A Prilly, l’intégration passe par le supermarché

« C’est la première fois de ma vie que je prends un cours. Je ne suis jamais allé à l’école. Dans un français encore hésitant, Zeyneb explique qu’elle est arrivée en Suisse il y a quelques années, en provenance de Somalie. Jusqu’à présent, elle consacrait toute son énergie à sa maison, mais aujourd’hui elle tourne une page : « J’ai envie de travailler et de rencontrer des gens ».

A Prilly, où elle habite, elle participe à un cours de français d’un genre un peu particulier, puisqu’il se déroule à la Coop du Centre, en pleine journée. Le concept est testé par la Municipalité, du 15 avril au 2 mai, tous les matins du lundi au jeudi. Gratuit et sans inscription, il rencontre un succès inattendu.

« Trente-sept personnes sont venues le premier jour, alors que nous en attendions dix ou douze. Nous n’avions pas prévu de microphone ! sourit Ihsan Kurt, officier municipal chargé des Affaires sociales et de l’Intégration. En tout cas, à mi-mois de ce mois de tests, une cinquantaine de personnes sont là, un mercredi dès 9 heures, donnant de faux airs de salle de classe au restaurant Coop.

Un public très varié

C’est dans ce cadre que débute le cours, animé par deux professeurs de l’association Nouvelles Perspectives, qui dispense plusieurs cours de français gratuits dans le canton. Il se veut cependant itinérant, afin que les étudiants mettent en pratique leurs connaissances en parcourant les magasins du centre.

Ce jour-là, il est prévu de visiter un magasin d’accessoires pour animaux de compagnie. Mais avant de partir, on pratique les pronoms, puis un peu de vocabulaire. « Qui a un animal de compagnie ? » » demande Brigitte Gonzalez-Ostos, présidente de l’association. Quelques mains se lèvent, l’occasion de parler chiens, chats, salamandres et croquettes. Le cours continue chez Petfriends, histoire de se mettre dans la situation.

«J’aime le concept. Nous sommes dans la vraie vie », sourit Oliver. Signe de la diversité des participants, le jeune homme a un tout autre parcours que Zeyneb, puisqu’il a passé ses premières semaines en Suisse romande, où il a suivi sa compagne. Biologiste d’origine sud-africaine, il recherche un emploi mais aussi la meilleure façon d’apprendre le français, avant de trouver un cursus plus intensif.

Elda, quant à elle, a quitté le Paraguay, où elle était journaliste. « J’ai travaillé comme serveuse pendant quelques mois et maintenant je me concentre sur le français. Pour moi, les cours sont chers et je travaille principalement à la maison, tous les jours de manière intensive ! » Visiblement, les efforts commencent à payer grâce à un enthousiasme qu’elle n’est pas la seule à afficher.

Une offre à développer

« Pour les personnes qui arrivent, suivre un cours de français comme celui-ci a un effet consolant, car les autres participants partagent souvent les mêmes questions. En tout cas, nous voyons qu’il y a un réel besoin», constate Ihsan Kurt, dont le parcours de vie l’a conduit de Turquie en Suisse il y a près de trente ans, avec un passage dans des cours de langues.

Le cours organisé par Prilly est particulier à plus d’un titre, notamment parce qu’il implique la participation de la Coop, qui met à disposition ses espaces. Toutefois, d’autres possibilités de cours gratuits existent dans la région et dans le canton, à travers diverses associations soutenues par des subventions publiques.

« Avec ce projet, nous espérons donner envie aux gens de suivre des cours, tout en les accompagnant selon leurs besoins. Cependant, l’offre actuelle est très demandée. De ce point de vue, le succès que nous avons est peut-être le signe qu’il mérite d’être développé », observe Brigitte Gonzalez-Ostos.

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