Et si la BNS introduisait des taux négatifs en 2025 ?

En cas d’évolution géopolitique défavorable, la BNS pourrait n’avoir d’autre choix que de réintroduire des taux d’intérêt négatifs.

Conformément aux attentes du marché, la direction de la Banque nationale suisse (BNS) a abaissé en septembre son taux directeur de 25 points de base, ramenant ainsi l’objectif de taux d’intérêt SARON à 1,0%. Cependant, le Comité de politique monétaire a adopté un ton très accommodant en révisant significativement à la baisse l’ensemble de la trajectoire d’inflation attendue d’ici 2027, ce qui laisse présager des baisses de taux plus importantes que prévu jusqu’ici. La réduction du taux directeur à 1,0% en septembre a été justifiée par la force significative du franc suisse et son appréciation au cours des trois derniers mois en particulier, qui a conduit à des pressions déflationnistes plus importantes que prévu à travers la baisse de l’inflation importée. Le Directoire a également réaffirmé sa volonté de rester actif sur le marché des changes lorsque cela est nécessaire pour contenir les pressions à la hausse sur le franc suisse, deuxième instrument de sa politique monétaire. Toutefois, en pratique, les interventions de change pourraient conduire à une nouvelle augmentation du bilan de la BNS, ce qui l’exposerait au risque d’une volatilité accrue de son résultat d’exploitation.

Quant à l’évolution projetée de l’inflation conditionnelle, elle a été sensiblement révisée à la baisse sur tout l’horizon de prévision : 1,2% en 2024 (contre 1,3% en juin), 0,6% en 2025 (contre 1,1% en juin) et 0,7% en 2026 (contre 1,0 % en juin). L’inflation projetée diminue même à 0,6 % à la fin de l’horizon de projection, au cours des deux premiers trimestres de 2027, tombant ainsi nettement en dessous de la moyenne de long terme (1,0 %). Le premier graphique compare nos prévisions d’inflation avec celles de la BNS et montre que les deux convergent vers 0,6% à la fin de l’horizon de prévision en 2027.

Figure 1 : Projections de l’inflation suisse de Pictet AM & BNS

Source : Pictet Asset Management, CEIC, Refinitiv, BNS

Concernant les perspectives économiques, après une solide croissance du PIB enregistrée au deuxième trimestre de cette année, tirée par le secteur chimique et pharmaceutique, la croissance devrait rester plutôt modeste au cours des prochains trimestres en raison de l’appréciation du franc suisse. et une croissance mondiale plus modérée. Dans l’ensemble, la BNS prévoit une croissance inférieure au potentiel en 2024, à 1,0%, mais une accélération à 1,5% en 2025, l’impact négatif de la force du franc suisse s’estompant avec le temps. l’année prochaine. C’est une bonne nouvelle car aucune récession n’est en vue.

Comme l’inflation devrait tomber nettement en dessous de la moyenne à long terme, la valeur cible du taux SARON devrait être nettement inférieure en 2025, le principal risque étant d’atteindre rapidement la limite de taux d’intérêt de 0 % (taux plancher zéro ou ZLB). Dans ce contexte, la communication du Comité de politique monétaire de la BNS vise à signaler de nouvelles baisses de taux lors des prochaines réunions du Directoire, dans le but d’orienter le marché vers un taux d’intérêt terminal plus bas que prévu avant la réunion de septembre. Cela implique que la BNS devrait abaisser son taux directeur en dessous du taux d’équilibre nominal qui est estimé à environ 1% et qui correspond au niveau actuel du taux cible SARON.

Dans ce contexte de désinflation, nous nous attendons à ce que la BNS réduise encore son taux directeur de 25 points de base en décembre, puis de 25 points de base supplémentaires en mars 2025, ramenant ainsi l’objectif de taux SARON à 0,50%. Notre règle de Taylor modifiée illustrée dans le deuxième graphique corrobore bien notre scénario principal d’un taux directeur de 0,50% à partir de fin mars 2025.

Graphique 2 : Projections des taux directeurs de la BNS basées sur la règle de Taylor de Pictet AM

Source : Pictet Asset Management, CEIC, Refinitiv, BNS

Le risque sur les taux est asymétrique et penche vers un taux SARON dans la fourchette 0-0,25% à fin 2025 voire vers l’introduction de taux d’intérêt négatifs dans un scénario plus défavorable. Globalement, le principal risque pour la BNS est qu’elle disposera de munitions de politique monétaire limitées à partir de l’année prochaine si le taux directeur est ramené à 0% et si les interventions sur le marché des changes restent limitées en pratique. En cas d’évolution géopolitique défavorable entraînant une pression durable sur le CHF, la BNS pourrait n’avoir d’autre choix que de réintroduire des taux d’intérêt négatifs. Toutefois, ce sera un choix difficile car les interventions en matière de change constituent un instrument de politique monétaire plus efficace pour lutter contre la déflation importée.

 
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