Alors que l’État a longtemps eu le monopole des politiques économiques, le rôle des élus locaux en la matière est désormais essentiel. Dans l’Hérault, certains l’ont bien compris : ils se mettent désormais en quatre pour tenter d’attirer de nouvelles entreprises sur leur territoire et accompagner le développement de celles déjà implantées.
Les élus sont désormais attendus sur tous les fronts, y compris celui de l’économie. Pas question de laisser les entreprises se débrouiller seules ! Pour Alain Barbe, maire de Matelles et président de la Communauté de communes du Grand Pic Saint-Loup, l’implication des élus dans le développement économique de leur territoire, longtemps minime, est en effet devenue essentielle : « Les élus locaux ont historiquement été moins impliqués dans le développement économique car cette responsabilité était largement centralisée, et le soutien aux entreprises ou à la création d’emplois relevait principalement de la responsabilité de l’État ou des grandes régions. Mais aujourd’hui, dans un contexte de décentralisation accrue et de concurrence entre territoires, les élus locaux jouent un rôle de plus en plus déterminant. ».
Depuis la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) promulguée en 2015, le développement économique est en effet devenu une compétence obligatoire pour les communautés de communes. Les élus prennent donc le sujet à bras le corps.
Béziers, Montpellier, Sète : chacune a sa propre agence de développement
Dans l’Hérault, plusieurs agences de développement ont vu le jour ces dernières années sous l’impulsion des élus pour attirer les entreprises et dynamiser le tissu économique, comme Béziers Pulse, l’Agence de Développement et Transitions de la Métropole de Montpellier – toutes deux nées fin 2023. -, de l’agence économique du Pays Cœur d’Hérault ou encore de Blue–Invest à Sète Cap d’Agde Méditerranée. Cette dernière, co-présidée par Sébastien Frey, maire d’Agde et président de la communauté urbaine Hérault Méditerranée, et François Commeinhes, maire de Sète et président de Sète Agglopôle Méditerranée, propose un accompagnement sur mesure aux entreprises souhaitant s’implanter ou se développer en la région.
« La création de l’agence elle-même est une marque de soutien fort à l’économie locale. Il reflète une volonté commune des deux agglomérations de s’unir pour accroître le soutien à l’économie. »explique Pascal Peintre, directeur général de Blue Invest.
Concrètement, l’agence simplifie les démarches administratives pour les entreprises, propose des sites d’implantation adaptés à des besoins variés (terrains, ateliers, bureaux) et valorise les filières d’avenir présentes autour du Bassin de Thau, comme l’économie bleue, l’art de vivre, la santé et même les industries créatives. Le concept de guichet unique facilite la coordination entre les différents acteurs et réduit les obstacles pour les entrepreneurs.
According to Pascal Peintre, « Les élus du territoire se sont lancé un défi : progresser dans l’innovation. Pour y parvenir, nous avons créé et structuré en trois ans un réseau de huit structures d’accompagnement, qui se renforce progressivement : des incubateurs comme Gigamed à Bessan et Saint Thibéry ou Flex à Sète ; des plateformes d’innovation comme BlueThauLab à Sète ;.
L’agence a également créé un réseau d’ambassadeurs locaux, composé de femmes et d’hommes chefs d’entreprise jouissant d’une forte notoriété. Parmi eux, Florie Tarbouriech, directrice de l’entreprise éponyme, issue d’une famille d’ostréiculteurs qui perpétue la tradition ostréicole tout en se réinventant et en innovant, ou encore Jérôme Jausseran, président de Force sud, leader dans la production et la distribution de melons, fruits et légumes basés à Saint-Thibéry.
« Les investisseurs doivent sentir qu’il existe un volontarisme politique »
Béziers Pulse incarne également la volonté de la région Béziers de se positionner comme un acteur économique dynamique et attractif. Alban Gérard, directeur du développement économique de l’agglomération de Béziers, explique les actions concrètes menées par l’agence : « Nous avons mis en place de nouveaux événements comme le Salon des Entrepreneurs, le Hackathon où nous réunissons entreprises et étudiants pour réfléchir à des idées innovantes, ou encore Dionysud, le salon des vins du grand sud, dont nous sommes partenaires. Nous sommes également venus des personnalités du monde politique ou économique pour des conférences, comme Arnaud Montebourg, Jean-Louis Borloo, François Lenglet. Cela contribue à faire la fierté des entrepreneurs locaux..
L’agence a également mis en place un guichet unique pour accompagner les entreprises dans leur implantation et leur croissance, en leur offrant un réseau d’accompagnement et en facilitant l’accès aux treize parcs d’activités de la ville. « Les élus ont longtemps considéré que le domaine économique leur était étranger. Mais voyant les fermetures de commerces de centre-ville se multiplier, ils ont été progressivement amenés à s’y intéresser. »poursuit Alban Gérard. Pour lui, cette implication des élus rassure les investisseurs et booste la croissance économique : « Les investisseurs privés ont besoin de sentir qu’il y a un volontarisme politique, une ligne d’action, une énergie ».
Un exemple notable du rôle joué par les élus est le parc d’activités économiques de Mazeran, à Béziers, qui a obtenu le label « site clé en main » en avril 2024. Ce dispositif vise à accélérer l’installation des entreprises industrielles en facilitant les démarches administratives. Ce site de 111 hectares accueillera notamment d’ici 2026 une gigafactory d’hydrogène vert, un projet porté par l’entreprise Genvia, fer de lance de la transition énergétique dans la région. « L’obtention de ce label est le résultat d’un choix politique délibéré de protéger ces hectares pour l’ensemble de la filière hydrogène.explains Alban Gérard. Depuis deux ans et demi, aucune commercialisation ni travaux n’ont été entrepris en zone Sud dans cette optique. Nos élus locaux ont parfaitement compris les enjeux de ce secteur d’avenir et d’excellence générateur d’emplois, ils ont envisagé le long terme avec courage, afin d’accélérer la réindustrialisation du pays ».
Pour les élus de la communauté de communes du Grand Pic Saint-Loup, présidée par Alain Barbe, maire de Matelles, l’action en faveur du développement économique se traduit là encore par des initiatives locales bien définies. « Nous avons créé la Maison des Entreprises, pour faciliter les démarches et l’accès aux ressources et partenaires essentiels de l’écosystème économique, notamment pour l’implantation ou la recherche de financements ; lancé la plateforme de recrutement Emploi Pic Saint-Loup, accessible et gratuite, pour favoriser l’emploi local et soutenir les entreprises; a encouragé les entreprises locales à adopter des pratiques durables et éthiques avec la Charte ETHIQ, qui renforce l’image du territoire comme un espace socialement attractif pour les entreprises responsables ».
« Des partenaires plutôt que des concurrents »
Et plutôt que de travailler dans leur coin, en silos, comme autrefois, les élus héraultais s’appuient de plus en plus sur la coopération entre territoires et agences de développement pour maximiser l’impact de leurs initiatives. « Nous opérons désormais davantage en partenaires qu’en concurrents. Avec un bénéfice évident pour les entreprises de l’Hérault » assure Pascal Peintre. Ce partenariat dynamique, qui s’étend de Béziers à Sète et de Montpellier à Lunel, favorise la création d’emplois et stimule le développement de filières traditionnelles ou innovantes. « Ne vous y trompez pas, sourit-il, ce sont les entrepreneurs qui créent l’économie, pas nous. Nous sommes là pour créer les conditions de leur croissance ». Et ce n’est pas rien !