Emilien Gailleton (Pau) s’exprime avant -Japon, premier match de la tournée d’automne

Emilien Gailleton (Pau) s’exprime avant -Japon, premier match de la tournée d’automne
Emilien Gailleton (Pau) s’exprime avant France-Japon, premier match de la tournée d’automne

Samedi soir, Emilien Gailleton (21 ans, 3 sélections) débutera au centre de l’attaque française. L’occasion pour nous de découvrir un gamin attachant et talentueux. La parole est à vous, Emilien…

Tu vas probablement fêtez samedi soir votre quatrième sélection en équipe de mais le grand public ne sait finalement que très peu de choses sur vous. Où as-tu grandi ?

Je suis né à Londres, dans la banlieue de Croydon, où le XV de France a passé quelques semaines lors de la Coupe du 2015. Ma mère est anglaise et mon père français ; il est originaire de Lyon. Les deux se sont rencontrés outre-Manche, à l’époque où papa travaillait dans une pizzeria tandis que maman y terminait ses études de kinésithérapie.

Et après ça, alors ?

A l’âge de 3 ans, je suis arrivé avec eux dans le Lot, à une demi-heure de Cahors et dans un tout petit village de 160 habitants appelé Escamps. Il y a plus de moutons que d’habitants là-bas… J’ai donc passé mon premier permis à Cahors. J’avais 5 ans.

C’est très jeune…

Oui. Mais d’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé le rugby. A 7 ou 8 ans, je prenais déjà mon vélo pour faire une dizaine de kilomètres et m’entraîner au stade le plus proche, à Lalbenque : un vrai champ de patates, le truc ! […] Je pense que j’étais vraiment hyperactif, en fait. J’avais besoin d’un sport qui me canalise.

Pourquoi vos parents ont-ils choisi le Lot lorsqu’ils ont décidé de quitter l’Angleterre, exactement ?

Ils trouvèrent que la pierre blanche du Causse n’avait pas d’équivalent. Ils le trouvaient beau et souhaitaient probablement que la maison abritant leur famille soit construite avec ce matériau.

Vous parlez Anglais ?

(Il répond immédiatement en anglais) « Je parle anglais couramment, oui ! » (rires) À la maison, je parle toujours anglais avec ma mère mais je pense que je maîtrise un peu mieux le français, quand même…

Nous n’allons pas vous raconter l’histoire de la rivalité franco-anglaise, mais vous êtes-vous souvent fait avoir, dans votre vie, sur vos origines britanniques ?

Quand j’étais petite, oui. Pourtant, j’ai toujours soutenu la France… même si je voyais que ma mère essayait souvent de me convertir. (rires) À la maison, quand on regardait les matchs du Tournoi, la maison était divisée en deux…

C’est plutôt original.

Ce qui m’a toujours fait rire, par contre, c’est de faire croire à mes amis que je soutenais le XV de la Rose : ça les énervait car à l’époque, la sélection anglaise battait régulièrement le XV de France. J’ai trouvé ça drôle…

As-tu étudié ?

Je suis toujours au milieu de ça, pour vous dire la vérité. Là, je termine un Master en Staps (Sciences et techniques des activités physiques et sportives, NDLR), à l’Université de Pau.

Et alors, quel était votre rêve d’enfant ? Pompier ? Policier? Autre chose?

Non, j’ai su très vite que je voulais devenir rugbyman professionnel. […] On n’avait pas Canal+ à la maison et donc je n’ai pas regardé les matchs du Top 14. En revanche, j’étais fasciné par le Tournoi des 6 Nations et les Coupes du Monde : je me souviens encore des essais de Wesley en tête de Fofana, des actions de Gaël Fickou… Je rêvais de pouvoir un jour faire les mêmes choses qu’eux.

Vous avez donc trompé Gaël Fickou avant de devenir son équipier à Marcoussis, dix ans plus tard…

C’est un peu ça, oui ! Quand j’ai fait mes premiers pas dans le groupe France, il y a deux ans, c’était étrange de le rencontrer là-bas. J’ai été assez impressionné, je pense. Mais petit à petit, je me suis habitué à l’idée…

Depuis deux ans vous faites des allers-retours réguliers entre votre club de la Section paloise et le XV de France sans être indiscutable de la sélection française. Était-ce parfois difficile à vivre ?

Au début, faire des allers-retours entre Pau et Marcoussis juste pour m’entraîner avec le groupe France me ravissait ; Je me suis dit que j’avais beaucoup de chance de vivre une expérience comme celle-là. Ces formations m’ont beaucoup apporté.

“Donc j’essaie de jouer le plus possible dans les espaces libres”

Et puis?

Cela a duré pas mal de temps et la saison dernière, ces déplacements m’ont un peu coûté cher, physiquement et mentalement. Les trois premiers jours de la semaine, je m’entraînais avec le XV de France puis retrouvais mes coéquipiers de la Section paloise le week-end : déjà, je prenais la place d’un gars qui avait travaillé toute la semaine avec le club et puis, je ne l’ai pas fait. avoir forcément les bons automatismes avec le reste de l’équipe.

