« à La Réunion, je recharge mes batteries »

« à La Réunion, je recharge mes batteries »
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En pleine préparation des Jeux Olympiques de Paris, Clarisse Agbegnenou a décidé de faire escale à La Réunion. La sextuple championne du monde et quintuple championne d’Europe explique dans l’interview suivante combien le Meeting est vital pour elle dans sa préparation. Elle y vient régulièrement depuis 2014 et y puise souvent l’énergie nécessaire à ses exploits. C’est même son île porte-bonheur. En 2021, elle y avait déjà posé ses valises, avant les Jeux de Tokyo. Quelques mois plus tard, elle remporte deux titres olympiques. Entretien (Photo sly/www.imazpress.com)

• Clarisse Agbegnenou, vous entretenez un lien privilégié avec la Réunion. Pouvez-vous nous en parler?

– Je suis venu à La Réunion pour la première fois en 2014, avec mon ancien club d’Argenteuil. J’ai ensuite appris à découvrir l’île durant les trois mois que j’y ai passés pendant la période de confinement.

Depuis, j’y retourne régulièrement pour diverses raisons dont les balades, la cuisine créole, les fruits notamment, bien meilleurs ici qu’en métropole, le soleil bien sûr et la jovialité des gens. J’y ai créé des liens avec des personnes que je considère aujourd’hui comme de la famille. La Réunion est une île où je me ressource. Quand je pars, je suis gonflé à bloc.

• Vous avez choisi la préparation individuelle à La Réunion, loin du collectif de l’équipe de France. Pour quoi ?

– J’ai bouclé le Grand Chelem de Paris et le Grand Chelem d’Ouzbékistan (avec deux victoires, ndlr) puis des stages au Japon et à Temple-sur-Lot avec l’équipe de France. J’ai alors su que le groupe allait partir pour les Championnats d’Europe.

Comme je ne les faisais pas, j’ai eu une période d’incertitude dans mon calendrier. Je me suis dit que c’était le bon moment pour faire un stage individuel de valorisation énergétique à la Réunion. Et puis, j’avais aussi envie de m’éloigner du stress de la préparation en France, à l’heure où ça commence à être mouvementé à 100 jours des JO chez moi.

J’ai eu l’occasion ici de refaire une préparation très personnelle sur le plan musculaire, de retravailler ma force et ma puissance, avant les championnats du monde qui arrivent prochainement (du 19 au 24 mai à Abu Dhabi, ndlr).

– Comment ce stage s’inscrit-il dans votre préparation ?

– J’ai fait venir Gianni Locarini, mon professeur de mouvement. Avec lui, je veux préparer mon corps à être fort, en trois mois, pour affronter les tempêtes de stress au moment des JO.

Je suis là pour renforcer les bases, en faisant beaucoup de travail sur le mouvement, la mobilité, la musculation et aussi le judo même si le judo spécifique, j’en ai déjà fait pas mal auparavant, à l’entraînement, avec l’équipe de France.

Je n’oublie pas non plus que je suis là pour pouvoir partager et transmettre mon expérience aux jeunes Réunionnais. Il est important pour moi de montrer à ces jeunes du pôle espoir que je suis accessible, qu’ils peuvent aussi se rendre compte, lorsqu’ils m’ont entre les mains en randori, quel est exactement le bagage qu’ils doivent avoir pour réclamer au plus haut niveau niveau.

– « Être mère a décuplé ma force » –

• A Tokyo, vous avez été sacré champion olympique, mais sans spectateurs dans les tribunes. A Paris, vous serez chez vous, avec tout un public qui vous pousse derrière vous. Comment se préparer à vivre un contexte radicalement différent de celui du Japon ?

– A Tokyo, le stress était déjà à son paroxysme car j’avais juste avant un confinement à gérer, plus une dépression. Je voulais avant tout absolument remporter mon premier titre olympique, après ma médaille d’argent à Rio. Dans ce contexte, j’étais heureux de récupérer ma médaille d’or. A Paris, je serai chez moi, devant ma famille et ma fille. Je devrai tout donner. Je suis sûr que le public me galvanisera.

• Paris 2024 correspond-il au plus grand événement sportif de votre vie ?

