À Fribourg, des chercheurs explorent les toits verts de demain

À Fribourg, des chercheurs explorent les toits verts de demain
À Fribourg, des chercheurs explorent les toits verts de demain

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Un projet de toiture innovant occupe les chercheurs de la Haute école d’ingénieurs de Fribourg (HEIA-FR) sur le site de Bluefactory.

Juliette Falque suit de près l’évolution des différents modules de l’étude. © Charly Rappo

Juliette Falque suit de près l’évolution des différents modules de l’étude. © Charly Rappo

Publié le 03.06.2024

Temps de lecture estimé : 4 minutes

Posés au sol, ces bacs de jardinage ne payent pas de mine. Mais ils préfigurent l’avenir de certaines toitures. Démarré au printemps 2023, un projet innovant de toiture végétalisée occupe les chercheurs de l’Institut des technologies de l’environnement bâti (iTEC) de l’École d’ingénieurs de Fribourg (HEIA-FR) sur le site Bluefactory.

« Nous vivons à une époque où nous essayons de créer une ville éponge, retenant l’eau pour gérer les risques tels que les inondations et les îlots de chaleur. En ville, l’espace est précieux. Mais l’avantage de ces toitures est qu’elles peuvent remplir deux fonctions : la régulation et la production de l’eau », souligne le professeur Fabienne Favre Boivin, directrice d’iTEC.

Avantages du biochar

C’est au niveau des différences de substrats (support de culture) de chacune des cinq cuves que se joue la présente étude. En fonction de leur teneur en biochar. « Le biochar est un type de charbon. C’est de la biomasse pyrolysée (décomposition sans flamme d’un corps organique par la chaleur, ndlr) », explique Juliette Falque. «Il aère la structure du sol, il a une bonne capacité de rétention d’eau et stocke le carbone», explique ce collaborateur scientifique chargé du suivi du projet. « Il est produit sans émissions de CO2. Sa libération de nutriments est très intéressante », ajoute Fabienne Favre Boivin. Autre avantage de taille : sa faible densité, inférieure à celle d’un sol normal. «On peut intervenir sur des toitures existantes en réduisant la surcharge», note le professeur.

« On peut intervenir sur des toitures existantes tout en réduisant la surcharge »
Fabienne Favre-Boivin

« Notre objectif est de tester des substrats capables de retenir l’eau et de produire la meilleure biomasse », explique Juliette Falque. Derrière elle, les cinq « modules » de l’expérimentation. Ils sont constitués de plateaux en aluminium posés sur des supports en bois. La surface métallique est protégée par une bâche en caoutchouc (EPDM), surmontée d’une plaque alvéolée destinée à récupérer l’eau de pluie. « Elle sert de réserve d’eau en période de sécheresse », illustre l’ingénieur agronome. La plaque est elle-même protégée du substrat par un géotextile.

Le reste consiste en un jeu de comparaisons. L’un des bacs ne contient pas de biochar. L’autre en contient 20 %, complétés par 10 % de terre végétale, autant de compost, et 60 % de tuiles concassées. “C’est le substrat le plus proche de ce que l’on trouve déjà sur une toiture.”

Deux autres modules retiennent particulièrement l’attention. Tous deux sont remplis d’un substrat composé à 70 % de biochar et à 30 % de compost. Sauf que l’une est sans plantation, et l’autre garnie de salades de roquette. «Nous voulions une plante qui ne nécessite pas beaucoup d’entretien et qui puisse être utilisée à bon escient», explique le collaborateur scientifique. Celui qui est chargé de cueillir la roquette ne va pas faire de salade. Ses récoltes successives sont pesées et séchées pour déterminer la teneur en eau. Cette mesure permet de quantifier l’eau qui a atteint le substrat et a été absorbée par les plantes. « Nous souhaitons produire des salades de qualité, qui ne soient pas forcément gorgées d’eau. »

Gestion de l’eau

Chaque cuve semble être sous perfusion. Plantées dans le sol, des sondes mesurent la teneur en eau du substrat par permittivité diélectrique entre deux branches métalliques. Ils sont reliés par des câbles qui convergent vers un boîtier en plastique. Celui-ci contient une unité d’acquisition de données qui enregistre les données mesurées chaque minute. La température de surface est également mesurée. Tout comme la quantité d’eau qui sort du module de toiture, pour alimenter un réservoir de récupération d’eau de pluie de plusieurs centaines de litres. Pour ce faire, l’eau passe dans un débitmètre à turbine qui rapporte les volumes écoulés.

170 000

En francs, le coût du projet

Car le projet intègre un système d’irrigation par recirculation des eaux de pluie. « Le but est de stocker l’eau qui arrive en hiver, avec, à terme, l’idée que les systèmes seront irrigués en cas de forte sécheresse. » Le grand réservoir blanc servant à la rétention est quant à lui équipé d’une pompe automatisée qui permet de réinjecter l’eau de pluie dans un circuit d’irrigation placé en surface du module. « L’été dernier, nous n’avions pas besoin d’arroser », explique l’ingénieur agronome.

Même si les résultats de l’étude seront connus après l’été, les premiers indicateurs sont encourageants. « On a une rétention d’eau plus élevée avec le substrat 70 % biochar qu’avec le 0 % et le 20 % », constate Juliette Falque. L’effet fertilisant du biochar est évident : l’agronome a déjà dû désherber et retourner le sol à plusieurs reprises.

Ce projet, estimé à 170’000 francs, est en partie soutenu par la Nouvelle Politique régionale de la Confédération et les mesures du plan climat du canton. «On s’est rendu compte que cette fonction végétale intéressait les entreprises», constate le professeur. Une partie du financement provient effectivement d’acteurs privés, dont l’agence Bulliard Immobilier qui envisage de mettre en place à terme ce type de substrat sur une toiture d’immeuble.

 
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