Nous vous suivons…

Certes, c’était parfois compliqué mais ces déplacements entre Marcoussis et Pau m’ont aussi permis de m’intégrer plus rapidement dans le système français. Maintenant, je me sens prêt.

Que pouvez-vous apporter à cette équipe de France ?

Mes principales qualités sont le mouvement et la vitesse. J’essaie donc de jouer le plus possible dans les espaces libres. J’ai aussi la chance de n’avoir que 21 ans et d’être encore très frais physiquement. Sur certains aspects techniques ou tactiques, j’ai cependant encore beaucoup de travail à accomplir…

Vous êtes sportif, rapide mais pas très massif. Souffrez-vous parfois dans les duels ?

(Il soupire) Il faut juste savoir quel joueur tu es, en fait… Moi, j’ai toujours été beaucoup plus léger que les autres mais ce déficit de poids m’a aussi aidé à être un peu plus rapide, à bouger plus vite et plus longtemps que les autres. adversaire, sur un terrain. Je veux jouer là-dessus.

D’accord.

Physiquement, en position de un contre un, je perds souvent le bras de fer mais d’un autre côté, je me dis que si j’arrive à me placer dans l’espace plus tôt que mon adversaire direct, il aura peut-être du mal à me rattraper.

Pensez-vous pouvoir un jour vous imposer au milieu de terrain de cette équipe de France ?

Quand j’étais enfant et que je regardais l’équipe de France à la télé, moi aussi j’avais envie de jouer devant toute une nation, d’avoir un peuple qui me soutient… Mais je sais qu’il va falloir travailler dur pour tenir ce rêve. : la concurrence est rude pour le poste et chaque saison nous voyons arriver de nombreux jeunes. Il y a Paul Costes, Léon Darricarrère, Nicolas Depoortère et tant d’autres…

Avez-vous hâte au match de samedi soir ?

Non, pas plus que ça.

Pour quoi ?

S’entraîner avec Antoine Dupont, Thomas Ramos ou Gaël Fickou est très rassurant ! Ils ont tous beaucoup d’expérience et jouent au rugby avec une rapidité qui nous permet souvent d’avoir une longueur d’avance sur nos adversaires. Avec eux, je me déplace tous les jours dans un certain confort et cela me rassure.

Quelle opinion avez-vous du Japon, prochain adversaire de l’équipe de France ?

C’est une équipe très joueuse, qui bouge beaucoup le ballon et enchaîne des séquences particulièrement longues. Elle est également très disciplinée. Samedi soir, il faudra être très prudent et ne pas emprunter la voie de la facilité.

O’Driscoll, Smith, Sella…

Le cadre de vie de la sélection a bien changé depuis la tournée estivale en Argentine. A Marcoussis, les conditions de vie du groupe France sont apparemment bien plus strictes qu’avant. Est-ce difficile à supporter ?

Honnêtement, non. Et puis, nous n’avons encore rien eu à fêter. (rires) Mais je pense que c’est une bonne initiative de la part de Jean-Marc Lhermet (l’élu en charge du haut niveau, NDLR) et de Raphaël Ibanez (le manager des Bleus, NDLR). Ils ont fixé un cadre et maintenant nous savons où nous allons.

Avez-vous des rituels avant un match important ?

Oui et non. J’écoute du rock quand j’ai besoin de me réveiller : Metallica, Red Hot Chilly Peppers… Ça me donne confiance. Ça me donne envie de faire la guerre ! (rires)

Êtes-vous superstitieux ?

Oui et non. J’ai juste une paire de sous-vêtements porte-bonheur…

Comment est-il ?

De couleur jaune et dessinées dessus, en rouge, des vaches béarnaises. J’aime le symbole : il me rappelle le drapeau du Béarn.

Pour vous, qui est le trois-quarts centre par excellence ?

Il y en a plusieurs… Brian O’Driscoll (l’ancien capitaine irlandais, NDLR) m’a déjà beaucoup marqué : ce joueur avait un talent incroyable, était fantaisiste et très spectaculaire. J’ai aussi beaucoup aimé Conrad Smith (ancien All Black, NDLR), qui avait une technique individuelle que je considérais comme exceptionnelle. Je l’ai souvent rencontré à Pau, on discutait de plein de choses. J’ai enfin envie de parler de Philippe Sella car je suis parti quelques saisons à Agen, il m’a toujours donné de bons conseils et il reste une légende du poste en France…

Avec qui parlez-vous de rugby le plus souvent à la maison ?

Ma copine (Clémentine, NDLR), probablement. Elle joue en troisième ligne à Blagnac. Elle a mon âge et a déjà disputé trois finales de championnat de France. Elle est vraiment passionnée aussi : mais quand on est juste tous les deux, on essaie de se canaliser et de parler d’autre chose… Sinon…

 
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