• Ce n’est pas nécessairement le plus grand. Car à Tokyo, les enjeux étaient déjà extrêmement élevés. Je ne pouvais rêver de mieux que de gagner au pays du judo. Y remporter deux médailles d’or (individuel et par équipe mixte, ndlr), avait déjà une signification forte. Mais les combats à Paris vont être particuliers, bien sûr. Tous les athlètes français rêvent de disputer les JO chez eux.

– Vous avez donné naissance à votre petite fille en 2022. Jugez-vous la Clarisse d’aujourd’hui aussi forte que celle d’avant la maternité ?
– Ce n’est pas pareil. Je ne suis pas du tout la même femme. Je m’occupe désormais des nouveaux actifs que j’ai construits.

J’ai beaucoup moins de pouvoir. C’est pourquoi j’essaie de la retrouver en ce moment, même si je sais que cela ne sera pas possible tant que je n’aurai pas dormi toute la nuit et allaité, car cela demande beaucoup d’énergie. Je suis conscient d’une part que mon pouvoir ne peut pas se régénérer au même niveau qu’avant. Mais d’un autre côté, être mère a décuplé mes forces. Mon esprit est plus fort qu’avant.

• En participant aux Mondiaux d’Abu Dhabi, avez-vous en tête l’idée d’égaler la Japonaise Tamura-Tani et ses sept titres mondiaux ?

– J’y vais avant tout parce que c’est une grosse compétition et que ça me mettra dans la bonne dynamique par rapport aux Jeux, me permettra de savoir où j’en suis, et de pouvoir faire les derniers réglages. J’y vais aussi avec la ferme intention de ne laisser à personne mon dossard rouge (la couleur du dossard du champion du monde, ndlr).

– ‘Je ne me considère pas comme une star’ –

• Vous êtes l’un des plus grands champions français, hommes et femmes. Comment abordez-vous ce statut de star ?

– En fait, je ne me mets pas de pression par rapport à mon statut. J’ai parfois conscience d’être une personnalité particulière pour beaucoup de gens, mais je ne me considère pas comme une star. Sans doute parce que ce qui compte le plus pour moi, c’est le partage.

Et surtout auprès de la jeune génération. Un jour, je serai remplacé, et derrière moi, j’espère qu’il y aura plein d’autres bons judokas. C’est comme pour vous les journalistes, il ne faut pas vous accrocher à votre statut. Il faut espérer qu’à l’avenir il y aura de bons journalistes pour vous remplacer.

• Oui, mais c’est quand même plus facile de trouver un bon journaliste que la nouvelle Clarisse Agbegnenou…

– Mais ne vous y trompez pas, sans journalistes, on ne parle pas de sportifs. Il faut un écosystème complet pour faire parler de nous… Mais pour revenir à votre question de tout à l’heure sur la pression inhérente aux Jeux organisés en France, j’essaie de relativiser. Pour moi, la vraie pression, c’est avant tout d’être maman d’un côté et sportive de l’autre.

Les femmes me regardent dans ce double costume. C’est le véritable problème. Je me forme pour pouvoir leur prouver qu’on peut combiner les deux, en l’occurrence vie de femme et carrière professionnelle, et ensuite pour que la société nous en donne les moyens.

• Au-delà du combat sur les tatamis, vous menez aussi un combat féministe…

– C’est vrai, oui. Je veux donner aux mamans la force de vivre leur passion à côté.

• Comment envisagez-vous la période post-olympique ?

– Médaille ou pas médaille, je ne m’arrêterai pas à ces Jeux Olympiques. Si par hasard je suis champion du monde pour la septième fois en quelques semaines, je ne m’arrêterai pas à sept. En fait, j’aime les nombres pairs, donc au moins huit serait bien.

Et qui sait, par rapport à la prochaine Olympiade, en 2028. Elle arrivera vite. J’aimerais avoir un deuxième enfant. Mais puisque je connais déjà la recette, pourquoi ne pas continuer le judo après cette seconde naissance, en revenant préparer la Réunion, les JO.

Commentaires recueillis par FP pour www.imazpress.com

Actualités de La Réunion, sports, Judo, Clarisse Agbegnenou

 
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