire mohawk.

Des images qui - capturé avec un drone montre un camion à 10 roues qui, à Kanesatake, décharge 20 m⁠3 de la pierre et de la terre de sa benne. A côté, une pelle mécanique et un bulldozer compactent les tas qui s’accumulent ici et là. Une heure plus tôt, ce même bulldozer travaillait la surface d’un terrain voisin où le remblai a fait disparaître la plage qui s’y trouvait jusqu’il y a peu.

Ce va-et-vient quotidien des camions de Nexus dérange et inquiète des membres de la communauté. Le 14 mai dernier, le Conseil de bande a d’ailleurs fait parvenir une mise en demeure à l’entreprise – et à son président, Romeo Sacchetti – pour forcer l’arrêt des travaux. « Si vous croyez, ou si on vous a avisé, qu’il s’agit d’une région de non-droit, vous vous trompez », lit-on dans le document que La Presse a obtenu.

Le Conseil y rappelle « que les lois fédérales environnementales s’appliquent, tout comme les lois provinciales en matière d’environnement ». Si Nexus ne cesse pas « immédiatement tout déversement sur le territoire mohawk de Kanesatake », des poursuites seront entamées, déclare le Conseil de bande.

« Malgré les tentatives des membres du Conseil pour bloquer l’accès de ces camions au territoire mohawk, les chauffeurs de votre entreprise ont continué à arriver et à considérer Kanesatake comme un site de déversement non réglementé », est-il écrit.

Ce que cette mise en demeure ne décrit toutefois pas, c’est la division que suscitent ces activités dans la communauté. Une situation explosive qui a mené, en mai dernier, à une violente altercation entre le propriétaire d’un des sites et deux chefs du Conseil, Serge Otsi Simon et Brent Etienne.

Dans une vidéo visionnée par La Presse, on voit les chefs questionner un camionneur de Nexus. Quelques minutes plus tard, le propriétaire du site arrive et la situation dégénère. Une bagarre éclate. Ce dernier assène un coup de poing à l’un des chefs alors qu’un employé projette au sol l’autre membre du Conseil de bande.






Le chef Brent Etienne, impliqué dans l’altercation, déplore ce qui se déroule à Kanesatake : « C’est vraiment regrettable que des gens qui n’ont pas à cœur notre communauté modifient complètement le territoire qui a fait vivre les habitants de Kanesatake depuis 6000 ans. Aussi loin qu’on se rappelle, le lac [des Deux Montagnes] nous avons fourni du poisson à notre peuple et la terre nous a donné les récoltes et le bois nécessaires à la construction de nos maisons. »

Son de cloche similaire du chef Serge Otsi Simon : « Pour combler comme ils le font, près du lac, ils doivent avoir le feu vert du conseil de bande et il faut aussi qu’il y ait une étude environnementale. Mais tout cela n’a pas été fait. Ils ont ignoré notre département de l’environnement. »

«J’ai déjà dit au ministre Ian Lafrenière: ce sont des entreprises qui ont des permis de votre gouvernement, donc c’est votre responsabilité d’arrêter ces camions et de les sanctionner», a-t-il déclaré, indiquant que la négligence des gouvernements est une des raisons pour lesquelles les entreprises déversent. débris en territoire mohawk. Il ajoute du même souffle : « Je l’ai dit mille fois : nous n’avons pas les ressources pour arrêter cela. Nous n’avons pas de force policière; nous n’avons pas de caserne et nous n’avons pas d’officiers pour surveiller l’environnement. »

Pascal Quévillon, maire d’Oka, est bien conscient de la situation. Cela fait des années que des camions traversent le centre-ville de sa municipalité pour se rendre à Kanesatake. “Mais les allées et venues ont été plus intenses depuis février ou mars de cette année”, constate-t-il. Il a interpellé les députés de sa circonscription, mais aussi le ministre de l’Environnement du Québec, Benoit Charette, et celui des Relations avec les Premières Nations et les Inuits, Ian Lafrenière.

Le maire dit craindre une contamination de l’eau potable de la commune.

Le ministère de l’Environnement lui-même a du mal à prélever des échantillons sur le territoire [pour évaluer l’impact environnemental] car ils peuvent être menacés.

Pascal Quévillon, maire d’Oka

Le président de l’entreprise, Romeo Sacchetti, a décliné nos demandes d’entretien. Lorsqu’il est contacté par -l’entreprise n’avait pas accusé réception de la mise en demeure envoyée par le conseil de bande le mois dernier.

C’est la firme de relations publiques National qui a finalement envoyé des commentaires par courriel au nom de Nexus vendredi dernier. Il est écrit qu’au cours des dernières heures, l’entreprise a contacté le conseil de bande pour lui demander de « fournir des informations complémentaires afin de mieux comprendre le fondement factuel des éléments qui y sont allégués ».

Nexus affirme n’avoir « à aucun moment déversé de terre dans la rivière des Outaouais » et assure « maintenir une bande tampon entre les milieux naturels et le site de dépôt ». Son « engagement en faveur de la protection de l’environnement reste inébranlable », affirme-t-elle, rappelant qu’elle n’est responsable que du transport des terres et non du remblai.

Habitué aux sanctions

Construction Nexus – qui affiche sa certification LEED sur son site Internet – n’est pas étrangère aux infractions environnementales. Depuis 2020, le ministère de l’Environnement lui a adressé six sanctions administratives pécuniaires, l’équivalent d’amendes pour violations environnementales. Trois concernent la transformation non autorisée de matières résiduelles de construction à Laval.

Les sanctions des derniers mois sont liées au déversement de terres, en milieux humides, sur des terres agricoles que Nexus a achetées à Mirabel en décembre 2022. Des inspections du ministère ont permis de détecter la présence d’hydrocarbures dans ce qui a été déversé.

La Commission de protection du territoire agricole du Québec a également ouvert une enquête à ce sujet et la municipalité a, de son côté, forcé la fermeture du site en septembre dernier.

À Kanesatake, Nexus fait affaire avec l’entreprise Excavation X, responsable du remblai. Son propriétaire, Dany Duchaine, a été impliqué dans plusieurs cas d’aliénation inadéquate de terrains. En 2020, le ministère de l’Environnement a pris des mesures contre une autre de ses entreprises – qui se fait appeler Nycel Dépôt ou Remblai Expert – pour avoir déversé de la terre contaminée sur un terrain agricole à Saint-Eustache.

Plus récemment, il a participé au remblayage non conforme d’un terrain agricole à Mirabel appartenant au trésorier de la division Laurentides de l’Union des producteurs agricoles, tel que rapporté l’automne dernier. Le devoir.

Dany Duchaine a refusé d’accorder une entrevue à -. « Allez voir les propriétaires fonciers pour lesquels je travaille. Je suis embauché par eux. «Ce n’est pas moi qui livre», répond-il lorsqu’on l’interroge sur ses activités en territoire mohawk.

 
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